Le député d'Attayar Nabil Hajji a affirmé qu'il est suspendu et non pas gelé de ses fonctions au parlement, précisant avoir obtenu ces derniers jours une attestation de travail de la part de l'administration de l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP). « Néanmoins, je me considère comme un ancien député », a révélé l'élu lors de son passage sur les ondes de radio Mosaïque Fm. Selon lui et d'un point de vue politique, il ne voit pas de possibilité de reprise des activités parlementaires. « Le retour de l'ARP en gardant cette composition serait extrêmement nuisible à Kaïs Saïed. Il s'agirait d'un suicide politique », a-t-il poursuivi. L'élu a, ainsi, considéré que le meilleur des scénarios serait la tenue d'une plénière pour décider de la dissolution de l'assemblée tel que déjà fait par l'ancien président Ben Ali. Il a, également, expliqué que la démission d'une partie ou de l'ensemble des députés ne conduit pas automatiquement à sa dissolution. « La loi électorale est claire. La Tunisie devra organiser des élections partielles. De même pour ce qui est de la révocation de députés », a ajouté Nabil Hajji. Il a, aussi, appelé à la suspension des vacances judiciaires afin que les magistrats puissent se pencher sur le rapport de la cour des comptes. « Bien évidemment, ceci doit avoir lieu dans le cadre d'un procès équitable et en respectant la présomption d'innocence », a-t-il dit. D'un point de vue juridique, Nabil Hajji a considéré que les mesures exceptionnelles enfreignent la Constitution. Pour ce qui est de l'aspect politique, il a considéré qu'il n'y pas d'autres solutions pour sortir de cette crise. « Nous n'avons pas appliqué l'article 80 de la Constitution. Je pense que nous sommes dans une phase d'organisation temporaire des pouvoirs publics. Maintenant, nous devons identifier le péril imminent », a-t-il continué. Par la suite, Nabil Hajji a rappelé que le président de la République, Kais Saied, avait justifié l'annonce des mesures exceptionnelles par les expressions : « blocage des institutions de l'Etat », « incendie et pillage » et « pousser vers une guerre civile ».
« Pour ce qui est du blocage des institutions de l'Etat, nous n'avons plus à supporter le gouvernement. Ce n'est pas normal, qu'après 20 jours de l'annonce des mesures exceptionnelles, il n'y a pas eu de nomination de chef du gouvernement ou de conseils ministériels. Concernant l'ARP, lors de la dernière plénière, j'avais critiqué la démocratie de façade à Bardo. J'avais, également, affirmé que le peuple finira par se révolter contre l'assemblée. Finalement, c'est le président qui a pris les choses en main afin de satisfaire les attentes des Tunisiens », a-t-il déclaré. Faisant référence à l'article 163 de la loi électorale relative aux sanctions basées sur le rapport de la cour des comptes, Nabil Hajji a appelé à appliquer la loi rapidement mais sans porter atteinte au bon déroulement des procès. « Je crains que l'application de l'article 80 en raison du péril imminent n'en devienne un aussi. Actuellement, nous avançons dans le flou total ! Nous n'avons pas d'informations relatives à la structure du prochain gouvernement ! Nous n'avons aucune idée sur le projet économique du président », a-t-il déploré. « Nous ne devons pas nous comporter comme si nous étions la belle au bois dormant et attendant le prince charmant pour se réveiller. Personnellement, je me méfierais même de mon père s'il monopolise les pouvoirs. Nous ne devons pas voir la vie en rose. Qu'attendons-nous ? Qu'en est-il de la Tunisie de demain ? », s'est-il interrogé. Comparant la situation du pays à celle des migrants irréguliers, Nabil Hajji a expliqué que ces derniers prennent la décision de partir en pensant que quoi qu'il en advienne, ils se retrouveront dans de meilleures situations. Néanmoins, et statistiquement, le pourcentage de ceux qui arrivent à vivre de meilleures situations n'atteint pas les 10% du total de migrants irréguliers. « Je veux atteindre une destination connue par tout le monde en achetant mon billet et en montant à bord du bateau », a-t-il ajouté. « Le président, les 216 députés et moi, avons tous juré de respecter la Constitution et je ne peux pas me taire si je constate des dépassements », a-t-il insisté.
Enfin, Nabil Hajji a déclaré qu'il s'attend à ce que le président de la République suspende la Constitution de 2014, opère une réforme des systèmes électoral et politique et passe à la troisième République en promulguant une nouvelle Constitution.