Dans une longue interview accordée à Khelil Hannachi et publiée dans l'édition du mercredi 18 janvier 2017 du quotidien arabophone Assabah, Slim Riahi, président de l'Union patriotique libre (UPL), a tiré à boulets rouges sur Béji Caïd Essebsi l'appelant carrément à organiser une présidentielle anticipée. D'après M. Riahi, le document de Carthage et le gouvernement d'union nationale sont une supercherie politique. « On a fait croire qu'il s'agissait d'un gouvernement d'union nationale alors qu'en réalité c'est un gouvernement qui touche une caste précise de politiques à leur tête Béji Caïd Essebsi. Ce dernier ne s'est pas uniquement suffi de la présidence de la République, il a également rajouté le gouvernement, ce qui est contraire aux principes du régime parlementaire. Le président fait carrément une mainmise sur le pouvoir ! », a déclaré le président de l'UPL.
Il note dans la foulée l'absence de véritables compétences dans ce gouvernement et de personnalités politiques capables de créer des équilibres et de stabiliser la situation. D'après lui, on a cherché à ramener des personnalités de gauche dans l'objectif de faire vider les plateaux de télévision de leur esprit critique et de rapprocher ces voix du pouvoir et des cercles du pouvoir. Le président de l'UPL poursuit en accusant Youssef Chahed d'avoir cherché à ramener des ministres moins compétents que lui. Le chef du gouvernement aurait carrément refusé les propositions de noms de ministres qui ont de la compétence et du poids politique. On a, en parallèle, élargi le pouvoir à Ennahdha pour que le parti islamiste devienne le soutien politique au «gouvernement de Béji Caïd Essebsi », ce qui a créé des tensions et transformé le régime politique d'un régime parlementaire à un régime présidentiel. « Nous sommes face à un duopole Ennahdha-Béji […] Nous sommes face à un pouvoir familial ».
Après avoir réfuté que ces critiques soient nées parce qu'il a été exclu de l'actuel gouvernement, Slim Riahi indique qu'on lui a proposé cinq portefeuilles, mais qu'il les a rejetés parce qu'il refuse d'être un décor. Répondant à une question sur les prestations de ses ministres à l'ancien gouvernement et leur démission de l'UPL (Hatem Euchi et Mohsen Hassen), Slim Riahi a indiqué que ces deux ont fait un diagnostic personnel de la situation, ce qui est contraire aux objectifs du parti qui regarde vers l'avenir. « Ils manquent d'expérience politique et il se pourrait qu'ils aient eu des pressions, mais ils restent les enfants du parti et ils peuvent y retourner dans la prochaine étape », a indiqué M. Riahi.
Sur un aspect plus personnel, Slim Riahi a accusé le pouvoir actuel de légèreté et d'immaturité politique après la décision de lui retirer la garde rapprochée et l'escorte dont il bénéficiait. Quant aux accusations de Youssef Chahed concernant sa fortune et le fait qu'il n'ait pas investi en Tunisie, Slim Riahi considère ces déclarations comme étant des provocations et de l'enfantillage. « Youssef Chahed doit avoir de la hauteur et répondre sur le fond plutôt que de nous répondre à la manière d'un chroniqueur de plateau télé (…) Comment se fait-il qu'il s'interroge sur ma fortune alors qu'il dirige l'Etat ? Par expérience, je sais qu'il n'a fait que lire un texte qu'on lui a écrit ! Je lui rappelle juste qu'il a travaillé pour le compte de l'un de mes projets que j'ai présenté à l'époque à la troïka ». Concernant son classement dans les sondages, il met en doute le classement actuel en évoquant ses propres sondages et en relevant que cette science est exacte dès lors qu'on l'utilise d'une manière déontologique. « Mais c'est criminel si ceux qui manquent d'intégrité jouent avec les sondages. Nous avons les vrais chiffres, nous avons un bon positionnement, les sondages actuels sont des mensonges prépayés». Il rappelle par la suite sa proposition d'organiser des élections anticipées pour éviter l'impasse. « La situation actuelle est tellement critique que le président de la République n'a pas pu se déplacer au centre de Gafsa », a-t-il ajouté.