Prise au dépourvu, la confrérie appelle « à ne pas mettre tous les islamistes dans le même panier Le Temps-Agences- Les islamistes d'Egypte, dopés par une victoire écrasante au premier tour des législatives, étaient engagés hier dans la bataille du second tour contre les libéraux, mais aussi au sein de leur propre camp, avec un duel entre les Frères musulmans et les nouveaux venus salafistes. Si l'ensemble des mouvements islamistes ont été crédités officiellement de 65% des voix, l'influente confrérie des Frères musulmans (36,6%) tente de se démarquer des fondamentalistes qui ont créé la véritable surprise du premier tour en raflant 24,3%. Hier et aujourd'hui, les deux mouvements vont se battre pour une vingtaine de sièges dans un tiers des gouvernorats d'Egypte concerné par ce second tour, dont les deux plus grandes villes du pays, le Caire et Alexandrie. L'affluence était encore faible à l'ouverture des bureaux de vote, après un premier tour marqué par une participation sans précédent (62%) dans l'histoire de l'Egypte, un pays dirigé d'une main de fer pendant 30 ans par le président Hosni Moubarak, chassé en février par une révolte populaire. A Alexandrie (Nord), un duel particulièrement serré est prévu entre les Frères musulmans et les salafistes. Cette ville côtière a vu naître le parti salafiste Al-Nour, peu après la chute de M. Moubarak, mais la confrérie y est également implantée depuis longtemps. «Cela ne fait que dix mois qu'on est là et on est déjà en deuxième position», s'est félicité Jihane, une mère de quatre enfants qui porte le niqab (voile intégral ne laissant dépasser que les yeux), devant un bureau de vote dans le quartier Al-Montazah, sur le front de mer à Alexandrie. Les législatives égyptiennes sont organisées sur trois zones géographiques qui se prononcent l'une après l'autre. L'élection des députés se déroule jusqu'en janvier, puis viendra celle des sénateurs jusqu'en mars. Près de 50 millions d'électeurs sur 82 millions d'Egyptiens sont appelés à voter pour élire 498 membres de l'Assemblée du peuple (chambre des députés), tandis que 10 autres seront nommés par le chef de l'armée et chef d'Etat de fait, le maréchal Hussein Tantaoui. Un tiers des sièges de l'Assemblée du peuple seront pourvus via un scrutin uninominal à deux Tours, les deux tiers restants étant attribués à des listes élues à la proportionnelle. Dans cette première étape du scrutin, les libéraux, qui apparaissent comme les grands perdants vont tenter de compenser leurs pertes, en particulier au Caire. Le Bloc égyptien, principale coalition libérale, a ainsi obtenu 13,3% au premier tour. L'ensemble des libéraux, répartis sur six listes, atteignent 29,3%, mais ils restent toutefois trop divisés pour représenter un groupe homogène face au raz-de-marée islamiste. Dans le quartier huppé de Zamalek au Caire, les espoirs reposent sur le candidat libéral Mohamed Abou Hammad, qui fait face à un candidat des Frères musulmans. La percée des salafistes, plus intransigeants que les Frères musulmans --qui se présentent comme «modérés»-- a pris la confrérie au dépourvu et semé la crainte dans les milieux laïques et coptes (chrétiens d'Egypte). Aussi le porte-parole des Frères musulmans Mahmoud Ghozlane a-t-il appelé «à ne pas mettre tous les islamistes dans le même panier», en référence à Al-Nour. Les salafistes se différencient physiquement des Frères musulmans par leur longue barbe et leurs costumes traditionnels et la majorité des femmes portent le niqab, répandu en Arabie saoudite. Forts de leur succès, ils ont multiplié les déclarations en faveur d'un Islam rigoriste, similaire à celui en vigueur dans le royaume wahhabite.