... Mais il n'y a pas de quoi casser trois pattes à un canard Un groupe se réclamant des cyber-militants d'Anonymous a publié dimanche quelque 2.725 e-mails échangés entre les principaux responsables du parti islamiste Ennahdha, dont ceux du Premier ministre Hamadi Jebali. Dans une vidéo postée sur Internet, ce groupe explique avoir piraté les boîtes mails de ces dirigeants islamistes en signe de protestation contre ce qui se passe ces dernières semaines en Tunisie. « Nous avons décidé de publier les documents confidentiels d'Ennahdha comprenant les adresses mail personnelles, les numéros de téléphone et transactions bancaires. Ce piratage est motivé par plusieurs incidents récents, notamment la dispersion violente d'une manifestation de diplômés chômeurs samedi à Tunis, qui a fait plusieurs blessés », déclare un homme arborant le masque des Anonymous sur cette vidéo. Et d'ajouter : « Gouvernement tunisien, nous avons gardé secrète une très grande partie de vos données. Si vous ne voulez pas les voir publiées, nous vous demandons d'éviter la censure sur Internet, respecter les droits de l'homme, et respecter la liberté d'expression en Tunisie». En réaction à la publication de ces e-mails, Néjib Gharbi, un porte-parole d'Ennahda, a dénoncé cet acte tout en remettant en question l'authenticité des données publiées par les Anonymous. « Quelques uns des mails sont véritables, mais la plupart des données ont été truquées. Une plainte est à l'étude », a-t-il précisé. De son côté, Ameur Laârayedh, président du Bureau politique d'Ennahdha, a tenu à minimiser l'importance de la cyber-attaque contre les courriers électroniques des dirigeants du parti. « Nous n'acceptons pas le piratage, ce n'est pas un comportement correct ou civilisé. Quoiqu'il en soit, le Premier ministre Hamadi Jebali est une personnalité publique et n'a rien à cacher », a-t-il noté, sans confirmer ou infirmer l'authenticité des documents publiés. Ezzedine Kchok, président du Parti pirate tunisien, qui a été légalisé récemment, défend, quant à lui, les hackers. «C'est ça la vraie démocratie, tout doit être transparent », a-t-il notamment indiqué. Du déjà connu Le contenu des e-mails publiés n'est pas vraiment compromettant. L'écrasante majorité de ces courriers électroniques portent sur des sujets sans importance ou révèlent des informations qui sont loin d'être des scoops pour les Tunisiens. Quelques e-mails, dont l'authenticité reste à vérifier bien évidemment, laissent, cependant, croire qu'Ennahdha cherche à noyauter l'administration ou le tissu associatif. Ainsi, dans un e-mail le chef du gouvernement aurait demandé à ses « collaborateurs » de lui fournir la liste des associations dans chaque région , tout en leur demandant de préciser si le responsable de l'association est un membre actif d'Ennahdha, un sympathisant, un élément neutre….etc. Cela peut être expliqué comme une opération de mise à jour des adhérents d'Ennahdha et des associations gravitant autour du parti de Rached Ghannouchi. Dans un autre e-mail, on apprend qu'Ennahdha dispose d'une cellule de veille électronique chargée de rendre des rapports quotidiens sur les pages Facebook sympathisantes et dissidentes. Ces rapports appelés « les news de Facebook » (Akhbar Al Facebook en arabe) sont préparés par une cellule rattachée au Bureau chargé des relations avec la presse de Rached Ghannouchi. Les dirigeants d'Ennahdha peuvent préciser à ce sujet que la collecte d'informations sur les amis et les ennemis du parti sur Facebook est de bonne guerre. Autant dire que qu'il n'y a pas de quoi casser trois pattes à un canard. A noter que c'est la troisième fois qu'un groupe se réclamant d'Anonymous mène des attaques contre Ennahdha ou contre le gouvernement depuis les élections du 23 octobre dernier. Plusieurs pages Facebook de partis islamistes, dont Ennahdha et Hezb Ettahrir, avaient été piratées mi-mars, et quelques jours plus tard le site du ministère de la justice avait été à son tour attaqué.