Qu'est-ce qui pourrait encore faire plaisir aux Tunisiens ! Appelez cela « mal de vivre » aggravé par une Révolution qui a tourné à l'envers alors qu'on attendait d'elle des miracles au moindre effort, ou plus belle la métaphore de Jean Cocteau : « La difficulté d'être ». J'écoutais, il y a deux jours, à la Radio nationale, l'interview du ministre de l'Emploi, M. Zied Laâdhari, qui se faisait presque sermonner pour avoir invité M. Ban Ki-moon, secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, en personne (et excusez du peu), au débat sur l'emploi en présence de personnalités internationales de premier plan, dont le directeur général de l'Organisation internationale du travail (OIT). Il ne restait au pauvre jeune ministre dynamique et volontaire et qui fait de son mieux, qu'à « s'excuser de bien faire » comme le dirait Boileau en son temps. Mais, qu'est-ce qu'ils ont ces Tunisiens à croire et penser qu'on peut trouver de l'emploi pour six cent mille personnes dont plus de 200.000 diplômés chômeurs, en restant les bras croisés dans le meilleur des cas, ou au pire, occuper la rue, les usines et camper en face des ministères pour faire la pression constante au nom du droit au travail énoncé par la Constitution. Même Aladin et sa lampe magique n'y peuvent rien si on ne créé pas la richesse par l'investissement, la mise en œuvre des mégaprojets et surtout donner de l'espoir aux jeunes et les encourager à créer leurs propres entreprises aussi petites soient-elles. S'acharner du matin au soir à ne décrire que la grisaille sur les plateaux TV et à travers les ondes radiophoniques, c'est pousser les Tunisiens au pessimisme permanent, alors que le monde entier vit ce problème du sous-emploi, y compris dans les pays les plus prospères et les plus développés. Cette grogne permanente qui fait que l'on n'est jamais content ni heureux de ce qu'on a, a fait dire un jour au grand Jacques Chirac, président de la République Française à l'époque, à l'adresse de la jeunesse française des banlieues et à certains « casseurs » : « Etre français, aujourd'hui... n'est pas rien ! Vous êtes les citoyens de la 5ème puissance mondiale » (fin de citation). Etre « Tunisien », aujourd'hui, pour reprendre M. Chirac, n'est pas rien. Nous devons être fiers de l'appartenance à l'une des très rares démocraties réelles du monde arabe et musulman. Nous avons le plus beau pays de la terre au niveau du climat, d'ailleurs, ça fait aussi notre tendance à la paresse naturelle, et nous sommes baignés par plus de 1300 km de côtes, avec une mer bleue azur, de belles montagnes verdoyantes comme en Europe et même un désert clément et accessible. L'histoire de ce pays est un hymne à l'humanité et à la vie. Fondée par une Reine libanaise, Carthage enchante encore le monde relayée par Tunis, Kairouan, Sousse, Gafsa, Sfax, Djerba, Bizerte, jusqu'aux fins fonds des ergs sahariens ou campe debout le fort de Borj El Khadhra ! De quoi se plaignent les Tunisiens du matin au soir, empêtrés et pris en otages, par cette culture du « jamais heureux » aiguisée par des politiciens surmenés en mal de vivre et d'être, et qui n'aident pas le pays ni sa jeunesse à relever la tête et à croire en l'avenir ! Arrêtons de crier sur tous les toits que « tout va mal », parce qu'en réalité, la Tunisie comparée au reste du monde, qui vit la misère noire de la déchéance, de l'immigration en masse et de l'indigence notre pays est bien viable, et vivable, malgré ses difficultés actuelles. Au temps des crises les plus graves qu'a connues notre pays, il ya eu des Bourguiba, des Hached, des Taïeb M'hiri, des Mongi Slim et bien d'autres leaders, qui ont galvanisé la volonté de notre peuple à agir et à vaincre sa peur du lendemain... sa peur « d'être » toujours sous pression constante des difficultés conjoncturelles ou structurelles. La Tunisie a besoin et plus que jamais, aujourd'hui « d'acteurs », volontaires et dynamiques et non pas de « spectateurs » qui sèment le pessimisme à tout vent... « Tounès Bi Khayr » ! La Tunisie va bien, malgré tout ! D'ailleurs, notre ami Ban Ki-moon, a quelque part le coup de foudre pour ce pays millénaire qu'est la Tunisie. Il en est à sa troisième visite dans notre pays, depuis trois ans, soit une visite presque par an et c'est tant mieux ! M. Zied Laâdhari n'a pas à en rougir ! K.G