Le Temps-Agences- Les chefs tribaux sunnites de la province d'Al-Anbar, dans l'Ouest de l'Irak, ont juré hier de "venger" la mort de leur leader, Cheikh Abdoul Sattar Abou Risha, fidèle allié des Etats-Unis tué la veille dans un attentat attribué par le gouvernement à Al-Qaïda. "Nous accusons Al-Qaïda. Nous allons continuer notre combat et nous nous vengerons", a déclaré à Ramadi (ouest) Cheikh Ahmad Abou Richa, frère du cheikh assassiné. Il a été désigné par les chefs de tribus sunnites pour le remplacer à la tête du "Réveil d'Al-Anbar", coalition d'une quarantaine de tribus mobilisées pour lutter aux côtés des troupes américaines contre Al-Qaïda en Irak. Des milliers de personnes, dont trois ministres du gouvernement et des officiers supérieurs américains, ont assisté hier à Ramadi (100 km à l'ouest de Bagdad) aux funérailles de Cheikh Abdoul Sattar, salué comme un "héros national". Son cercueil, recouvert du drapeau irakien, a été porté sur une dizaine de kilomètres jusqu'au cimetière familial par ses partisans et les membres de son clan, les Abou Richa, aux cris de "Vengeance contre Al-Qaïda!". La cérémonie s'est terminée en fin de matinée. Cheikh Abdoul Sattar a été tué jeudi avec trois de ses gardes du corps dans l'explosion d'une bombe près de son domicile de Ramadi. Ce chef tribal respecté était le principal artisan des revers infligés depuis plusieurs mois à Al-Qaïda dans la région d'Al-Anbar et de la nouvelle stratégie d'alliance avec les anciens insurgés sunnites, présentée comme un "succès" par le commandement américain. Il était devenu un interlocuteur privilégié des responsables américains et avait serré la main du président George W. Bush lors de sa visite surprise dans la région d'Al-Anbar le 3 septembre. Cheikh Abdoul Sattar Abou Richa a été tué au premier jour du ramadan, un an après la création de sa coalition du "Réveil d'Al-Anbar", et quelques heures avant un discours du président américain sur l'Irak. Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a estimé que "ce crime portait la signature des terroristes d'Al-Qaïda" et a annoncé la création d'une commission d'enquête. Le Président Jalal Talabani a rendu un vibrant hommage au chef sunnite, qualifié de "figure historique". Le leader radical chiite Moqtada Sadr a également condamné l'assassinat du chef sunnite, "un homme qui a prouvé que le terrorisme peut être combattu (...) et la sécurité rétablie dans les régions les plus volatiles d'Irak". La mort de "l'apostat" Abdoul Sattar a été au contraire saluée sur des sites internet islamistes utilisés par Al-Qaïda, qui se sont réjouis "de la mort du chef des infidèles et des collaborateurs". Une formation sunnite irakienne, le Conseil du dialogue national, a accusé pour sa part le gouvernement, dominé par les chiites, d'être impliqué dans l'attentat. "Certains membres du gouvernement voyaient d'un mauvais oeil sa position privilégiée auprès des Américains et ses ambitions nationales grandissantes", a affirmé Cheikh Khalaf Al-Illayan, secrétaire général du Conseil du dialogue national. Les circonstances précises de l'attentat, qui n'a pas été revendiqué, n'ont pas encore été établies. Selon le colonel Tarek Al-Dulaïmi, chef de la sécurité d'Al-Anbar, Cheikh Abdoul Sattar a été tué par un kamikaze au volant d'une voiture piégée alors que son convoi avait été stoppé au bord d'une route près de son domicile. Selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Abdel Karim Khalaf, l'attaque a été menée à l'aide d'un engin piégé caché au bord de la route, suivi d'une voiture conduite par un kamikaze. M. Khalaf a refusé "d'accuser" qui que ce soit à ce stade, "mais il est difficile pour Al-Qaïda d'opérer dans cette zone", a-t-il noté.