Je le dis d'emblée ! Je ne connais du monde des finances que mon percepteur et de celui des banques que mon banquier. Cependant, je ne saurais ignorer ce que la présence dans un pays quelconque d'un établissement bancaire d'envergure internationale, tel la Banque Africaine de Développement, BAD, en ce qui concerne la Tunisie, peut lui générer comme avantages de toutes sortes. A commencer, pour n'être que prosaïque, par l'emploi procuré à quelque trois cents cadres tunisiens. Et les autres innombrables bénéfices ne peuvent être négligeables si l'on voit l'empressement que les Ivoiriens ont constamment montré pour le retour de cette institution à son siège originel d'Abidjan. A l'occasion des assemblées annuelles des gouverneurs de la BAD qui s'est dernièrement tenu à Arusha -Tanzanie-, les Ivoiriens sont revenus à la charge avec un renfort de poids, celui du Président Alassane Ouattara, en personne, pour défendre leur cause, présenter les assurances et hâter l'opération retour. La présence d'une forte délégation ivoirienne conduite par le chef de l'Etat lui-même est une preuve de l'importance que l'on accorde, en Côte d'Ivoire, à cette question. Pour la Tunisie, l'appréhension du problème est, semble-t-il, toute autre. Nos nouveaux dirigeants sont gagnés à l'idée que la présence de la BAD étant provisoire, il n'est que logique, le moment étant venu, que l'institution retourne à son premier siège. Soit ! Mais quid des intérêts nationaux dans cette affaire ? Pense-t-on, encore, que l'on a bien d'autres chats à fouetter et qu'advienne que pourra ou que devra, quitte à sacrifier les intérêts du pays et ceux des cadres tunisiens que la Banque emploie ? L'on est tenté de le penser sérieusement quand on voit la très mince délégation tunisienne dépêchée ( ?) à Arusha, conduite par M. Alaya Bettaieb, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'investissement et de la Coopération internationale. Qu'y pourra-t-il ? Sans mésestimer ses compétences, il est peu probable qu'il puisse tenir tête aux grands ténors de la finance ivoirienne et à leurs conseillers internationaux. Pourtant la lutte semble âpre. Les Ivoiriens l'ont compris qui, depuis des années, ont multiplié les démarches à travers le monde entier. Le rassemblement du gotha de la finance mondiale à ces assises d'Arusha aurait dû nous inciter à une présence plus massive et autrement active. Mais l'on a la désagréable impression que la Tunisie se sent dépassée et qu'elle se laisse faire. La Tunisie brille, en fait, par sa passivité, si l'on en croit les informations nous parvenant de Tanzanie. Et si les considérations juridiques penchent en faveur de la Côte d'Ivoire, celle-ci entame une lutte politique pour laquelle elle mobilise tous les moyens. Un jeu que les Tunisiens semblent ne plus savoir pratiquer. Pourtant, ces assises représentaient une occasion unique pour les Tunisiens pour imposer l'image nouvelle d'un pays démocratisé et gouverné comme on veut le faire croire avec beaucoup de compétence. On a fait perdre à la Tunisie une excellente opportunité de prouver sa volonté de marquer sa présence active au sein de la communauté africaine. La faible représentation tunisienne et sa participation a priori improductive à cette rencontre cruciale vient démentir les propos tenus par M. Moncef Marzouki, fin janvier, lors du sommet de l'Union Africaine à Addis Abeba selon lesquels « la Tunisie revient en force dans les instances africaines ». Les assises des gouverneurs de la BAD à Arusha viennent nous apostropher sur la position future de notre pays sur l'échiquier politico-économique africain et partant mondial. Quel dommage !!