Un plan d'action sera soumis prochainement à l'approbation du Conseil de sécurité nationale. Il prévoit que les représentations à l'étranger s'attellent à prémunir les jeunes Tunisiens contre les recruteurs jihadistes Quand le président de la République, Béji Caïd Essebsi, a annoncé la guerre contre le terrorisme, on a compris que cette guerre allait être une guerre totale et constituer un tout indivisible où le sécuritaire, le social, le culturel, l'éducatif et l'économique sont interdépendants. Partant du fait que les terroristes ne font pas de choix quand ils visent leurs cibles et s'attaquent à tous les secteurs de la vie, il est normal que la stratégie à mettre en œuvre dans le but de les contrer soit une stratégie multidimensionnelle et que toutes les compétences humaines soient invitées à y participer. Et à observer la dynamique déclenchée, plus particulièrement depuis l'attentat terroriste de Sousse, on remarque que certaines structures étatiques ont changé totalement de méthode d'action et que certaines composantes de la société civile, à l'instar des intellectuels qui tiennent aujourd'hui un congrès national contre la violence, ont compris que l'heure n'est plus à la parlotte ou à la théorisation mais bien à l'action et à la proposition d'idées concrètes et de plans pratiques pouvant contribuer à démasquer les plans diaboliques des terroristes et à éviter que nos jeunes tombent dans leurs filets. Au ministère des Affaires étrangères, la conférence annuelle des ambassadeurs et des consuls, tenue fin juillet, a donné le ton de ce que nos diplomates doivent faire à l'avenir afin de participer activement à la lutte contre l'hydre terroriste. Désormais est né un nouveau concept qui est venu s'ajouter aux concepts traditionnels. Il s'agit de la diplomatie sécuritaire. Nos diplomates ne se contenteront plus de chercher les investissements extérieurs, d'encourager les bailleurs de fonds à choisir la destination Tunisie ou de motiver les Tunisiens résidant à l'étranger à retourner au pays y lancer leurs projets. A l'avenir, les diplomates établis à l'étranger auront la mission d'anticiper en vue de dévoiler, à temps, les actions entreprises par les extrémistes agissant en Europe ou ailleurs en vue d'enrôler les jeunes Tunisiens émigrés, de les embrigader et de les envoyer en Syrie, en Libye ou en Irak rejoindre les jihadistes et s'entraîner au maniement des armes et des explosifs avant de regagner la Tunisie, constituer des cellules dormantes guettant les ordres pour commettre leurs attentats sur le sol national. Quand, fin juillet dernier, cette nouvelle orientation de la diplomatie tunisienne a été dévoilée, beaucoup d'observateurs se sont posé la question : comment va-t-on choisir ces nouveaux diplomates et le ministère des Affaires étrangères dispose-t-il des cadres qui allient l'expérience diplomatique à l'expérience sécuritaire ? La question était légitime quand on sait que nos missions diplomatiques et consulaires n'étaient pas assez outillées aussi bien à l'époque du président déchu ou sous les gouvernements de la Troïka et de Mehdi Jomaâ en compétences qui pouvaient assumer cette mission à merveille. L'on se rappelle bien que nos ambassades ou consulats comprenaient généralement un seul cadre sécuritaire qui s'occupait particulièrement des opposants dans le pays où il exerçait et n'arrivait pas le plus souvent à détecter les mouvements de contestation où les jeunes terroristes s'activaient et ne pouvait pas aussi découvrir l'identité des embrigadeurs qui exerçaient dans de petites villes ou des banlieues qui étaient pratiquement fermées à nos policiers. L'on se rappelle comment, en 2002, un terroriste a réussi à regagner Djerba et à monter son attentat terroriste contre le synagogue de la Ghriba, alors que les services secrets allemands le connaissaient déjà et ont révélé son identité quelques minutes après l'attentat. Une stratégie d'action concertée Aujourd'hui, les choses ont changé et nos ambassades et consulats sont sur le qui-vive pour parer à tous les imprévus grâce précisément à une stratégie d'action élaborée au sein du ministère des Affaires étrangères. «La stratégie va être soumise dans les prochains jours au président de la République, puis au chef du gouvernement. Elle sera examinée lors de la prochaine réunion du Conseil de sécurité nationale. Une fois adoptée par le gouvernement, elle constituera la feuille de route que nos diplomates auront à suivre dans leur action consistant à dévoiler ce que préparent les jihadistes tunisiens établis à l'étranger pour semer le désordre et le chaos sur le sol national», a déclaré, hier, Taïeb Baccouche, ministre des Affaires étrangères. Le ministre n'a pas voulu livrer les détails de cette stratégie d'action, estimant qu'elle doit rester confidentielle. Et en attendant qu'elle soit adoptée et porte ses fruits, l'on ne peut que s'en féliciter. Seulement, cette démarche ne peut aboutir qu'à condition qu'elle soit en harmonie avec ce qu'entreprennent les autres ministères ayant un rapport avec les Tunisiens à l'étranger. C'est le cas du ministère des Affaires sociales qui organise, aujourd'hui, sous la présidence du chef du gouvernement, Habib Essid, le forum annuel de nos compatriotes à l'étranger. Malheureusement, le programme des communications qui seront données à cette occasion ne comprend aucune intervention sur la sécurité ou le phénomène des terroristes établis à l'étranger et des recruteurs jihadistes qui sont aux trousses de nos jeunes en Europe.