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Chacun « se fripe » comme il peut
REPORTAGE
Publié dans Le Temps le 29 - 12 - 2008

En cette période de fin d'année, les dépenses s'accélèrent, elles passent à la vitesse de croisière, les désirs se multiplient et s'aiguisent et les achats se diversifient et se précisent, à chaque événement ses exigences et ses caprices. Ils sont ciblés, conditionnés par cette ambiance de fête : il y a le voyage, le séjour à l'hôtel, le dîner gala, les cadeaux pour les fortunés bien évidemment,
pour ceux qui le sont moins ou pas du tout, il y a le poulet et la pièce de gâteau à domicile, ce sont des pratiques cérémonielles auxquelles plus personne n'échappe. Tout le monde est satisfait que ce soit dans ces fêtes ou dans les autres qui meublent l'année et qui font de nous de grands dépensiers. Cependant, pour pouvoir prendre part à toutes ces fêtes, jouir des grandes veillées ramadanesques et célébrer les Aïds, il est impératif de se mettre au régime, d'observer la frugalité au cours des périodes intermédiaires.
Cette ascèse reste insuffisante tant qu'elle n'est pas doublée d'une autre condition : en plus de la nourriture, ces dépenses parcimonieuses doivent s'appliquer également aux vêtements, il faut se contenter du linge usagé ou user d'autres procédés. Mais ces fripes sont-elles bon marché ? Nous permettent-elles vraiment de faire des économies ?

Les fripes de luxe, l'antithèse
Quand on parle des vêtements d'occasion, on doit distinguer entre fripes et fripes de luxe, l'amalgame n'est pas permis, car c'est une question de qualité et donc de prix. S'il est toujours possible de « remuer » les premières en s'agenouillant, il n'en est pas de même pour les secondes, on vous les offre dans des cintres, elles sont si bien rangées et si bien présentées que parfois on a l'impression d'être dans une boutique du prêt à porter. En fait, ce n'est pas seulement l'organisation des lieux qui vous donne cette impression mais c'est aussi et surtout les prix, ils sont presque les mêmes que ceux que vous trouvez dans cette dernière. Les hommes et femmes de métier justifient ces prix exorbitants par le prix d'achat élevé et la qualité. Aïcha, une vieille fripière, propriétaire d'une fripe de luxe, nous confia que « le prix d'une balle varie entre 100 et 700 dinars et peut même atteindre les 1000 dinars, donc si j'achète cher, je dois vendre cher, sinon je serais déficitaire, de plus, cette cherté dont vous parlez est toute relative, car ici vous payez la qualité, on vend de grandes marques que vous ne trouvez pas dans la plupart des boutiques du prêt à porter, et les quelques unes qu'ils en ont les vendent très chèrement comme vous le savez, alors si vous voulez nous comparer c'est avec ces dernières que vous devez le faire et non pas avec les premières ». Du côté des clients, on a une autre explication. « C'est de l'arnaque ce que font ces marchands, s'exclama Zeineb, ils donnent un coup de repassage à des articles qu'ils ramassent parterre et qu'ils trient très minutieusement, les mettent dans des cintres et vous les vendent très cher, et il y a un autre procédé malhonnête dont ils usent, ils enlèvent les étiquettes des grandes marques des vêtements déchirés et les collent sur d'autres qu'ils vous présentent comme étant des fripes de luxe, moi, je ne fréquente jamais ces endroits ». Sihem est du même avis. « J'ai ajouté à la liste des fripes de luxe celle de Hafsia depuis qu'on y a instauré une nouvelle pratique consistant à doubler les prix chaque fin de mois, ils font comme les autres marchands les jours des fêtes. Moi, j'achète mes vêtements dans les souks hebdomadaires, c'est beaucoup moins cher, ce manteau que je porte je l'ai acheté à 2 dinars de celui de l'Ariana ».

La loi des intermédiaires
Pour plus d'éclaircissements, on s'est tourné encore une fois du côté des fripiers, et là on a rencontré Boubaker, un vieux routier, propriétaire d'une friperie de luxe. « Avant, jusqu'aux années quatre vingt, la friperie était bien organisée, c'est pourquoi les prix étaient plus abordables, nous affirma-t-il. Pour exercer ce métier, il fallait disposer du bon d'achat qui était livré par le ministère du Commerce, on était 360 fripiers à Tunis. Notre unique fournisseur était la SOTAP qui se trouvait à Sousse, les 60% de la marchandise destinée à la capitale était répartie équitablement par le conseil d'administration de la société sur tous les marchands, l'opération était supervisée par le ministère, chacun de nous recevait en moyenne entre vingt cinq et trente balles, dont quinze ou vingt « super » et le reste « deuxième ». Les problèmes ont commencé avec l'apparition d'une nouvelle catégorie de commerçants dans ce domaine, ajouta le fripier, ce sont les grossistes, ils disposent du permis d'achat qui a supplanté le bon d'achat, cette nouvelle autorisation est livrée par le gouvernorat et non plus par le ministère du Commerce. Ces grossistes sont des intermédiaires entre nous et les sociétés qui sont devenues nombreuses, il y en a dans tous les gouvernorats. Ce sont eux les responsables de cette flambée des prix, les bons articles ils les vendent au détail et ils nous laissent les déchets que nous achetons au prix du luxe. Moi personnellement, ça fait longtemps que j'ai rompu avec eux, toute cette marchandise que vous voyez je l'ai achetée chez les détaillants dans les souks, nous confia-t-il ». Ces confidences ne corroborent-elles pas les accusations de notre première interlocutrice Zeineb ? Il existe une autre raison invoquée par certains consommateurs et confirmée par certains marchands, il est question de la concurrence des gens aisés. « Ces « bourgeois » ont enflammé les prix, laissa partir Hatem, ils achètent quel que soit le prix et ne négocient jamais, puisqu'ils ont les moyens, à cause d'eux, les gens modestes n'ont plus de place dans les fripes, il y en quelques unes comme celle de Ibn Khaldoun, par exemple, que vous ne pouvez pas approcher tellement elles sont chères. Il doit avoir raison pour cette dernière, sa proximité des quartiers chics d' « el manezehs » et d' « el manarettes » ne peuvent qu'entériner ses dires. Un fripier, Moncef, auquel nous avons demandé l'avis sur cette question nous a confirmé la fréquentation des fripes par les gens aisés. « Oui, ils sont nombreux parmi mes clients, et sincèrement je les préfère aux autres qui m'agacent avec leur marchandage, eux, ils payent le prix demandé et me laissent du pourboire, d'ailleurs chaque fois que je trouve un bon article je le leur laisse de côté ».

Les vendeurs de luxe
Certains de nos concitoyens préfèrent la boutique du prêt à porter aux fripes, non pas parce qu'ils sont fortunés, mais pour d'autres raisons. Ces gens-là se « déshabillent » pour pouvoir manger ou s'affament pour pouvoir s'habiller. Les premiers sont les employés de certaines sociétés qui vendent leurs bons d'achat contre une somme d'argent. Adel, un receveur dans une grande société de transport nous dit sans gêne que « ces bons je les vends à dix ou vingt dinars de moins que leur valeur, ça dépend du montant, je donne à l'administration la taille ou la pointure de l'acheteur au lieu des miennes, c'est comme ça que je peux subvenir aux besoins de ma famille, pour les vêtements, je m'en achète aux fripes ». Nous avons rencontré même quelques uns qui travaillent dans des hangars qui vendent leurs chaussures robustes conçues pour leur protéger les pieds contre d'éventuels accidents, ils s'exposent au danger contre de l'argent. Tout le monde trouve son compte dans ces transactions, l'acheteur qui s'octroie l'uniforme et les chaussures de la société à bon marché et l'employé de celle-ci qui trouve quoi se mettre sous la dent. Les autres concernés par ces pratiques sont les fonctionnaires qui vendent leurs tickets restaurant pour s'acheter des vêtements. Farhat, un commerçant, nous confia que « les prix de ces tickets varient entre 3.500 dinars et 4000 dinars, je les vends au restaurateur au même prix, et on est tous les deux gagnants, moi, ça me permet d'écouler ma marchandise, et lui, il gagne le prix du repas qu'il n'a pas servi et les frais du service et de la plonge ainsi que l'eau à utiliser ». Lotfi nous révéla qu' « à midi, je me contente d'un sandwich, les tickets je ne les utilise jamais, je les épargne, c'est comme ça que je peux faire des économies et me permettre d'acheter des habits à moi et à ma famille ».
Quelle philosophie et quelle sagesse! On se vide le ventre pour se couvrir le corps et le parer, et on enveloppe ce dernier dans des haillons pour remplir le premier, c'est la logique des temps modernes où l'apparence l'emporte sur l'essence et où la cherté de la vie impose aux gens des attitudes saugrenues. Avant la découverte de ces pratiques, on croyait que les boutiques du prêt à porter ont pu tenir tête aux fripes en dépit de leurs prix excessifs seulement grâce à la vente à crédit et aux soldes. Donc, sans ces procédés très originaux, elles fermeraient et celles-ci prendraient leur place et seraient, dans ce cas, toutes de luxe.


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