La séance plénière tant attendue de ce samedi 28 juillet 2018, a démarré à 10h38 en présence de 143 députés et sous la présidence de Abdelfatteh Mourou. A l'ordre du jour, l'adoption du projet de loi relatif au financement du programme d'appui budgétaire. En deuxième partie, les députés procéderont au vote de confiance pour le nouveau ministre de l'Intérieur, Hichem Fourati. Au démarrage de la plénière, les vacances des sièges respectifs de Abada Kefi, circonscription du Kef et de Kamel Hamzaoui, circonscription de Kasserine, ont été comblées par Nessrine Laâmeri et Maroua Bouazi. Ainsi, les deux nouvelles élues ont prêté serment aujourd'hui.
Les députés sont passés par la suite, en présence du ministre du Développement et de la Coopération internationale, Zied Laâdheri, à la discussion du projet de loi relatif au financement du programme d'appui budgétaire, d'une valeur de 413,4 millions d'euros. Le projet de loi a été adopté dans son intégralité avec 143 voix pour, 11 abstentions et 21 voix contre.
On notera que le nombre des députés présents est passé de 143 au début de la plénière à 175 pour la deuxième partie consacrée à la nomination du nouveau ministre de l'Intérieur.
Après une longue pause, consacrée aux dernières tractations, notamment avec la présence de fils du président de la République, Hafedh Caïd Essebsi qui tentait de convaincre certains de ses députés pour ne pas accorder la confiance au nouveau ministre, la plénière a repris pour passer au vote de confiance pour Hichem Fourati en présence de 168 députés et en l'absence de 49 autres sur un total de 217 élus.
A cette occasion, le chef du gouvernement, Youssef Chahed a donné un aperçu sur le rendement du gouvernement, affirmant que l'évaluation de l'action gouvernementale se base sur des indicateurs objectifs et concrets. Un discours durant lequel, il a répondu à ses détracteurs et ceux qui mettent en doute les résultats de sa formation à travers des données et des chiffres. Le chef du gouvernement a tenu à rappeler aux députés qu'il est nécessaire de pourvoir le poste vacant pour l'intérêt du pays, loin des calculs partisans et autres enjeux politiques.
Vers la fin de son discours, Youssef Chahed a repris le fameux dicton du président de la République « La patrie avant les parties ». Une reprise considérée comme étant « un coup de maître » par plusieurs observateurs, et un message fort en symbolique pour ses adversaires. Les députés sont passés par la suite à une série d'interventions où chacun a exprimé sa position et celle de son parti par rapport au nouveau ministre et de la situation générale du pays.
Mourad Hmaidi, député du Front populaire, a estimé que tout le gouvernement doit se présenter à l'ARP pour renouveler sa confiance, au lieu de proposer un ministre de l'Intérieur pour un vote de confiance. « Le chef du gouvernement veut garder sa place malgré tous les problèmes et toutes les contraintes. Il représente ainsi un danger pour le pays. On ne peut pas accorder la confiance à un ministre proposé par le chef du gouvernement qui règle ses comptes avec l'ancien ministre de l'Intérieur ». Karim Helali, député Afek Tounes, a considéré que le pourvoi des postes vacants revient au chef du gouvernement ne requiert pas le passage par le parlement pour ce faire. « Cette séance n'est pas consacrée au vote de confiance, mais il s'agit d'une vacance à combler », souligne-t-il.
Mongi Harbaoui, député Nidaa Tounes, a indiqué « On ne votera pas pour le ministre de l'Inérieur tant que le chef du chef du gouvernement n'a pas consulté le président de la République ». Ameur Laârayedh, député Ennahdha, a affirmé que son parti accordera sa confiance au nouveau ministre, soulignant qu'Ennahdha a voté pour tous les ministres qui se sont succédé à ce poste puisque le parti fait primer l'intérêt de l'Etat et ne veut entraver le fonctionnement des institutions de l'Etat. Cela dit, et en parallèle à ces interventions, le parti Nidaa Tounes a tenu une conférence de presse affirmant que ses députés ont décidé, finalement, de voter pour le ministre désigné par Youssef Chahed. Un revirement de dernière minute après tout le lobbying fait par le directeur exécutif de Nidaa Hafedh Caïd Essebsi afin que ses députés n'accordent pas leur confiance au nouveau ministre. Le parti s'est, finalement, assuré que Hichem Fourati obtiendra la confiance de l'assemblée, d'où ce revirement.
Les députés ont toutefois campé sur leur position par rapport au chef du gouvernement l'appelant à se présenter devant le parlement dans un délai ne dépassant pas les 10 jours pour un renouvellement de confiance.
Dans la suite des interventions, le député Harak Al Irada, Imed Daïmi a indiqué, que le chef du gouvernement Youssef Chahed a utilisé le nouveau ministre pour induire l'opinion publique en erreur. « Youssef Chahed a voulu se cacher derrière ce vote de confiance au ministre Hichem Fourati, en le faisant passer pour une confiance en son gouvernement, ce qui est une simple manœuvre. Le gouvernement actuel est en chute libre et a perdu son soutien politique », assure Imed Daïmi. Et d'ajouter : « Je n'ai rien contre Hichem Fourati, qui est une véritable compétence d'après ce que j'ai entendu, mon problème étant l'exploitation de ce département critique. Cette guerre, entre le chef du gouvernement et ses adversaires politiques, n'est pas celle des Tunisiens et nous refusons de faire partie de cette bataille qui reste loin des préoccupations du peuple ».
Après plus de cinq heuresd'interventions, le chef du gouvernement a repris la parole pour répondre aux différents sujets des députés, soulignant que l'objet de la plénière reste le vote de confiance au ministre de l'Intérieur. Youssef Chahed a réitéré, dans son discours, son attachement à l'unité et à l'intérêt de l'Etat.
Les députés sont passés, par la suite au vote. Le nouveau ministre de l'Intérieur, Hichem Fourati a obtenu la confiance de 148 députés. Le vote de confiance a enregistré également 8 abstentions et 13 voix contre. Le chef du gouvernement fût félicité en premier par le président du bloc parlementaire de Nidaa Tounes, Sofiène Toubel qui s'est précipité pour lui faire la bise.