On ne pouvait rêver de meilleur coup d'envoi pour le Mois de la Hollande en Tunisie : le cadre somptueux de l'Acropolium de Carthage, un public fervent et connaisseur, une diva à la voix cristalline et un répertoire d'un éclecticisme surprenant. Le concert lyrique auquel nous conviait l'Ambassade des Pays-Bas à Tunis aura ainsi tenu toutes ses promesses. Accompagnée au piano par Dearhbla Collins, la soprano Judith Mok a bel et bien été convaincante, délicate et aérienne. Connue pour être l'une des meilleures interprètes vocales aux Pays-Bas, Judith Mok a conquis ces dernières années de nouveaux publics en se tournant vers la scène rock. Egalement poète, elle publie ses œuvres en néerlandais et en anglais tout en sillonnant le monde avec son répertoire de soprano. Dès les premières mesures, le public de l'Acropolium a été littéralement conquis. La forte présence scénique de Judith Mok, le soutien efficace et jubilatoire du piano de Dearhbla Collins et le génie des lieux se sont alors conjugués pour déboucher sur un récital exceptionnel. Sobriété et puissance ont caractérisé la performance de Judith Mok. Pourtant, les nombreux versants du répertoire semblaient ardus avec au programme des pièces aux quatre vents. Ouvrant le récital avec Scarlati, Pergolesi et Giordani, la cantatrice a ébloui grâce aux inflexions de sa voix et la pureté de son chant. Quatre œuvres de Mozart et des arias assez rarement interprétés de Maurice Ravel ont apporté un contrepoint idéal au lyrisme des premières pièces. L'artiste continuera ensuite à brasser les traditions en passant de Wolf à Brahms et Schubert, en rendant hommage à Manuel de Falla et Garcia Lorca, en saluant enfin le modernisme de Francis Poulenc. Pendant ce temps, l'énergie du piano de l'Irlandaise Dearhbla Collins faisait des merveilles. A la fois précise et espiègle, la pianiste faisait corps avec la voix de la cantatrice, maitrisait le tempo et multipliait les variations. A un seul moment, le piano se tut lorsque Judith Mok attaqua a capella des « Cantigas » du musicien néerlandais Henk van der Meulen. Cette séquence fut simplement prodigieuse avec une voix nue et pure qui sut atteindre les sommets. Mercredi dernier à l'Acropolium, les muses étaient comme pétrifiées par tant de grâce. Et le public, chaleureux à souhait, sut le communiquer aux artistes pour une fin de concert mémorable, placée sous le signe de la tulipe et du jasmin. Rappelons que le récital a été précédé par l'inauguration d'une importante exposition consacrée aux bicyclettes de Hollande. Intitulé « Bike Expo », cet événement qui se poursuivra jusqu'au 18 mai est une première en Tunisie.