Bientôt dans les salles, L'âge de raison, de Yann Samuell renvoie une femme d'affaires apparemment accomplie, incarnée par Sophie Marceau, à ses rêves d'enfant et invite les spectateurs estivaux à se remémorer leurs espérances juvéniles. "Chère moi-même, aujourd'hui j'ai 7 ans et je t'écris cette lettre pour t'aider à te souvenir des promesses que je fais à l'âge de raison et aussi te rappeler ce que je veux devenir...". C'est ainsi que débute cette comédie romantique qui flirte avec le conte philosophique. Margaret (Sophie Marceau), femme d'affaires, débordée au planning millimétré, reçoit le jour de ses 40 ans, grâce à un vieux notaire attachant, interprété par Michel Duchaussoy, la lettre qu'elle s'est écrite 33 ans plus tôt. Yann Samuell reprend ainsi le thème de l'enfance, après son premier film Jeux d'enfants (2003) dans lequel le couple formé par Guillaume Canet et Marion Cotillard se provoquait dans une dangereuse escalade du "cap'-pas cap'". Dans L'âge de raison, le scénariste-réalisateur met sans cesse en opposition, aussi bien esthétique que narrative, l'univers ultramoderne, froid et feutré de la vie d'adulte de Margaret à la chaleur provençale de son village d'enfance, Saou dans la Drôme, balayé de poussière et rythmé par les joyeuses facéties de la petite fille qui s'appelait alors Marguerite. Même opposition entre les deux hommes qui chavirent le cœur de Margaret/Marguerite: d'un côté l'amour d'enfance interprété par Jonathan Zaccaï, acteur belge hirsute et mal rasé au regard tendre. De l'autre, son compagnon Malcolm, homme d'affaires lui aussi, joué par l'acteur méconnu Marton Csokas. Hongrois né en Nouvelle-Zélande, il interprète de façon convaincante, avec son accent anglo-saxon et ses faux airs de Clive Owen, un compagnon dépassé par les obsessions soudaines de sa douce. On savoure comme des gourmandises les lettres multicolores et malicieuses de la petite fille et leurs conséquences dramatico-comiques sur la vie de l'adulte. Même plaisir devant l'agrégat foisonnant — trop peut-être ? — des petits trésors de l'enfance que Yann Samuell met à l'écran. Mais le film aborde également les blessures juvéniles ou le manque d'argent, en restant dans le registre de la comédie. Au fil de péripéties qui réveillent autant de questions dérangeantes que de souvenirs délicieux, Margaret prendra conscience que sa vie d'adulte tient davantage d'une réaction à ses peurs d'enfant que d'une concrétisation de ses souhaits de petite fille. Poétique ou mièvre selon les goûts, le film permettra aux amateurs de Sophie Marceau de savourer un film taillé sur mesure et à chacun de se demander s'il est devenu celui ou celle qu'il voulait être.