Le Temps-Agences - Le Hezbollah a dénoncé hier le déploiement annoncé de navires de guerres américains au large du Liban, affirmant qu'il s'agissait d'une menace à la souveraineté libanaise, mais refusant de se laisser impressionner. De son côté, le Premier ministre Fouad Siniora, soutenu par Washington, a assuré qu'il n'avait pas demandé l'aide des Etats-Unis. Jeudi, l'armée américaine a annoncé l'envoi d'au moins trois navires, dont l'USS Cole, au large du Liban, une "démonstration de soutien à la stabilité régionale", selon le porte-parole du Conseil à la sécurité nationale, Gordon Johndroe. Cette démonstration de force est annoncée alors que, pour la 15ème fois en l'espace de trois mois, la séance du Parlement libanais destinée à élire le président a été reportée au 11 mars. Le député du parti de Dieu chiite Hassan Fadlallah a dénoncé une "menace américaine sur le Liban". "Il est clair que cette menace et cette intimidation ne nous affecteront pas", a-t-il ajouté sur la chaîne de télévision Aljadid. L'élu de l'opposition a exhorté le gouvernement de Fouad Siniora à rejeter ce déploiement américain. M. Siniora a répondu qu'il n'avait pas demandé le soutien des Etats-Unis. "Nous n'avons demandé aucun navire de guerre d'aucune partie", a-t-il déclaré à des diplomates arabes à Beyrouth. "J'aimerais souligner qu'il n'y a aucun navire de guerre étranger dans les eaux territoriales libanaises. Seule la marine libanaise et ceux de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) qui aident le Liban à sécuriser ses eaux dans le cadre de la résolution 1710" du Conseil de sécurité, a-t-il déclaré. Plus tôt, des membres de sa majorité anti-syrienne avaient déjà expliqué n'avoir rien à voir avec cette décision de Washington. Tant en reprochant à la Syrie d'avoir provoqué la situation à force de s'immiscer dans les affaires du Liban. La frustration internationale monte en effet alors que le blocage s'éternise au Pays du Cèdre, Washington accusant Damas d'en être à l'origine. Le Liban est sans président depuis le 23 novembre, majorité et opposition n'arrivant pas à s'accorder pour procéder à l'élection du successeur du pro-syrien Emile Lahoud, même si le compromis a été fait autour du nom de Michel Sleimane, actuel chef d'état-major de l'armée. Ce déploiement annoncé faisait hier la Une de la presse à Beyrouth. "As-Safir", proche de l'opposition, parlait d'une "provocation", titrant : "le destroyer Cole dans les eaux libanaise pour terroriser la résistance, la Syrie et le sommet" (de la Ligue arabe, prévu en mars à Damas). L'Arabie saoudite et l'Egypte agiteraient en effet la menace de boycotter ce sommet en terre syrienne si d'ici là le Liban n'a pas élu son président. "L'Amérique réitère l'aventure de 1982", titrait pour sa part le quotidien "Al-Akhbar". L'arrivée de la flotille américaine rappelle en effet les années sanglantes de l'implication des Etats-Unis au Liban, dans la décennie 80. En 1983, au plus fort de la présence américaine, une flotte de 17 navires patrouillait les côtes libanaises, dont deux porte-avions, alors qu'un contingent de Marines étaient déployé à l'aéroport de Beyrouth. En octobre 1983, un attentat-suicide détruisit la base des Marines, faisant 241 morts, un autre détruisant un bâtiment de l'ambassade américaine.