Le Temps-Agences - La campagne pour la présidentielle en Iran s'est achevée hier après trois semaines d'échanges acerbes entre les quatre candidats, ponctués de manifestations massives de leurs sympathisants, à un niveau jamais vu dans la République islamique. L'élection aujourd'hui devrait mettre aux prises principalement le président ultraconservateur sortant Mahmoud Ahmadinejad, 52 ans, et Mir Hossein Moussavi, un modéré de 67 ans sorti d'une retraite politique de 20 ans. Quarante-six millions d'Iraniens sont appelés aux urnes. Les bureaux de vote ouvriront à 08H00 (04H30 HT) et pourront rester ouverts jusqu'à minuit, en fonction de la participation qui, selon le chef de la commission électorale Kamran Daneshjoo, devrait être "record". Les résultats officiels sont attendus dans les 24 heures suivant la clôture du scrutin. Un second tour se tiendra le 19 juin si aucun des candidats n'obtient 50% plus une voix. La campagne a reflété les profondes divergences existant en Iran après quatre ans de mandat Ahmadinejad, dont la rhétorique dure sur la crise du nucléaire et contre Israël a davantage isolé Téhéran de l'Occident alors que ses politiques économiques expansionnistes lui ont valu des critiques internes. Les analystes hésitent à choisir un vainqueur, mais suggèrent qu'il faudra un second tour pour le connaître. Les tensions ont atteint des sommets durant la campagne, les candidats échangeant insultes et accusations de mensonges et de corruption, et une rancoeur sans précédent s'est étalée à la télévision. Les partisans de MM. Ahmadinejad et Moussavi principalement, ainsi que ceux de leurs rivaux Mehdi Karoubi (réformateur) et Mohsen Rezaï (conservateur) ont manifesté en masse dans les rues dans une ambiance de carnaval. A la tombée de la nuit, les jeunes et les familles accompagnées de leurs enfants circulaient en voitures ornées de photos ou d'autocollants de leurs candidats, couleur verte pour Moussavi et drapeaux iraniens pour Ahmadinejad. L'électorat de M. Ahmadinejad est rural et conservateur, alors que les jeunes des grandes villes appuient l'ex-Premier ministre Moussavi. Ce dernier a promis d'améliorer les relations avec l'étranger, même s'il aura peu d'influence sur la politique nucléaire, l'ensemble des décisions stratégiques revenant au guide suprême, Ali Khamenei. Lors des débats télévisés, M. Moussavi a soutenu que la politique étrangère de son rival avait "nuit à la dignité de l'Iran", et avec ses autres concurrents, l'a accusé de "mal gérer" l'économie. Mais le président sortant, cherchant à défendre son image d'homme du peuple, a en retour accusé ses rivaux de malhonnêteté et de recevoir des "avantages financiers". Il a aussi accusé l'épouse de M. Moussavi, Zahra Rahnavard, d'avoir obtenu illégalement son doctorat de sciences politiques. Le puissant corps des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique du régime, a même accusé les partisans de M. Moussavi de chercher à lancer une "révolution de velours" semblable à celle qui s'était soldée par la chute du communisme en Tchécoslovaquie à la fin des années 1980. "Une tel scénario ne l'emportera jamais en Iran en raison de la structure politique de notre régime islamiste. Je crois que grâce à la vigilance du peuple, toute action vers une révolution de velours sera tuée dans l'oeuf", a prévenu leur commandant, Yadollah Javani. Les critiques de M. Ahmadinejad ont poussé l'ex-président Akbar Hachémi Rafsandjani, battu en 2005 et partisan de M. Moussavi, à protester auprès de l'ayatollah Khamenei et à le mettre en garde contre de possibles troubles. En cas de défaite, M. Ahmadinejad serait le premier président sortant à ne pas être réélu.