Fêtes et façades : la Tunisie en trompe-l'œil La Tunisie célèbre encore : festivals, mariages, veillées estivales. Les rues et les plages s'animent pour ceux qui peuvent. Mais derrière cette façade, la cité s'érode. La vigilance civique, que Platon qualifiait de « prix de la liberté », fait défaut. Les conséquences sont là, visibles et silencieuses.
Chaises vides, pouvoirs sans limites La participation politique s'effrite. À Bizerte, 2,4 % à une partielle. Aux législatives, moins d'un électeur sur dix s'est déplacé. Les institutions vacillent : conseils municipaux sans représentants effectifs, justice sous tutelle, société civile affaiblie, syndicats et patronats tétanisés. La corruption prospère là où le contrôle disparaît. L'abstention devient complice de l'opacité. Dire que c'est « la volonté du peuple » ne suffit pas. Chaque chaise vide transfère du pouvoir à ceux qui restent, organisés et déterminés. Montesquieu l'avertissait : tout pouvoir tend à s'étendre jusqu'à l'infini. Ne pas participer, c'est céder son sort à des acteurs qui ne défendent souvent que leurs intérêts.
Reprendre la cité, sauver la liberté Le bonheur individuel ne se construit pas en dehors du bien commun. Quand le citoyen s'engourdit, il cesse de peser sur le destin de sa cité, laissant libre cours à ceux qui concentrent le pouvoir. Philosophiquement, d'Aristote à Arendt tous ont montré que l'inaction civique fragilise les institutions et ouvre la voie à l'autoritarisme. Ce n'est pas qu'une question électorale : c'est la nature même de la communauté politique qui est en jeu. Que faire ? Restaurer confiance et efficacité. Garantir des institutions crédibles. Renforcer contrôle et reddition des comptes. Encourager la participation civique par l'éducation, des forums locaux et des plateformes consultatives. Montrer que l'engagement produit des résultats : projets réalisés, politiques évaluées, responsabilités assumées. Le loisir est nécessaire. Mais lorsqu'il devient prétexte à l'absence, il se transforme en alibi. La citoyenneté est une pratique : veiller, exiger des comptes, participer, transmettre ces habitudes. La cité n'est pas un décor. Chaque chaise vide, chaque voix absente, chaque silence complice creuse le lit de l'indifférence et du pouvoir sans contrôle. Le bonheur commun ne se fabrique pas dans l'oisiveté, mais dans l'exigence et l'action. Reprenez votre place. Veillez. Agissez. Abandonner le domaine public, c'est abandonner liberté, dignité et avenir. Il est temps de choisir : citoyen ou sujet.