Ridha Belhaj, le coordinateur général, se démène pour que Nida Tounès retrouve son leadership sur la scène politique nationale même si Hafedh Caïd Essebsi laisse échapper certains signes de mécontentement Dans la vie politique ordinaire dans les pays démocratiques, il existe un phénomène, des attitudes et des faits quotidiens qui font partie de ce qui est communément appelé animation ou communication politique. A l'instar de ce que font les stars et les starlettes du showbiz pour se garantir une présence médiatique quotidiennement et vont jusqu'à fabriquer des «rumeurs» sur leur vie professionnelle et privée et les livrent elles-mêmes aux journalistes, les hommes politiques font de même, sous les conseils bienveillants de leurs coachs de communication, la finalité recherchée étant que les gens suivent leurs déclarations, leurs disputes et leurs secrets, quant à leurs programmes ou leurs orientations, on peut attendre les élections pour les découvrir si jamais ils existent. En Tunisie, nos politiciens révélés au public à la faveur de la révolution et aussi des élections du 23 octobre 2011 et du 26 octobre 2014 ont pris le pli sur leurs collègues européens et américains et, désormais, il ne se passe plus une journée sans que nos leaders de l'opposition ou de la coalition au pouvoir ne nous livrent la bourde du jour, ou la révélation qu'on attendait depuis des décennies ou le nouveau concept qui révolutionnera le paysage politique national. Et ceux qui excellent dans ce domaine, ce sont les hommes et les femmes de Nida Tounès, ceux qui sont restés aux Berges du Lac entourant Ridha Belhaj et Hafedh Caïd Essebsi pour sauver ce qui reste de la barque et également ceux et celles qui ont rejoint Mohsen Marzouk, le leader qui ne veut attendre que sonne son heure de gloire comme le lui conseillent ses lieutenants et qui veut accélérer cette heure au risque de refaire les erreurs qui l'ont poussé à quitter ses amis de la grande aventure anti-Troïka I et II. Dimanche 20 mars 2016, au moment où Béji Caïd Essebsi, le président de la République, parlait de l'unité nationale en tant que défi majeur pour éradiquer le terrorisme et insistait aussi sur le retour, 55 ans après, de feu Salah Ben Youssef à la famille destourienne et de la réhabilitation de feu Tahar Ben Ammar, le grand leader qui a signé la convention de l'autonomie interne et la convention de l'indépendance, Mohsen Marzouk haranguait ses fidèles à la coupole d'El Menzah en leur assurant que «la clé de la réussite est désormais entre leurs mains et qu'ils détiennent les solutions des crises économique, sociale et de développement dans lesquelles se morfond le pays depuis cinq ans». Toutefois, le coordinateur général du Mouvement projet de Tunisie, qui pourrait ne pas en devenir le chef «au cas où les bases du parti le décideraient au cours du congrès constitutif du parti prévu en juin prochain», se rétracte rapidement pour souligner : «La Tunisie a besoin d'un leadership collégial mais sur les pas du leader Habib Bourguiba et en s'inspirant de sa philosophie». Il ajoute dans le même discours : «La Tunisie a besoin aussi de leaders clairs et forts qui prennent les décisions fermes». Où se trouvent pour le moment ces leaders qui allient la force à la clarté et à l'audace pour «entreprendre les grandes réformes» ? Mohsen Marzouk laisse ses auditeurs sur leur faim, mais il finit par jeter une petite fleur au président Béji Caïd Essebsi qu'il considère comme «l'un des fondateurs de la cinquième génération du mouvement destourien». Nida Tounès plus fort que jamais Parallèlement, au Palais des congrès à l'avenue Mohamed-V, Ridha Belhaj, l'homme qui a abandonné le palais de Carthage et est revenu aux Berges du Lac pour revivifier Nida Tounès et lui faire reprendre la première place qu'il occupait sur la scène politique et au Parlement avant que Marzouk et les députés d'Al Horra ne se rebellent, prophétise : «Aucun parti politique ne peut se targuer d'avoir la force ou le poids de Nida Tounès quel que soit le leader qui le conduit. Il est impossible de créer, en l'espace d'un mois ou de deux mois, un parti politique capable de gagner les élections municipales qui pointent déjà à l'horizon». L'allusion n'est pas difficile à déchiffrer. C'est bien du Mouvement Projet de Tunisie qu'il s'agit. Et pour couper l'herbe sous les pieds de Marzouk et de ses lieutenants, il faut que «les nidaïstes resserrent les rangs, mettent de côté leurs désaccords et comprennent que l'heure est à l'union et à la cohésion». Le message s'adresse cette fois aux 53 signataires de la pétition dite celle de la 3e voie que Faouzi Elloumi appelle le courant de l'espoir. Sauf que les deux messages ont été assombris par le fâcheux incident qui a éclaté quand Hafedh Caïd Essebsi a quitté le meeting pour protester — dit-on — «contre le peu d'égard et de considération dont il a été l'objet de la part des organisateurs de la rencontre puisqu'il devait prendre la parole immédiatement après Ridha Belhaj mais d'autres leaders l'ont devancé, ce qui a provoqué sa colère». Hier, mardi 22 mars, Hafedh Caïd Essebsi a apporté un démenti cinglant à ceux qui sont allés jusqu'à l'accuser d'être le responsable de la coupure de courant à la coupole d'El Menzah: «A la suite de la coupure de l'électricité, je n'ai pas quitté la coupole. J'ai tout juste quitté la tribune pour rejoindre la salle d'honneur. Je n'ai pas été le seul à ne pas prendre la parole. D'autres responsables comme Abdelaziz Al Kotti, Boujemaâ Remili et Ons Hattab n'ont pas pris la parole. Et ceux qui ont répandu ces rumeurs ont pour objectif de semer la discorde au sein du parti». Pour le moment, les choses sont claires: Mohsen Marzouk poursuit l'édification de son parti, alors que Belhaj et Hafedh soufflent le chaud et le froid parmi leurs fidèles qui ne sont pas tous acquis totalement à leurs thèses comme Néji Jalloul, le ministre de l'Education. Dans une longue interview accordée, lundi 21 mars, à l'hebdomadaire «Achchraii Al Maghrebi», il souligne : «La pétition des 53 vise à ce que Nida Tounès s'ouvre de nouveau à ses enfants qui l'ont quitté à la suite de l'échec du congrès de Sousse. Aujourd'hui, il faut réorganiser le parti sur plusieurs niveaux, tout en préservant Hafedh Caïd Essebsi et Ridha Belhaj qui sont parmi les leaders historiques et fondateurs du parti».