Pour les élèves, rien ne compte plus que les notes ces tous derniers jours de l'année scolaire. Qu'ils soient bons, moyens, médiocres ou cancres, les élèves, tous niveaux confondus, s'intéressent plus aux résultats de fin d'année qu'aux examens qu'ils vont bientôt passer (bac, brevet ou examen trimestriel) ; c'est qu'ils sont frappés par la hantise de l'échec, n'ayant pas très souvent confiance aux systèmes d'évaluation et de notation. C'est pour se prémunir contre de mauvaises surprises que pas mal d'élèves se tournent vers leurs profs respectifs dans le but de grignoter quelques points en sus leur permettant de surmonter leurs difficultés ou leurs faiblesses dans l'une ou l'autre discipline. Un spectacle devenu ordinaire en chaque fin d'année scolaire, surtout à la veille des examens : des parents d'élèves rassemblés devant l'administration ou devant la salle des profs venus rencontrer les enseignants de leurs enfants en vue d'une amélioration ou un ajustement d'une note jugée insuffisante ou désastreuse. On voit même des mères en pleurs en train de supplier le(s)prof(s) de leur enfant qui semble pourtant insouciant et peu attentif, ayant passé l'année entre dissipation et distraction. N. A., professeur de technologie, ne cache pas sa compassion pour ces parents qui viennent lui demander d'«aider» leur enfant : « Vraiment, je les plains, ces pauvres parents qui s'absentent toute l'année, qui n'ont aucune idée sur la scolarité de leurs enfants et qui ne se rendent compte qu'en fin d'année du cas catastrophique de leurs rejetons ; alors qu'ils auraient dû les suivre dans leurs études dès le début de l'année ! » Cette pratique se généralise et elle n'est pas l'apanage seulement des parents dont les enfants sont en difficulté, mais elle gagne ceux des bons élèves qui sont pourtant hors du danger. S.A., professeur de français dans un collège, nous a confié à ce propos : « Ce qui est paradoxal, c'est que cette pratique est devenue une manie chez presque tous les parents même ceux dont les enfants sont d'excellents élèves : ils viennent pourtant vous harceler pour un demi ou un quart de point afin d'arrondir telle ou telle note. Il parait que, pour certains parents, il n'y a pas de différence entre 19,50/20 et 19,25/20, comme si la note attribuée par le prof était arbitraire ou n'était pas basée sur un barème de notation bien déterminé ! » A part les parents, les notes scolaires sont toujours un point de litige entre profs et élèves : c'est une surenchère qui s'installe le jour de la remise des notes des devoirs de contrôle ou de synthèse. C'est à qui obtiendrait une note meilleure que celle de son camarade ! Au lieu de se pencher sur les fautes qu'il a commises dans sa copie pour les éviter une autre fois, l'élève s'occupe à comparer sa note à celles des autres, car pour lui seule la note est essentielle ; ce qui attire souvent la jalousie, la rancœur et la colère parmi les élèves. T.T, professeur de maths : « Pratiquement, aucun élève n'est satisfait de sa note, le bon comme le mauvais. La banalisation des 20/20 obtenus facilement dans plusieurs matières a fait que ni les élèves ni les parents ne se contentent des notes dites satisfaisantes. Tout le monde tend vers l'excellence ; c'est légitime, mais encore faut-il que l'élève mérite vraiment ce 20/20. D'autre part, certains élèves, harcelés par leurs parents qui sont parfois trop exigeants, recourent aux fraudes pour satisfaire leurs parents. Pour la plupart des élèves, la formation est relégué au second plan, c'est plutôt la note qui compte le plus ! » En effet, la note scolaire, devenu la force motrice qui pousse l'élève à travailler, est actuellement le seul critère employé pour distinguer l'élève appliqué et sérieux de l'élève dissipé et paresseux. Or, selon certains responsables en éducation et en pédagogie, les vrais critères sont en dehors de la note obtenue par l'élève, d'autant plus que la majorité des élèves peuvent aujourd'hui passer d'une classe à une autre supérieure sans fournir de gros efforts en comptant sur les cours particuliers et la générosité trop excessive de certains enseignants ! On assiste actuellement à une « boulimie » de bonnes notes octroyées, souvent à tort et à travers, apparemment due à des critères d'évaluation subjectifs et trop cléments. L'évaluation est l'une des questions majeures qu'il faut mettre en question lors de toute réforme de notre système éducatif.