A l'issue de l'audition des cinq prévenus dans l'affaire dite de la mosquée Lakhmi, avant-hier, le juge d'instruction a relaxé successivement le chef d'une agence bancaire, le trésorier Mohamed Bouzid et le trésorier adjoint de l'instance dirigeante de la mosquée, Ali Ben Amor. Il a fallu attendre jusqu'à 20h30 pour apprendre la libération de cheikh Ridha Jaouadi et 22h30 pour apprendre celle de l'ancien imam des cinq prières Ahmed Frikha. Pour rappel, les prévenus avaient été mis en garde à vue pour leur implication dans l'affaire de collecte de fonds, en violation des dispositions de l'article 95 du code de procédure pénale. Du point de vue juridique, ces relaxations ne signifient pas nécessairement la fin des poursuites judiciaires dans la mesure où la décision à prendre est du seul ressort du juge d'instruction saisi de l'affaire, et que la décision sera en fonction de l'aboutissement de l'enquête qui va suivre son cours. Ahmed Mâalej, président du comité de défense des détenus précise à ce propos que la décision du juge d'instruction s'explique par l'insuffisance de preuves comme par le fait que le chef de poursuites n'est pas de nature à constituer une quelconque menace ou un quelconque danger pour la société ou la paix sociale. D'autre part la défense fait savoir qu'elle a relevé deux vices de procédure sur la base desquels elle a demandé l'annulation des poursuites étant en contradiction nette avec l'article 29 de la Constitution, dans la mesure où la police judiciaire ne peut procéder à l'arrestation d'un suspect qu'en cas de flagrant délit, ce qui ne s'applique pas aux prévenus dans cette affaire. Sinon, elle doit se prévaloir d'un mandat d'arrestation écrit et non pas d'une instruction obtenue par téléphone, comme cela s'est passé pour ses clients. De plus, les dispositions de l'article 95 du code de procédure pénale ne s'appliquent pas, dans le cas d'espèce, étant donné que ses clients n'ont pas le statut de fonctionnaires relevant du ministère des Affaires religieuses. Et pour la suite de l'affaire ? - Le juge d'instruction va poursuivre son enquête, à charge, d'ailleurs, comme à décharge. Si cette enquête aboutit à des charges suffisantes sur certains chefs de poursuites, il rendra nécessairement une ordonnance de renvoi devant une juridiction pénale. Faute de quoi, il rendra une ordonnance de non-lieu, donc une ordonnance de clôture. Par quoi s'explique l'abandon des chefs de poursuite, à savoir la présomption de corruption financière et le détournement de fonds publics, au profit d'un autre chef nettement moins grave, en l'occurrence la collecte de fonds en violation de la loi sur les mosquées. Surtout que l'affaire Lakhmi avait eu un début tonitruant et pris une ampleur considérable à Sfax tant il était question au début de détention de cheikh portant des montants colossaux, de malversation et de brassage illicite de plusieurs centaines de milliers de dinars qui auraient profité à des notabilités religieuses et politiques, le tout corroboré par des arrestations assez spectaculaires et même par le prolongement de la période de détention pour certains prévenus ? Pour Me Ahmed Mâalej, il y avait une volonté délibérée de donner une ampleur démesurée à l'affaire, pour trainer dans la boue l'ex-imamat de la mosquée Lakhmi, pour la simple raison que l'on croyait, à tort d'ailleurs, qu'on allait tomber sur une gestion malsaine des fonds collectés à la mosquée. Mais en fin de compte les enquêteurs se sont rendu compte qu'il s'agit d'une gestion modèle, transparente et dans les normes et qu'elle ne comporte aucune faille, sachant que la comptabilité de la mosquée est confiée au plus grand cabinet d'expertise comptable à Sfax. La prière du vendredi annulée pour la troisième fois consécutive à la Mosquée Lakhmi en dépit d'un important déploiement sécuritaire, les partisans de l'imam limogé, Ridha Jaouadi, ont fait entrave - hier vendredi 30 octobre 2015 et pour la troisième semaine consécutive- à la prière du vendredi en empêchant le nouvel imam, désigné par le ministère des Affaires Religieuses, Mimoun Karray, de prononcer son prêche. Les opposants au nouvel imam ont scandé la profession de foi : « il n'y a de Dieu que Dieu et Mohamed est son prophète » pour l'en empêcher. Suite à cette perturbation de l'office de la prière, les nombreux fidèles, mécontents de ces incidents fâcheux, ont préféré soit accomplir la prière du Dhor, soit se diriger vers d'autres mosquées. Quelques centaines de partisans de Ridha Jaouadi ont tenu par la suite un rassemblement, à proximité de la mosquée, au cours duquel ils ont scandé des slogans de soutien à ce dernier et en ont proféré d'autres, hostiles au ministre des Affaires Religieuses.