Des informations croisées publiées à Tunis et à Alger font état d'un imminent rapprochement de la Société algérienne des hydrocarbures (Sonatrach) avec plusieurs entreprises tunisiennes exerçant dans le secteur de l'énergie. Excité par les juteuses recettes pétrolières, le groupe algérien, qui détient déjà des intérêts en Tunisie, serait fortement tenté par un redéploiement au niveau régional. Il serait intéressé par la prise de participations dans le capital de plusieurs entreprises tunisiennes et même par des investissements lourds dans le raffinage. La Sonatrach sous-traite, actuellement, moyennant des redevances en nature ou en devises, avec Trans Tunisian Pipeline Company (TTPC, tronçon tunisien du Transmed, gazoduc reliant l'Algérie à l'Italie via la Tunisie), l'acheminement de son gaz naturel vers l'Italie et avec la Compagnie tunisienne des transports par pipelines (Trapsa), le transport de son pétrole du gisement Hassi Messaoud au port pétrolier tunisien, Skhira. Concernant Tansmed, les intérêts de la SONATRACH ne cessent de croître. Algériens et Tunisiens ont conclu, respectivement, le 8 mai 2005 à Alger et 6 avril 2006 à Tunis, des accords avec le groupe pétrolier italien ENI pour porter la capacité de transport du gaz naturel algérien à 33,9 milliards de mètres cubes contre 27,4 milliards de m3 actuellement, et ce pour un investissement de 330 millions d'euros. La SONATRACH serait intéressée par une prise de participation de plus de 50% dans le capital de la Trapsa. Gestionnaire du port pétrolier de Skhira, cette entreprise publique tunisienne, créée au lendemain de l'indépendance (1957), est spécialisée dans le transport pétrolier brut tunisien et algérien par pipeline, son stockage et son chargement sur les navires pétroliers. La Sontrach paye en contrepartie de ce service une redevance annuelle en devises dépassant les 10 millions de dinars. Au rayon de la distribution des produits pétroliers, le groupe algérien aurait présenté la meilleure offre pour acquérir partiellement (35%) la Société Nationale de Distribution du Pétrole (SNDP), leader sur le marché local de la distribution des produits pétroliers. Sa part de marché est estimée à 74% en 2004. Elle dispose d'un réseau de plus de 190 stations-service. Avec cette offre, la Sonatrach vient renforcer ses chances de devenir le partenaire stratégique du distributeur tunisien. Globalement, la SNDP compte sur cet investisseur pour se dégager d'une politique d'endettement bancaire excessif et se préparer dans de bonnes conditions à la prochaine libéralisation des importations des produits pétroliers. Pour Mme Bibia Chihi, PDG de la SNDP, cet investisseur, qui doit exercer impérativement dans le secteur pétrolier ou gazier, aura à aider le distributeur public à améliorer sa compétitivité, à diversifier ses activités et à promouvoir le rendement de ses stations-service. Elle a ajouté que "si demain l'importation est libre, la SNDP, adossée à son partenariat avec un groupe (raffineur ou producteur) rompu aux arcanes du marché international, ne trouvera pas de difficultés pour s'approvisionner". Avec cette déclaration faite, il y a plus d'une année, la première responsable de la SNDP semble avoir anticipé sur les évènements. Car, aujourd'hui, la Sonatrach, qui est à la fois raffineur et producteur de pétrole, lorgnerait du côté de la construction de la raffinerie de Skhira. Handicapée par une modeste production de brut, la Tunisie, qui s'approvisionne en énergie chez ses voisins, sera obligée, rien que pour des raisons de coût, d'importer du pétrole d'Algérie et de Libye pour faire tourner cette raffinerie dont la construction nécessitera un investissement global de 1,2 milliard d'euros. Dès lors, un partenariat avec un géant voisin comme la Sonatrach ne saurait lui déplaire ne serait-ce que pour garantir l'approvisionnement régulier de la raffinerie et assurer sa pérennité. Avec 120.000 travailleurs, la Sonatrach vient en tête des entreprises africaines et se classe au 12ème rang des compagnies pétrolières mondiales. Elle est également 2ème exportateur de GNL et de GPL et 3ème exportateur de gaz naturel.