La vile attaque sur le Net dont a fait l'objet le Ministre de l'Intérieur, Ali Laraâyedh, ne peut que susciter indignation et mépris. Ceux qui sont derrière cette souillure ne valent pas mieux que les affreux tortionnaires qui ont officié dans les caves lugubres de l'ancien régime. Remettre en circulation un montage aussi flagrant prouve une fois de plus que certains esprits dérangés ne reculent devant rien pour tenter de déstabiliser un gouvernement démocratiquement élu. La réprobation a été quasi générale bien qu'il faille maintenant que la justice traque ceux qui ont commis cette insanité. L'honneur d'une personne quel que soit son rang ou son statut mérite une protection juridique efficace ; trop souvent, le parquet, devant l'amoncellement des plaintes pour diffamation, ne parvient pas à exercer des poursuites dans les délais requis à tel point que les victimes de ces atteintes, que ce soit sur le Net ou dans une presse de bas étage, préfèrent renoncer à demander réparation. Cette lenteur judiciaire, indiscutablement, encourage les colporteurs de ragots et les professionnels de l'insulte. Sans plus tarder, une solution doit être mise en œuvre pour que nous n'ayons plus à subir ces torrents de boue. Une autre ignominie est venue assombrir la semaine : l'agression de mon ami et collègue Zyed Krichen. Il est particulièrement navrant de constater que l'intégrité physique d'un journaliste ne signifie rien pour des illuminés dignes d'être enfermés dans un asile pour aliénés. En s'attaquant à un fervent défenseur des valeurs démocratiques, les brutes épaisses qui ont commis ce forfait cherchent à intimider les journalistes et de manière générale tous les esprits libres qui considèrent l'affaire Nessma comme une ligne de démarcation. Connaissant de longue date Zyed, je sais qu'il faudra bien plus que quelques coups de poing pour le dissuader de poursuivre son combat pour les libertés publiques et individuelles. Qu'il sache qu'avec lui des bataillons de démocrates sont prêts à se battre pour la défense de la liberté d'expression. Je tiens à lui exprimer, au nom de «Réalités» et en mon nom personnel, toute notre sympathie et notre soutien face à l'ignoble et lâche attaque dont il a été la victime ainsi qu'à tous ceux qui ont été agressés tout en formant le vœu que cet acte abject ne restera pas impuni. La mobilisation de la société civile aux côtés de Nessma TV et de son directeur est réconfortante car il nous parait évident que ceux qui ont intenté le procès pour «violation des valeurs sacrées» et «troubles à l'ordre public» suite à la diffusion du film Persépolis s'attaquent de fait à la liberté d'expression et de création. Ce procès a valeur de test, d'abord pour le pouvoir judiciaire qui devrait affirmer son indépendance et démontrer aujourd'hui qu'il est garant des libertés fondamentales, ensuite pour les démocrates quant à leur capacité de mobilisation, seul moyen pour contrer les projets des obscurantistes qui veulent dévier «la Révolution de la Liberté et de la Dignité» de ses objectifs. Enfin de jauger la capacité de nuisance des salafistes qui, par leur comportement, sont en train de gêner ceux qu'ils considèrent les plus proches, à savoir le parti Ennahdha. Dans un communiqué en date du 23 janvier, ce dernier prend ses distances et exprime son attachement à la liberté d'expression en tant qu'un des principes fondamentaux des Droits de l'Homme considérant que la poursuite en justice de Nessma TV n'est pas la meilleure solution à la problématique et au dilemme entre «la question identitaire et l'atteinte du sacré d'un côté, et la liberté d'expression de l'autre». On ne peut que saluer cette prise de position qui a le mérite de la clarté.