D'un coup le peuple de la rue et des ruralités se découvre helléniste sans le savoir à force d'entendre et de répéter dans tous les contextes le mot " technocrate ". Ce mot, introduit dans une intention magicienne par M. Jebali pour nous installer dans la catharsis artificielle suite à l'assassinat de Chokri Belaïd, a eu le mérite " philologique " de s'annoncer à l'oreille et à l'entendement de Monsieur Tout-le-monde par l'évocation de la " technique ", une notion et un vocable si familier qu'il devient presque de l'arabe dialectal tunisien et même classique quand on pense au mot " teqanî " entré subrepticement dans les lexiques de certains arabes littéraires. C'est alors que M. Rached Ghannouchi en profite pour faire preuve d'un populisme efficace peut-être mais combien méprisant pour le bon sens un tant soit peu cultivé. Un faux problème, a-t-il déclaré sur les ondes un jour où il était particulièrement inspiré, que ce dilemme d'une équipe é politique " opposée à une équipe " de technocrates ", " puisque MM. Abdellatif Mekki et Khélil Zaouia sont bien des politiques, mais en même temps technocrates, puisque tous deux médecins ! " Je sais, pour avoir côtoyé M. Ghannouchi dans notre métier commun, jadis, d'enseignants que le super-sage de la Nahdha sit tout sauf la langue d'Homère. Sinon il aurait su que " technè n'est que la première moitié de " technocrate " et que la seconde signifie " pouvoir ". Et que n'importe quel médecin ne saurait forcément chef politique. A moins que, à moins qu'il ne se nomme... Hippocrate ! Et encore ! Car ce nom d'un illustre médecin ne peut prétendre qu'à un pouvoir (kratos) sur les chevaux (hippoï)...