Le Temps-Agences- L'armée syrienne a déployé hier des chars aux entrées d'une nouvelle ville du gouvernorat d'Idleb (Nord-ouest) où elle mène une vaste opération pour réprimer les protestataires, le pouvoir restant sourd aux appels internationaux demandant des enquêtes indépendantes. «Des dizaines de chars, de blindés, des transports de troupes et des camions militaires ont été déployés aux entrées de Khan Cheikhoun, et les soldats ont commencé à entrer» dans cette ville proche de Hama (Nord), a précisé hier le chef de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme Rami Abdel Rahmane, basé à Londres. Trois mois après son lancement et en dépit de la répression, le mouvement de contestation ne fléchit pas, et les militants pro-démocratie ont appelé à de nouvelles manifestations aujouird'hui même, pour une nouvelle journée de mobilisation contre le régime du parti unique Baas qui sera dédiée à Saleh Al-Ali, un héros de la révolte contre le mandat français. Et des manifestations nocturnes anti-régime continuent d'avoir lieu à travers le pays, notamment dans la périphérie de la capitale, et à Hama, 210 km au Nord de Damas, où des dizaines de milliers de personnes ont défilé la nuit dernière. Dans le gouvernorat d'Idleb, où l'armée a envoyé de nouveaux renforts, les habitants de Khan Cheikhoun, sur la route Alep-Hama, «ont commencé à fuir vers la vallée Al-Ghab, par l'entrée ouest qui n'est pas bloquée par l'armée», explique M. Abdel Rahmane, précisant que l'armée a coupé la route Alep-Damas érigeant des barricades. Les restrictions imposées aux médias, aux enquêteurs de l'ONU et aux organisations humanitaires empêchent toute vérification indépendante. La répression a coûté la vie à 1.200 personnes et entraîné l'arrestation de quelque 10.000 autres, selon des ONG et l'ONU. Plus de 8.500 Syriens ont par ailleurs trouvé asile en Turquie et 5.000 autres au Liban. Assistance humanitaire de la Turquie Pour sa part la Turquie a décidé de fournir une assistance humanitaire aux milliers de Syriens massés du côté syrien de la frontière entre la Turquie et la Syrie, a déclaré hier le chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu, appelant de nouveau le régime syrien à faire des réformes. «Il y a actuellement plus de 10.000 personnes juste en face de notre frontière, derrière les barbelés (...) Nous avons décidé de venir en aide à nos frères syriens pour subvenir à leurs besoins urgent en alimentation», a-t-il dit à la presse à Ankara. «Une assistance humanitaire leur sera fournie», a-t-il précisé, au lendemain de sa visite dans les camps de réfugiés syriens installés par le Croissant rouge turc dans la province de Hatay (sud). «J'ai clairement vu la peur dans les yeux des gens que j'ai rencontrés (dans les camps). Il faut comprendre la situation d'une femme de 70 ans qui quitte toute seule sa maison pour fuir les violences», a souligné M. Davutoglu. Le ministre, qui s'exprimait lors d'une réunion des ambassadeurs turcs postés dans les pays arabes et dans d'autres capitales convoqués à Ankara pour évoquer notamment la crise syrienne, a de nouveau exhorté le régime de Damas à mettre «d'urgence des réformes en œuvre» pour endiguer la violence dans le pays et l'afflux de réfugiés vers la Turquie. M. Davutoglu a rencontré hier Hassan Turkmani, l'émissaire spécial du président syrien, reçu mercredi par le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, a rapporté l'agence de presse Anatolie. «J'ai expliqué à M. Turkmani que nous voulons la prospérité, la démocratie et les droits de l'Homme aussi bien pour la Turquie que la Syrie. Nous considérons que la stabilité de la Syrie est très importante», a noté M. Davutoglu, cité par l'agence. L'émissaire syrien a affirmé que le régime syrien était déterminé à aller de l'avant «à tout prix» avec les réformes promises, a dit le ministre qui a ajouté que son ministère travaillait sur un calendrier d'une tournée régionale au Moyen-Orient de M. Erdogan. La presse turque a affirmé que la Turquie envisagerait, en cas de guerre civile en Syrie, de créer une zone tampon militarisée en territoire syrien, une information qui n'a pas été confirmée par le ministère des Affaires étrangères.