L'état d'urgence est une mesure prise en cas de danger ou de menace pesant sur la sécurité d'un pays. Cette mesure, nécessaire dans des circonstances bien particulières pour préserver l'ordre et la stabilité, peut avoir de fâcheuses conséquences sur les libertés individuelles des citoyens ainsi que sur la liberté de la presse. Le décret n° 78-50 du 26 janvier 1987 réglementant l'état d'urgence énonce, dans son article premier que : « L'état d'urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire de la République, soit en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, soit en cas d'événements présentant par leur gravité le caractère de calamité publique ». Les mesures prises en vertu de l'annonce de l'état d'urgence cessent d'avoir effet dès qu'il aura pris fin.
Il est à préciser que l'état d'urgence est déclaré pour une durée maximum de trente jours fixée par décret qui détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et il ne peut être prorogé que par décret qui fixe sa durée définitive.
Selon l'article 4, la déclaration de l'état d'urgence donne pouvoir au gouverneur dans les zones prévues à l'article 2 et autant que la sécurité et l'ordre publics l'exigent : * d'interdire la circulation des personnes ou des véhicules; * d'interdire toute grève ou lock-out même décidés avant la déclaration de l'état d'urgence; * de réglementer les séjours des personnes; * d'interdire le séjour à toute personne cherchant à entraver de quelque manière que ce soit, l'action des pouvoirs publics ; * de procéder à la réquisition des personnes et des biens indispensables au bon fonctionnement des services publics et des activités ayant un intérêt vital pour la nation.
En vertu de l'état d'urgence, le ministre de l'Intérieur peut prononcer l'assignation à résidence de toute personne dont l'activité s'avère dangereuse pour la sécurité et l'ordre publics dans les zones prévues par la loi ; ordonner la remise, contre récépissé, des armes et des munitions dont la détention est soumise à autorisation et prescrire leur dépôt entre les mains des autorités et dans les lieux désignés à cet effet ; peut ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature mais également interdire les réunions de nature à provoquer ou entretenir le désordre (valable également pour le gouverneur).
Dans les zones soumises à l'application de l'état d'urgence, les autorités visées peuvent ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit et prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales (article 8). Les infractions aux dispositions du présent décret sont punies d'une peine d'emprisonnement de six mois à deux ans et d'une amende de 60 à 2500 dinars ou de l'une de ces peines seulement (article 9).
Rappelons que la première fois où l'état d'urgence a été décrété en Tunisie c'était le 26 janvier 1978 par le président Habib Bourguiba qui l'avait annoncé à la suite d'une grève générale organisée par l'UGTT. L'état d'urgence a également été décrété lors des émeutes du pain entre décembre 1983 et janvier 1984. Aussi, cette mesure a été appliquée après la révolution entre janvier 2011 et mars 2014.