C'est au lycée d'El Ouardia que Chokri Belaïd s'initie à la politique en commençant à fréquenter les cercles secrets du Watad Chokri Belaïd est né le 26 novembre 1964 à Djebel Jelloud, un quartier ouvrier et pauvre du sud de la capitale, dans une famille originaire de Jendouba (nord-ouest du pays). Le futur homme politique voit le jour dans un milieu modeste, qui le prédestinait à épouser les thèses marxistes léninistes de son parti, les Patriotes démocrates. Opérant dans la clandestinité depuis le début des années 80 pour se protéger contre la répression bourguibienne, le Watad fait partie des multiples lignes politiques dérivées du mouvement socialiste perspectives, qui a dominé les milieux estudiantins de gauche jusqu'à la fin des années 70. Elu à la syndicale estudiantine C'est au lycée d'El Ouardia que Chokri s'initie à la politique en commençant à fréquenter les cercles secrets du Watad teinté de tendance panarabe. Il poursuit son activisme à la faculté des Sciences de Tunis qu'il intègre en 1984. Le jeune étudiant y apprend à galvaniser ses camarades par son verbe haut et ses discours révolutionnaires engagés en faveur des «masses prolétaires», du droit à la terre pour les petits agriculteurs, de la justice sociale, de la souveraineté nationale, de la démocratie parlementaire, de l'égalité totale entre les sexes... Résultat : en avril 1987, il est enrôlé de force dans l'armée à Rjim Maâtoug, dans l'extrême sud de la Tunisie. Il sera relâché avec la prise de pouvoir de Ben Ali en novembre de la même année. Chokri Belaïd est élu membre du bureau exécutif de l'Union générale des étudiants de Tunisie en mai 1988, lors du 18e congrès extraordinaire du syndicat estudiantin, que l'opposition de gauche a pu arracher de l'emprise des destouriens. Avant de partir en Irak en 1992 pour poursuivre, parrainé par des milieux proches du régime du Baâth, des études de droit, Chokri Belaïd aura subi de nombreuses arrestations, beaucoup fréquenté le milieu de l'Union générale des travailleurs tunisiens (Ugtt), qui le couvre autant que faire se peut. Il aura engagé huit années de sa jeunesse dans le militantisme pur et dur. Il y rencontre apparemment sa vocation. Sa véritable carrière ! Etudiant et... gardien de parking à Paris En Irak, il survit en se faisant journaliste et en collaborant dans plusieurs journaux et revues nationalistes arabes. Il décide ensuite de décrocher un DEA en droit pénal et poursuit des études de troisième cycle à l'Université Paris VIII en France où, malgré sa santé fragile et ses douloureux rhumatismes, il ne rechigne pas à accepter toutes sortes de gagne-pain aussi pénibles soient-ils... gardien de parking nocturne par exemple. C'est en France qu'il fait la connaissance de Besma Khalfaoui, étudiante en droit comme lui, avec laquelle il se marie à Paris en 2003. Il rentre au pays en 2004 et prend en charge tous les procès politiques du moment, ceux des islamistes, des salafistes, des syndicalistes du bassin minier de Gafsa et des militants des droits de l'Homme. A la suite de ses déclarations enflammées devant le Tribunal de Tunis le 28 décembre 2011 contre Ben Ali et les Trabelsi, il est enlevé l'après-midi par la police avec son collègue Maître Abderraouf Ayadi. C'est pour les soutenir et user de toutes sortes de pressions en mobilisant entre autres les solidarités internationales intraprofessionnelles que les robes noires passeront une nuit blanche en sit-in au siège de l'Ordre des avocats tunisiens. Les deux hommes seront libérés à l'aube du 29 décembre. Une pensée politique en maturation En mars 2011, le Parti des patriotes démocrates, dont il est le Secrétaire général, est enfin légalisé. Chokri Belaïd qui fait partie de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique, devient familier des Tunisiens à travers les débats télévisés. Son discours qui se démarque du politiquement correct ne laisse personne indifférent... Le 23 janvier 2012, le jour du procès de Nessma TV (accusée d'avoir diffusé un film d'animation «blasphématoire»), sa défense acharnée de la liberté d'expression lui vaut une agression physique et des insultes proférées par des salafistes, qui ont envahi les alentours du tribunal de Tunis. Il promet de poursuivre le ministre de l'Intérieur pour non-assistance à personne en danger. Selon plusieurs témoignages de ses amis, la pensée politique de Chokri Belaïd a mûri depuis ces années de jeunesse. Sa lecture critique de l'héritage marxiste le rend plus ouvert à l'autre. Même s'il continue à rêver de cette unité arabe porteuse d'un partage plus intelligent des richesses, à travers un marché commun, il évolue beaucoup à l'école du terrain. Le terrain des quartiers populaires, notamment où il se trouve face à face avec les militants d'Ennahdha...Le secrétaire général du Parti des patriotes démocrates unifiés a incarné l'élément moteur de la formation du Front populaire le 11 août 2012, en continuelle ascension dans les sondages ces derniers mois. Sans le savoir, nous assistions à la naissance d'un grand leader politique... Demain : Séisme sur l'échelle de la légitimité...