A l'occasion de la tenue du Forum ATUGE 2008, à Paris et à Tunis, nous avons posé quelques questions à M. Hassen Zargouni, le président de l'ATUGE Tunisie, et fondateur-dirigeant de SIGMA Conseil. Mais au-delà dudit forum, M. Zargouni aborde la question de la compétitivité de l'économie mondiale et par ricochet l'économie tunisienne. D'ailleurs, tout en se félicitant en quelque sorte de l'esprit d'ouverture dont font preuve certaines de nos entreprises, le patron de SIGMA Conseil souligne avec force que plus que la question des émoluments, c'est l'environnement professionnel qui constitue désormais le point fondamental pour attirer les compétences tunisiennes établies à l'étranger voire sur place. Entretien !
Webmanagercenter : M. Hassen Zargouni, pourriez-vous nous parler un peu du Forum ATUGE 2008 ? Hassen Zargouni : Cette 17ème édition du FORUM ATUGE, qui se tiendra ce samedi 17 mai à Paris et le 24 juillet prochain à Tunis, visera l'analyse de l'économie des réseaux dans laquelle nous évoluons tous, les moyens de les activer, de les faire vivre et de les mobiliser dans la durée comme des têtes de pont' des entreprises tunisiennes à l'étranger. En cela, l'ATUGE est certainement un remarquable exemple de réussite d'un réseau de compétences animé par des Tunisiens pour des Tunisiens convaincus par l'efficacité collective.
Depuis un certain temps, on remarque un engouement des grands groupes, publics et privés, tunisiens pour les diplômés des grandes écoles françaises et d'autres d'ailleurs certainement. Selon vous, qu'est-ce qui explique ce regain d'intérêt ? La vraie bataille de la compétitivité se situe aujourd'hui et plus que jamais au niveau du capital humain à haute valeur ajoutée. En effet, l'économie mondiale est de plus en plus fondée sur la connaissance ; le savoir devient le levier de la croissance. L'entreprise tunisienne, qu'elle soit privée ou publique, a fait le pari gagnant de s'ouvrir sur le monde, sa compétitivité dépend de sa capacité à attirer des ressources humaines polyglottes, multiculturelles, connaissant les modes de fonctionnement des clients/donneurs d'ordres étrangers, maîtrisant techniquement leur métier.
Ces ressources humaines deviennent de fait l'accélérateur de l'exportation et de l'internationalisation permettant aux entreprises tunisiennes de sortir de l'étroitesse du marché local, et donc facteur de croissance... Le réservoir constitué par les diplômés des Grandes écoles françaises est un véritable vivier de ressources humaines aptes à relever les défis des grands groupes tunisiens, publics et privés.
Mais comment aujourd'hui peut-on attirer une compétence (sachant que celle-ci est à l'image de la mondialisation, autrement dit n'obéissant plus ou rarement au critère de la nationalité) ? Est-ce que réellement les entreprises tunisiennes ont les moyens au sens large du terme d'attirer de grosses compétences, fussent-elles tunisiennes ? Sinon, qu'est-ce qu'il faudrait faire, au niveau des pouvoirs publics notamment ? Au-delà de la question importante des émoluments, qui, de plus en plus, trouve des solutions notamment auprès des grands groupes privés et nous l'espérons publics (à l'instar du Maroc), l'environnement professionnel constitue un point fondamental pour attirer ces compétences. Le diplômé des Grandes écoles, ayant eu une expérience à l'étranger, est habitué à un mode de management rationaliste dans des structures relativement matures... Mais ils ont l'impression qu'il va mal s'adapter au sein de l'entreprise tunisienne, en plus de la crainte de voir son niveau de vie dégringoler. La responsabilité des entreprises tunisiennes désireuses d'intégrer des diplômés "sur-compétents venus d'ailleurs" est de lui créer les conditions du retour en donnant les bons signaux, dans une logique gagnant-gagnant. Mais la responsabilité des Tunisiens des grandes écoles opérant déjà en Tunisie, cadres ou dirigeants, est de faciliter cette intégration au pays, donnant ainsi un sens opérationnel à la notion de Networking, thème de notre forum cette année.
Le mot de la fin Une pensée profonde et pleine de recueillement à la mémoire de feu Si Mokhtar Latiri qui a laissé un immense vide et qui aurait voulu voir la niche d'atugéens et d'atugéennes (très nombreux) s'affairer pour rendre ce rendez-vous le plus digne possible de la Tunisie de l'excellence au cur de Paris.