Le deuxième roman de Mohamed Bouamoud, écrivain et journaliste à webmanagercenter, intitulé Visages, a eu pour échos une bonne douzaine d'articles parus dans la presse nationale, quatre en arabe et huit en français. Avec onze articles laudatifs contre une seule critique plutôt acerbe, on peut dire que ce roman est largement réussi aussi bien auprès de la critique que du côté des lecteurs qui ont déclaré avoir dévoré le livre en moins de trois heures de temps''. Pourtant, à nos yeux, cette impression du public confirme justement la nôtre qui avons trouvé que le roman a comme été ramassé, écrit à la hâte, à croire que Bouamoud lui-même l'a écrit en trois jours. D'ailleurs, dans son éditorial en date du 2 avril dernier, Zyed Krichen (Réalités) écrivait : «Après Essayda El Mannoubyya, 2ème Prix du roman au concours de la Médina Hammamet (juillet 2008), Bouamoud, pressé, sort son deuxième roman ». Et c'est dommage. Nous ne comprenons pas cette hâte à écrire, en l'espace de 7 mois, deux romans de suite. D'autant plus regrettable que Visages traite d'une page mouvementé de l'Histoire contemporaine de la Tunisie. Le livre aurait dû s'attarder un peu plus sur les péripéties ayant conduit le pays jusqu'à ce 26 janvier 1978, dit le jeudi noir. Visages raconte l'histoire douloureuse d'un petit fonctionnaire, au plus bas de l'échelle administrative, s'étant trouvé impliqué dans une affaire qu'il ne comprenait point mais qui avait agi juste pour se voir offrir une petite amélioration de situation. En fait, le jeu politico-syndical de l'époque dépassait de très loin l'esprit naïf des jeunes fonctionnaires d'alors : l'amélioration d'une situation n'était que fourberie malicieuse et très mal intentionnée. Conjuguée avec la solitude atroce du narrateur et sa vie tissée d'abîmes, cette désillusion allait petit à petit nourrir la haine dans le cur de ce dernier qui, inévitablement, allait jusqu'à commettre un crime abominable. Ecrit dans un style délicieux mais poignant (beaucoup d'humour, beaucoup de tristesse, phrases très courtes et saccadées), ce roman qui nous plonge dans les années 1970 aurait pu gagner en notoriété si seulement il avait été un peu plus profond. Il n'empêche : Visages a obtenu samedi dernier le Prix Découverte décerné par le jury du COMAR d'Or. Et je pense qu'il le mérite, ...en attendant le prochain. (*) Visages, Editions Bibliomed, 126 pages, 10 dinars.