Aujourd'hui, 5 août 2025, débutent les dernières négociations sur le traité mondial contre la pollution plastique (INC-5.2) au Palais des Nations à Genève. Un moment historique mais aussi une occasion cruciale pour faire la lumière sur la désinformation qui entoure le plastique et les objectifs du traité. Voici quelques-unes des idées fausses les plus répandues et ce que la science en dit vraiment.
"Le plastique est inoffensif une fois produit"
Non, le plastique est toxique à chaque étape de son cycle de vie. Plus de 13.000 substances chimiques sont utilisées dans la fabrication du plastique. Environ 3200 de ces substances sont identifiées comme toxiques, dont près de 1000 liées à des cancers, des mutations de l'ADN, ou des effets nocifs sur la reproduction. On retrouve des substances perturbatrices endocriniennes, mutagènes, neurotoxiques, et plus de 6000 substances dont aucune donnée de sécurité n'existe.
Même après fabrication, des additifs tels que les phtalates ou les bisphénols peuvent migrer dans les aliments ou l'air ambiant, affectant la santé humaine.
"Le recyclage est la solution miracle"
Le recyclage plastique propage les toxines plutôt que de les éliminer. Les plastiques recyclés contiennent souvent plus de substances toxiques que les plastiques vierges. Lors du recyclage, les plastiques d'origines diverses se mélangent, formant un cocktail chimique incontrôlable. Par exemple, des plastiques recyclés à partir d'équipements électroniques peuvent contenir des retardateurs de flamme hautement toxiques même si ces substances n'ont aucun rôle dans les nouveaux produits (comme des jouets).
Selon une étude de IPEN, les granulés de plastique recyclé collectés dans plus de 20 pays contiennent des substances interdites telles que les dioxines et métaux lourds.
"Le traité ne vise qu'à mieux gérer les déchets" Le vrai cœur du problème, c'est la production de plastique. 99 % des plastiques sont issus de combustibles fossiles.
Si rien n'est fait, la production de plastique pourrait tripler d'ici 2050.
Or, la production libère déjà des substances comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les dioxines, et des PFAS (produits chimiques éternels) qui contaminent les communautés voisines des usines, provoquant des cancers, maladies auto-immunes, troubles hormonaux. Le traité doit intégrer un objectif de réduction de la production plastique et non se contenter d'une gestion des déchets.
Tous les plastiques peuvent être rendus sûrs.
Non, aucun plastique n'est actuellement prouvé comme étant "sûr".
L'absence de traçabilité empêche de savoir ce qu'un plastique contient réellement. Beaucoup de plastiques "biodégradables" ne se décomposent qu'en conditions industrielles spécifiques, libérant encore des microplastiques.
Certains "bioplastiques" utilisent les mêmes additifs toxiques que les plastiques fossiles.
Le principe de substitution sûre (remplacer une substance toxique par une non toxique) est rarement respecté.
Les femmes et les enfants ne sont pas plus à risque
En réalité, les femmes, les enfants et les communautés marginalisées sont les plus exposés.
Les perturbateurs endocriniens présents dans les plastiques (comme les bisphénols, phtalates) affectent le développement hormonal des fœtus, des enfants, et altèrent la fertilité chez les femmes.
Les femmes travailleuses du recyclage informel ou vivant à proximité des incinérateurs sont exposées sans protection.
Les PFAS ont été liés à une augmentation des risques de cancer du sein, de l'utérus et des ovaires.
Le plastique, c'est surtout un problème des grands pays industrialisés, la Tunisie est peu concernée.
La Tunisie est en réalité l'un des pays les plus touchés par la pollution plastique en Méditerranée. Chaque année, 4,2 milliards de sacs plastiques sont consommés, dont 1,2 milliard issus du marché informel. Cela équivaut à 400 sacs par habitant et par an, soit 8 fois plus que la moyenne européenne.
Le plastique est bien géré en Tunisie
60 % des plastiques produits en Tunisie sont mal gérés, ce qui signifie qu'ils finissent souvent dans la nature, dans les décharges non contrôlées ou directement dans la mer. Environ 500 000 tonnes de déchets sont rejetées chaque année dans la Méditerranée depuis les côtes tunisiennes.
Le traité doit impérativement adopter une approche fondée sur les droits humains et de genre. La société civile aujourd'hui à Genève demande la réduction de la production de plastique à la source, l'élimination progressive des substances toxiques, y compris les additifs La transparence sur les composants chimiques tout au long du cycle de vie. La protection des plus vulnérables : femmes, enfants, travailleurs du secteur informel. Un traité contraignant, fondé sur le principe de précaution. Un traité sans contrôle des substances toxiques échouera à protéger la santé humaine. C'est pourquoi les négociations de Genève sont une chance unique de mettre fin à l'ère du plastique toxique.