Notre championnat n'est plus compétitif avec des talents de plus en plus rares, une personnalité fragile et une insoutenable inflation des salaires. Nous sommes, en tant qu'hommes de média, responsables d'un inquiétant phénomène, celui de caser virtuellement nos joueurs dans les plus grands championnats et clubs européens. Certains médias, poussés bien sûr par des agents de joueurs, font circuler l'intox et gonflent la valeur de nos joueurs. Darragi à Barcelone, Dhaouadi au PSG, Ben Youssef et Sassi à Lyon, Ben Mustapha en Allemagne, et on se passe du reste... Et pourtant, la réalité est tout autre : notre championnat est «pauvre» en joueurs exportables. Même s'il y a quelques talents, ils n'ont pas pu s'imposer dans des clubs français de moitié de tableau, et même aussi si quelques-uns d'entre eux ont pu atteindre des paliers intéressants (Khélifa, Jemaâ et Chikhaoui entre autres), ils finissent par débarquer sur un championnat de «Petrodollar» ou font banquette et marquent le début de la fin. Khalifa, par exemple, pur produit du championnat tunisien, et prétendant à jouer en «premier league», a fini par être grillé à Marseille. Jemaâ, lui aussi produit du championnat tunisien, et buteur-né, a fini par évoluer au championnat koweïtien, alors que Ben Yahia a préféré rester en Turquie et évoluer en deuxième division. Ça fait une dizaine d'années que notre football n'exporte plus de joueurs en Europe, et ceux qui y vont, n'ont pas un «avantage compétitif». Ils choisissent des clubs moyens sur des championnats de seconde zone, sans parler de ceux qui reviennent bredouille avec un échec cuisant (Darragi et Dhaouadi). Chikhaoui, meilleur de sa génération et joueur complet, est la seule exception. Malchanceux avec une série de blessures sérieuses, acculé par les «lobbies» qui dirigent le football allemand, et «coupable» de défendre son identité et ses idées politiques, Chikhaoui n'a pas eu la carrière qu'il méritait. C'est pratiquement le seul joueur à la valeur «haut de gamme» exporté par le championnat tunisien ces dernières années. Le destin en a voulu autrement. Alors pourquoi nos joueurs qui évoluent dans des conditions confortables, qui sont protégés par tout le monde, n'ont pas réussi à évoluer dans de grands clubs européens. Avouez également que le constat est d'autant plus amer que nos voisins algériens et marocains se comportent mieux. Clin d'œil sur l'histoire Notre championnat n'a pas de fortes traditions dans l'exportation des joueurs. Mais remarquons bien que les choses étaient relativement meilleures avant : Ben Nacef, Belghith, Mejri, Diwa, un peu plus tard la génération 1978 de l'Argentine qui a opté pour l'Arabie Saoudite, Beya, Sellimi et, entre-temps, les passages ratés de Limam au Standard de Liege et Maâloul à Hanover, ce sont des expériences plus ou moins réussies. Pourtant, ce n'était pas aussi facile qu'aujourd'hui avec un racisme écœurant et des règlements peu souples. Mais il y avait du talent auprès des joueurs exportés. Le meilleur exemple est celui de Hatem Trabelsi, c'est l'exception tunisienne en la matière. On n'a pas vu un joueur tunisien, issu du championnat tunisien, faire pareil et jouer dans le gotha des grands. Ajax Amsterdam puis Manchester City, Trabelsi est l'un des meilleurs, arrières droits de l'histoire du football mondial. Autrement, les échecs sont beaucoup plus nombreux. Comme quoi, notre championnat et bien sûr nos clubs n'ont pas eu de traditions confirmées dans l'entretien de joueurs capables de réussir en Europe. Le constat se fait beaucoup plus clair depuis six ans au moins. Diverses raisons Pourquoi nos joueurs issus du championnat local n'ont pas pu relever la compétition en Europe ? Il y a diverses explications: fragilité mentale et psychologique, niveau technique faible, championnat où la concurrence n'est pas sérieuse, très mauvais circuit de formation, dirigeants qui se font petits devant les «stars» de leurs équipes, indiscipline totale et réflexes de délinquance ou d'anarchie qui ne passent pas inaperçus en Europe, agents de joueurs pas connaisseurs en football et qui cherchent seulement des commissions, difficultés financières qui obligent maints joueurs de talent à lâcher leurs clubs et le football, médiatisation extrême des quelques talents qui leur font perdre la tête... Nous pouvons encore vous expliquer le phénomène. Une chose est sûre, le talent ne manque pas du tout, mais le problème est que ce talent technique est mal encadré ou surestimé : il suffit d'un but marqué, de quelques matches, pour que le joueur perde la tête. Il suffit de tomber sur un agent de joueurs qui n'a aucun «back ground» pour rentrer dans le cercle des offres fictives. Nos joueurs ne sont pas humbles, ne sont pas compétitifs, et pourtant, on continue de les gâter et de leur accorder des salaires importants. Ils sont même intouchables !