C'est jeudi dernier qu'a commencé la grève des conducteurs des trains de la Compagnie des chemins de fer, d'abord sur la ligne de la banlieue sud, puis sur les grandes lignes de la République. Ce fut la surprise pour les usagers qui s'étaient trouvés subitement bloqués au beau milieu de la journée et sans aucun préavis. Des élèves qui étaient en plein examen, ou des travailleurs qui devaient se rendre à leur travail, étaient brusquement pris de court. Jeudi soir c'était la panique pour les voyageurs qui devaient rentrer chez eux, et qui s'étaient trouvés dans l'obligation, de recourir aux transports privés avec tous les inconvénients que cela représente, et les multiples enfreintes à la loi de ceux qui sont à l'affut pour réaliser des gains illicites sur le dos du citoyen. Vendredi, la situation s'était envenimée davantage, et à la gare centrale, place Barcelone, les usagers de la banlieue sud et des grandes lignes s'étaient amassés à la gare, dans l'espoir d'une reprise, surtout après avoir appris qu'un arrêté de réquisition a été publié le même jour, par le ministère du Transport, intimant l'ordre à tous les agents de la SNCF de rejoindre leurs postes de travail. La non-application de la décision de réquisition est en vertu du code du travail, passible de sanctions. La réquisition est en effet prévue par l'article 390 du code du travail et elle peut être décidée par le ministère du Transport en réponse à une grève anarchique et contraire à la loi. Les agents qui refusent de travailler, nonobstant une décision de réquisition, encourent un mois de prison et une amende de 10 à 500 dinars selon ledit article. En outre les agents concernés peuvent être réquisitionnés manu militari. C'est ce qui expliquait d'ailleurs la présence des forces de l'ordre à la gare centrale de Tunis. Mais, une majorité d'employés étaient résolus à poursuivre la grève malgré la décision de réquisition. Les usagers avaient en désespoir de cause déserté la gare, pour chercher d'autres moyens de transport. Ce n'était pas la joie dans les bus, où le nombre des usagers avait subitement doublé voir triplé. Ce qui n'arrangeait personne et augmentait les risques de vol et d'accidents. Car les bus surchargés constituent toujours une menace pour les usagers et pour la circulation d'une manière générale. Mohamed Saïdi, Secrétaire général de la Fédération des chemins de fer a déclaré que l'organisation ouvrière est contre la grève sauvage et illégale. Pour sa part, Noureddine Taboubi secrétaire général adjoint de l'UGTT, a précisé que la centrale syndicale a pris des mesures disciplinaires contre les agents qui persistent dans leur attitude en poursuivant une grève illégale. Le procureur de la République près le tribunal de première instance, a ordonné d'ailleurs l'ouverture d'une enquête judicaire sur la grève sauvage et sans préavis, observée par les agents qui persistent malgré une décision de réquisition prise par le gouvernement. Les deux jours qui ont suivi, soit les samedi et dimanche derniers, la gare a été pratiquement désertée par les usagers devant une paralysie annoncée du trafic ferroviaire dans son ensemble. Ce n'est qu'hier dans la matinée que le trafic a commencé à reprendre petit à petit, après la décision de reprise du travail, suite à la réunion d'une commission administrative des syndicats du chemin de fer. Une source informée à l'UGTT a déclaré au Temps, que la centrale syndicale a pris les choses en main, pour mettre fin à la crise, dans l'intérêt des usagers, sans pour autant négliger les droits des employés de la SNCFT. Certes la grève est un droit reconnu par la Constitution, mais qui doit s'exercer selon les conditions légalement requises. C'est la raison pour laquelle, la centrale syndicale, tout en condamnant la grève sauvage des employés , elle a adopté leur revendications concernant la prime calculée en fonction du salaire de base, ainsi que l'actualisation des primes, et ce en application des accords signés le 30 avril dernier entre le gouvernement et l'UGTT. Sur cette base une réunion de travail s'est tenue hier entre le syndicat de base et la direction générale de la SNCFT. D'ores et déjà un préavis de grève pour le 1er juin prochain a été adressé hier à qui de droit, et qui sera observée, dans le cas où les concertations n'aboutissent pas. Ce que personne ne souhaite en pareille conjoncture et dans l'intérêt d'une paix sociale durable.