La pénurie de certains produits est à l'origine de l'augmentation des prix durant ces derniers mois. «Entre 17h00 et 21h00, des clients viennent des villes avoisinantes rafler toutes les quantités de semoule, pâte et lait qui se trouvent dans ce magasin. Cela explique bel et bien qu'il y a un réseau de contrebande», souligne Ali L., commerçant à Zarzis. En effet, les pistes sahariennes, le long de toute la frontière, dans les deux gouvernorats de Médenine et Tataouine, connaissent une activité très intense, jour et nuit, selon des témoins oculaires, et dans les deux sens. De grandes quantités de denrées alimentaires subventionnées par le gouvernement tunisien ainsi que d'autres produits, les matériaux de construction (fer et ciment), les fruits et légumes, œufs, boissons, cigarettes, médicaments et même des camélidés sont transportés en Libye, sans passer par les postes frontaliers Ras Jédir et Dhéhiba-Wazen. Pour faire face à ces exportations anarchiques et cette fuite considérable de produits, et devant la situation qui devient, de jour en jour, de plus en plus difficile à contrôler, malgré les efforts accomplis par les douaniers, les gardes-côtes et l'armée, quelques citoyens, originaires de Tataouine et qui connaissent bien la région, ont jugé bon de prêter main-forte à nos gardes-côtes et arrêter l'hémorragie. Ce qui fut fait avec satisfaction. Et plusieurs véhicules venant d'autres gouvernorats ont été empêchés de franchir la frontière, parce qu'ils étaient chargés de légumes et fruits, essentiellement. Des procès-verbaux ont été dressés contre les conducteurs et la cargaison livrée aux autorités de Tataouine. «Effectivement, ces personnes nous ont aidés à faire face à l'exportation anarchique. Hier, entre Dhéhiba-Wazen et Machhed Salah, nous avons arrêté six camions, tranportant 15 t de tomates. Tout a été confisqué et vendu au public», nous apprend M. Hamzaoui, directeur régional de l'économie. M. S. Abichou , contrôleur économique, ajoute : «Les conducteurs des véhicules chargés de légumes et fruits qui voulaient passer en Libye et qui ne sont pas en règle ont été priés de revenir à leur point de départ». Cette initiative a été bien accueillie par les habitants de Ben Guerdane qui ont vite fait de même. Des bénévoles ont constitué des comités pour renforcer les rondes de contrôle économique. Ils ont travaillé conjointement avec les patrouilles mixtes déjà en place pour empêcher les contrebandiers de faire passer illicitement des denrées alimentaires en Libye. Les pastèques tunisiennes en Libye «Il y a de quoi, les prix flambent», nous dit M. Lotfi Jahouach, un des infirmiers et médecins tunisiens dont le contrat avec l'IMC vient d'expirer. «Rien ne manque de l'autre côté de la frontière sauf peut-être la sécurité, parce que tout le monde est armé. Là où j'étais, à Nalout et Jadou, on trouve de tout. Cela provient, à mon avis, de Tunisie. Et, sûrement, grâce à la contrebande. C'est ce qui explique l'augmentation vertigineuse des prix. Même les pastèques tunisiennes sont mises en vente, actuellement, en Libye». Pour le reste, le nombre de Tunisiens qui travaillent sur le territoire libyen augmente, chaque jour; surtout, dans les domaines de la maçonnerie, la peinture, l'entretien... Les ONG sont presque toutes parties, à l'exception de l'IMC (International Medical Corporation) et le Croissant-Rouge. Il y a également deux camps pour les rescapés africains qui sont traqués et placés dans ces endroits. Le camp de Bourchada abrite actuellement 2.500 personnes et celui de Chguiga, environ 1.500 individus. Les deux se trouvent du côté de Ghériane.