La commission parlementaire demandera l'avis du Tribunal administratif La présidente de la Commission des droits et libertés au sein de l'ANC, Souad Abderrahim (Ennahdha), est revenue hier au Bardo à la demande de la commission électorale de l'ARP. Sujet de l'audience : le retard accumulé dans la mise en place de l'Instance nationale pour la prévention de la torture. La Tunisie avait en effet signé en juin 2011 le Protocole facultatif à la convention contre la torture (Opact) et qui attend de la Tunisie la mise en place d'une institution préventive contre la torture dans un délai d'une année. L'Assemblée nationale constituante a, par la suite, adopté une loi — loi organique n° 2013-43 du 21 octobre 2013 — portant création de l'Instance, mais faute de temps et surtout de candidatures suffisantes, la commission présidée par Souad Abderrahim n'est pas parvenue à mener sa mission à terme. C'est au nouveau parlement de s'atteler à cette tâche. Les membres de la commission électorale se heurtent néanmoins à quelques soucis d'ordre plutôt technique : faut-il considérer caduques les candidatures déjà reçues et tout refaire? Le manque d'engouement pour cette instance, pourtant importante, avait contraint la Commission des droits et libertés à l'époque de prolonger à trois reprises les délais limites de dépôt des candidatures, sans parvenir à réunir le nombre légal de postulants conformément à la loi (notamment pour la catégorie des cadres de l'enfance et celle des magistrats à la retraite). «Le manque d'incitations financières a peut-être contribué à la désertion de cette instance», explique Souad Abderrahim aux membres de la commission électorale. Candidatures «dépassées»? Mais que faire de ces candidatures qui sont à l'Assemblée? Car du fait du facteur temps, certaines pourraient ne plus remplir les conditions ou encore d'autres personnes pourraient ne plus éprouver le désir de faire partie de l'instance. Plusieurs élus, en tout cas, ont préconisé une réouverture des candidatures pour «refaire les choses sur des bases saines». «La commission n'est pas très enthousiaste à l'idée de reconduire les précédents postulants, a déclaré le président de la commission électorale, Badreddine Abdelkefi. Et les députés ne sont pas opposés à la consultation du Tribunal administratif sur cette question». Mise à part cette problématique procédurale, une autre, de fond cette fois, a été soulevée avec insistance lors de la réunion de la commission. Elle concerne l'article n° six de la loi qui a été votée à la quasi-unanimité par les membres de la défunte Constituante. L'article contesté par les élus de l'ARP est relatif à l'exclusion de ceux qui faisaient partie du RCD. Quid de l'article 6? Ainsi, les nidaistes Mongi Harbaoui, Imed Ouled Jebril (rapporteur de la commission électorale), rejoints par le député de l'UPL Youssef Jouini, ont estimé que «le peuple a dit son mot lors des élections de 2014». «Ce genre d'article a été écrit dans un contexte particulier et paraît aujourd'hui anachronique», considère Mongi Harbaoui. Et Souad Abderrahim de rétorquer : «Notre objectif, à l'époque, n'était pas d'exclure quiconque, mais d'empêcher ceux qui auraient contribué de près ou de loin à des actes de torture de se présenter. Si aujourd'hui vous allez commencer à amender des lois votées massivement, dit-elle, ce ne sera pas un signe rassurant ». Un débat qui pourrait s'amplifier dans les semaines à venir, toujours est-il que le bureau de la commission électorale a décidé d'organiser une table ronde jeudi prochain (après-midi) dans l'ancienne salle de l'Assemblée pour débattre avec des organisations de la société civile de la création de cette instance? A noter que la Tunisie est le premier pays arabe et le quatrième africain à avoir ratifié le Protocole facultatif à la convention contre la torture (Opact). L'Assemblée nationale constituante a reçu au total 140 dossiers de candidature, 95 seulement ont été acceptés. Selon la loi, le nombre de candidatures doit être au moins trois fois supérieur au nombre de postes disponibles.