Un mauvais policier, dans le sens où cette surenchère dans la bêtise, n'impressionne personne. En tout cas pas ceux que l'on cherche à intimider. Et qui n'ont pas fait allégeance en des temps, qui n'étaient pas tendres non plus, ni joué avec la liberté de s'exprimer. C'est dire que ceux qui ont eu la lâche outrecuidance de s'attaquer à la chaîne «El Hiwar Ettounsi», entre chien et loup, en bousillant une partie du matériel, et en en emportant une autre, et pas des moindres, pour paralyser la chaîne de télévision, et empêcher les journalistes de faire leur travail, auront tout au plus réussi à agacer. Parce que justement le maître de céans, ainsi que les journalistes, ne comptent pas baisser les bras, et encore moins se laisser intimider. Ils étaient d'ailleurs là, tous en place, ainsi que l'équipe des techniciens, accourus de toutes parts en ce dimanche du 27 mai, pour évaluer les dégâts, et… se remettre à travailler. Car, au bout du compte, la chaîne « El Hiwar Ettounsi » ne s'arrêtera pas d'émettre, et le choc, aussi rude soit-il, n'aura aucune incidence sur toute une équipe, qui en a vu d'autres et qui ne connaît qu'un seul maître-mot : persévérance.
Est-il approprié de parler de choc ? En vérité, même dans le contexte actuel des choses où les médias semblent être dans la ligne de mire de tous les ennemis de la liberté, aucun journaliste ne se dirige vers son travail, la peur au ventre, appréhendant de trouver une grenade dégoupillée à proximité de son poste de travail. C'est évidemment dans cet état d'esprit qu'ont toujours travaillé les journalistes d'El Hiwar… Du coup, certaines menaces qui fleurissent parfois, comme des champignons, via le net, sur la page Facebook de la chaîne, s'ils donnent parfois à réfléchir, n'influent en rien sur le cours normal des choses puisque ladite chaîne continue à tourner manège, en toute quiétude, comme cela va de soi, remisant menaces et insultes au seul endroit où elles doivent aboutir, c'est-à-dire dans le caniveau. Il semble cependant au vu de ce qui s'est passé, qu'il fallait prendre au mot, -d'une certaine manière-, le dernier message laissé sur la page, daté du samedi à 10h. 18mn, et promettant en substance, tous les feux de l'enfer à une chaîne « mécréante », et aux « enfants de Staline » qui y opèrent. Signé par un dénommé « Ahmed Ben Mohamed », qui n'existe pas sous cette identité-là, est-il besoin de le souligner, il affiche, en guise de profil, et, à première vue, un collier. Mais il suffit d'agrandir l'image pour se rendre compte qu'en fait de collier, il s'agit d'un entrelacs d'armes à feu (deux kalachnikovs et autres…), qui forment le dessin d'un cœur. Le lendemain, à l'aube, vraisemblablement entre cinq heures et six heures du matin, selon la seule caméra de surveillance, ayant d'abord échappé à la vigilance des intrus, avant d'être cassé à son tour, les locaux d'El Hiwar Ettounsi sont cambriolés. Un disque dur, le mélangeur (mixage et montage), des pc, ainsi que des caméras ont disparu. Un rapt ciblé pour ainsi dire puisque les « voleurs », ont privilégié tout ce qui pouvait être de nature, à entraver, sérieusement, la marche du travail. Il ne peut donc s'agir que de professionnels, qui savent exactement ce qu'ils doivent emporter, et connaissent la nature du travail télévisuel. Autre détail qui a peut-être son importance : les pc qui n'ont pas été emportés, ont été affublés d'un signe, ou plutôt de deux signes, - un A, pour les postes des journalistes, et un X, pour ceux des techniciens. Ou bien il y aurait une autre explication plus terre-à-terre : deux personnes, distinctes, ont raturé les postes, chacun d'eux le faisant à sa manière, du coup, cela a donné un signe qui s'apparente fortement à un X pour les uns, et un autre signe, qui s'apparente à un A pour les autres. A total, dans tous les cas de figure, il y a eu 8 A et 8 X. Faites vos comptes pour le nombre d'ordinateurs volés. Et pour les signes, vous aurez beau jeu de chercher, du côté de la « franc-maçonnerie », ou autres, ce n'est pas cela qui est le plus important. Ces pratiques, qui commencent à nous devenir familières, tout comme la menace via le net, sont celles d'une frange extrémiste, qui voit d'un très mauvais œil, toute velléité de liberté, et s'arrangerait bien de l'étouffer dans l'œuf. Salafistes par-ci, Salafistes par-là, mais la vraie question est : à qui profite le crime ? Car, toutes ces opérations-là, ne sont pas menées au petit bonheur la chance, puisqu'elles échappent toujours, comme par miracle, à la vigilance de ceux qui sont censés veiller à la sécurité du pays. Qui sont-ils en réalité ? Et à la solde de qui sont-ils en train d'opérer ? Autre chose : dans la mesure où le gouvernement –provisoire- se mouille rarement à condamner pareils actes, avec la fermeté nécessaire, il est, autrement légitime, de se demander s'il n'est pas dans son intérêt qu'il y ait, de temps en temps, par-ci, par-là, quelques petites « plaisanteries » de mauvais alois, de nature à terroriser la « populace », en faisant office d'œillères, histoire que les regards se détournent de l'essentiel. Et l'essentiel est en train de se jouer entre ciel et terre…
Pour ce qui est de la chaîne « El Hiwar Ettounsi », et des médias d'une façon générale (sauf ceux qui ont prêté allégeance), ils ne sont pas prêts à baisser les bras. « Nous n'abdiquerons pas… », précisera Aymen Rezgui, l'air, tout à fait serein, et pas du tout terrorisé… !