Place à la création d'un front national associatif, fondé sur une approche participative pour appuyer la place de la femme dans le milieu rural « Autonomisation des femmes dans le milieu rural : réalité, répercussion et impact de la violence », tel est le thème du séminaire organisé, hier à Tunis, par l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (Utap) en collaboration avec l'Union nationale de la femme tunisienne (Unft), avec la participation de l'ONU Femmes et de l'Onfp. Ce séminaire s'inscrit dans la continuité de la campagne de sensibilisation sur la lutte contre la violence fondée sur le genre, laquelle a démarré le 25 novembre et prend fin aujourd'hui, jeudi 10 décembre. Le choix de ce thème est justifié par le rapport de cause à effet, entre l'autonomisation et l'indépendance économique de la femme dans le milieu rural et son aptitude à dire non à la violence et à l'exploitation économique sur fond sexiste. Inaugurant la rencontre, Mme Inès Bessaâd Nagarra, membre du bureau exécutif de l'Utap, a indiqué que cette rencontre vise à inciter l'Etat à améliorer les conditions de vie de la femme dans le milieu rural ; des conditions hélas lamentables qui renforcent sa vulnérabilité dans un milieu social et culturel assez hostile. « La femme rurale représente, indéniablement, le principal pilier de l'économie. C'est bien elle qui cultive la terre, qui travaille dur pour nourrir le pays. Et contrepartie de son engagement effectif dans le développement socioéconomique, elle vit dans des zones dépourvues de tout confort voire de toute composante élémentaire pour une vie digne. Elle est, ainsi, vouée à l'oubli, ce qui est un signe d'ingratitude, voire d'injustice», souligne Mme Nagarra. Elle ne cache pas sa déception de constater l'absence de la femme rurale à la conférence. «Ces femmes, érit-elle, ont dû écouter trop de discours et de tirades assommants. Elles n'ont, en revanche, rien vu de concret. Elles sont fatiguées de devoir entendre des promesses non tenues. Leur vécu les oblige à se résigner à leur sort et à ne plus espérer de grands changements. Les autorités sont vivement appelées à prendre des mesures en faveur de la population rurale et de la femme, en particulier, afin qu'elle ne succombe pas aux tentations terroristes. Il est indispensable que la femme, dans le milieu rural, bénéficie concrètement de ses droits afin de favoriser son autonomisation ». Le terrorisme : une nouvelle forme de violence Prenant la parole, Mme Majdoline Cherni, secrétaire d'Etat chargée du dossier des martyrs et blessés de la révolution auprès du ministre des Affaires sociales, a rappelé que la femme, depuis la 1ère République, continue inlassablement de lutter pour l'égalité entre l'homme et la femme et contre la violence sexiste. Issue du milieu rural, elle souffre de violences et de la marginalisation ; deux résultats qui découlent d'une mentalité machiste, de circonstances défavorables à l'intégration de la femme en tant que pilier de l'économie mais aussi du spectre terroriste qui transforme les régions montagneuses en des régions à hauts risques à la fois terroristes et militaires. « Je pense que le terrorisme est la violence la plus grave qui puisse être exercée sur la femme dans le milieu rural », a-t-elle noté. La secrétaire d'Etat a recommandé la mise en place d'une approche participative de lutte contre la violence et à l'égard de la femme rurale mais aussi d'autonomisation sur un fond d'égalité du genre. De son côté, Mme Radhia Jerbi, présidente de l'Unft, a évoqué la question de la violence économique fondée sur le genre en indiquant que l'autonomisation n'est qu'une partie de la solution. Mme Jerbi a souligné l'ampleur des menaces qui touchent la femme dans le milieu rural. Pour elle, l'analphabétisme, le chômage, dont les indicateurs montrent clairement la vulnérabilité de la femme contrairement à son alter ego l'homme, constituent autant de formes de violence à l'égard du genre. A ces injustices qui ne datent pas d'hier, s'ajoute une nouvelle menace : la menace terroriste. Là encore, c'est la femme qui en subit le gros lot. « Il est impossible d'éradiquer la violence à l'égard du genre et encore moins le terrorisme sans la conjugaison des efforts de toutes les parties prenantes, notamment les autorités, les institutions, les composantes de la société civile, etc. Il est grand temps de créer un Front national associatif pour lutter contre ces phénomènes redoutables. L'Unft a entamé la mise en place d'une stratégie axée sur ce point», a indiqué l'oratrice. Mme Héla Skhiri, chargée du programme national ONU femmes, a indiqué que le manque de données relatives à la violence à l'égard de la femme dans le milieu rural est déjà une lacune qui dénote la flagrante marginalisation exercée sur la femme rurale. L'oratrice a indiqué que la campagne de sensibilisation sur la lutte contre la violence à l'égard du genre avait démarré le 25 novembre, date marquant la célébration de la Journée mondiale de lutte contre la violence à l'égard des femmes. Elle se termine aujourd'hui, 10 décembre, date marquant la célébration de la proclamation des droits de l'Homme ; deux dates hautement significatives qui devraient inciter les parties concernées à protéger la femme contre la violence et la doter de ses droits afin de consolider sa place dans la société.