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Les prisons tunisiennes, classe prépa du crime !
Publié dans Business News le 05 - 01 - 2017

Surpopulation carcérale, conditions de détention indignes, influence délétère de prédicateurs fanatiques, directeurs d'administration pénitentiaire corrompus, volonté djihadiste d'instaurer un émirat carcéral et puissante haine de la société… voici les ingrédients du cocktail Molotov de l'idéologie djihadiste qui sévit dans les prisons. Une spirale infernale où la prison nourrit le crime, lequel alimente à son tour la prison. Le ministre de la Justice l'a promis : des réformes carcérales d'envergure auront lieu à l'aune du retour de nos terroristes. Comment l'établissement pénitentiaire est devenu la classe Prépa du crime ?

La Tunisie n'est certainement pas le vivier du djihadisme mais ses prisons se présentent comme tel. Les acteurs de ce phénomène sont les détenus et, à une moindre échelle, l'administration pénitentiaire. Sinon comment l'instauration d'un émirat salafiste à la prison de Mornaguia aurait-elle été rendue possible ?
Mercredi 21 décembre 2016, Lotfi Laamari, journaliste et chroniqueur de l'émission « Klem Enness » diffusée sur la chaîne Al Hiwar Ettounsi, révèle au grand public des dépassements d'une extrême gravité ayant eu lieu au sein des prisons tunisiennes.Déjà poursuivi pour avoir critiqué publiquement la justice à la rendue du verdict dans l'affaire Lotfi Nagdh, le journaliste n'a pas mâché ses mots lorsque, prenant à partie Olfa Ayari, membre du syndicat des prisons et auteure d'un rapport édifiant sur la radicalisation en prison datant du 29 janvier 2016, il a révélé que plusieurs hauts responsables pénitenciers sont coupables de complicité avec des djihadistes emprisonnés.

C'est rapport à l'appui, qu'il a affirmé que l'ancien DG des Prisons et de la Rééducation, Saber Khelifi, est impliqué dans des affaires de terrorisme et de recrutement de plusieurs surveillants pénitentiaires appartenant à Ansar Chariâa, surveillants qui se sont, par ailleurs, avérés être d'anciens détenus. La responsabilité de l'ex DG a également été pointée du doigt suite à la grâce qu'il a accordée à des prisonniers libyens et aux permissions de visites nocturnes effectuées par de hauts responsables libyens à des détenus. Il est à noter que le 14 novembre 2016, Saber Khelifi a été remplacé par Elyes Zalak au poste de DG des Prisons et de la Rééducation, selon un communiqué rendu public par le ministère de la Justice. Le rapport accablant a également fait état d'un plan projetant l'assassinat d'un juge d'instruction et l'infiltration de l'hôpital de l'Ariana pour faciliter l'évasion collective des djihadistes emprisonnés.
Sur la corruption des gardiens de prisons, le journaliste a également dévoilé que certains d'entre eux délivraient des téléphones portables, des stupéfiants et de l'alcool aux détenus. Soutenant son énumération de faits graves, Lotfi Laamari a ajouté qu'un gardien de prison a été refoulé à la frontière turque alors qu'il tentait de rejoindre les rangs des organisations terroristes et, qu'à son retour à Tunis, il a été réaffecté à son poste… La démesure ne s'arrête pas là puisque, selon les faits, ce même gardien aurait fourni le plan de la prison civile des femmes de la Manouba pour faciliter l'évasion de la terroriste Fatma Zouaghi.
Pour aller encore plus loin, le rapport établi par le syndicat des prisons a indiqué qu'un prisonnier écroué pour terrorisme a formé un émirat salafiste dans sa cellule et qu'il a rallié plusieurs détenus de droit commun à sa cause. Des enregistrements et des vidéos démontrent comment ce prisonnier se faisait nommer « émir » et comment il a transformé sa geôle en véritable incubateur de terrorisme…

A la prison de Mornaguia c'est tout un bloc qui a été transformé en émirat pour le recrutement de prisonniers et même d'agents pénitenciers ! C'est ce qu'a déclaré le porte-parole du Front populaire, Hamma Hammami. S'exprimant sur le sujet polémique du retour des terroristes en Tunisie, le 3 janvier dernier sur Mosaïque FM, M. Hammami qui a purgé plusieurs peines de prison pour son opposition au régime de Zine El Abidine Ben Ali, est revenu sur le phénomène de collusion existant entre les terroristes emprisonnés et les responsables de pénitenciers. Il a par ailleurs dénoncé les méfaits de la surpopulation carcérale en indiquant qu'il fallait « vider les prisons de ceux qui n'ont rien à y faire, pour faire de la place aux terroristes tunisiens de retour des foyers de tension » mais aussi et surtout « séparer les détenus de droit commun des terroristes, car les terroristes sont à l'origine des prisonniers de droit commun ».

L'ambition terroriste de bâtir un émirat djihadiste n'est pas récente, en effet, ce type d'organisation décentralisée agirait comme une sorte de conseil d'administration qui définirait le cadre général du management djihadiste. Dans les prisons, sont planifiées des opérations de terrain qui sont confiées aux émirs djihadistes responsables de régions qui sont soit emprisonnés soit en liberté, de toute façon la relève est assurée ! Ces crimes en bande organisée avec association de malfaiteurs terroristes agissant au sein même des prisons prouvent que le bagne tunisien est vecteur de crime. La contamination a lieu dans la cour de promenade, lors des activités sportives auprès de personnes influençables qui nourrissent une puissante haine de la société. Le discours islamiste peut alors facilement déclencher le passage à l'acte chez les détenus comme chez les surveillants de pénitencier.

Auditionné lundi 2 janvier 2017 par la Commission de la Sécurité et de la Défense à l'ARP sur le sujet de la situation carcérale en Tunisie à l'aune du retour des terroristes, le ministre de la Justice Ghazi Jeribi a reconnu l'existence de défaillances dans la gouvernance des prisons et a promis des réformes carcérales d'envergure. Comme il l'a déclaré : « les établissements pénitenciers comme les autres établissements publics sont concernés par des dépassements. Tous ceux qui seront reconnus coupables seront punis ». Le 3 janvier 2017, 4 gardiens de prison ont ainsi été condamnés pour trafic de drogue dans une prison, 3 officiers ont été écroués et le 4ème a été mis en garde à vue . Le ministre a averti : « dans ces circonstances, l'immunité ne pourra nullement être invoquée par qui que ce soit»… Durant la réunion de la commission, l'ex DG des Prisons et de la Rééducation a également été auditionné sur la consommation de stupéfiants au sein des prisons durant son mandat.
Le ministre a avancé que 2600 dealers sévissaient dans le milieu carcéral et il a évoqué le nouvel article 47 du projet de loi sur les stupéfiants qui prévoit les peines maximales et les plus sévères lorsque la transmission des stupéfiants se fait dans des lieux publics tels que les cafés, les mosquées, les hôtels, les bars, les restaurants et les prisons. Il a recensé les taux de surpeuplement des prisons tunisiennes et a soulevé la question des conditions désastreuses de détention.
Comme début de réforme, le conseiller du ministre de la Justice, Kamel Eddine Ben Hsan qui avait indiqué que les détenus tunisiens ne disposaient que de 1.6 mètre carré d'espace personnel dans leur cellule collective, a annoncé que les prisons allaient être agrandies et qu'une autre, spécifiquement réservée aux terroristes, sera construite.

En 2013, les défaillances du système judiciaire et pénitentiaire depuis Habib Bourguiba avaient déjà étaient pointées du doigt dans le livre pamphlet « Le syndrome de Séliana » rédigé par 4 Tunisiens : Samy Ghorbal, Héla Ammar, Hayet Ouertani et Olfa Riahi. Une enquête inédite sur l'enfer du couloir de la mort et sur les conditions de détention inhumaines dans les prisons de la Monarguia, de la Manouba, de Sfax et du Sers dans le gouvernorat du Kef avait mis en relief les distorsions régionales et sociales qui sévissent dans nos prisons.
L'état des prisons tunisiennes est à, lui seul, une sanction pénale et en matière de réinsertion des prisonniers, il n'existe aujourd'hui aucune stratégie nationale claire. Aucune structure d'accueil ni dispositif d'accompagnement ne ciblent les prisonniers qui ont purgé leur peine. Dans un contexte de terrorisme dévastateur, nos prisons sont loin d'être l'instrument de sauvegarde de la société, elles sont au contraire le lieu de l'apprentissage du crime. Si le repentir se conçoit, c'est hors des murs de la prison qu'il sera rendu possible par des programmes de déradicalisation et de désendoctrinement des détenus. Défendre la dignité des détenus permettra peut-être de lutter plus efficacement contre le terrorisme qui a son terreau dans les prisons. La justice tunisienne est au bord de l'embolie et un modèle reste à inventer, notamment avec le retour des terroristes des foyers de tension.


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