Il s'agit de l'African Leadership Academy qui offre l'opportunité aux jeunes Africains de 15 à 19 ans, toutes nationalités confondues, d'acquérir une formation internationale et d'accéder aux plus prestigieuses universités du monde. A une condition : revenir au pays d'origine, ou un autre pays africain, pour le faire bénéficier pendant dix ans de son savoir et savoir-faire acquis tout au long du cursus ALA et du parcours universitaire à l'international. A ce jour, 25 jeunes Tunisiens sont passés par l'académie Pour beaucoup de jeunes Africains qui ne disposent pas des moyens financiers nécessaires pour accéder aux universités américaines ou européennes, mais ont l'ambition, la détermination et les capacités intellectuelles et scientifiques pour y réussir, l'ALA leur offre un espoir, celui de réaliser, peut-être, leur rêve. Ce dernier est bien sûr celui d'obtenir un diplôme de l'une des plus prestigieuses universités au monde, américaine ( Harvard, Yale, Duke...), anglaise (Oxford, College de Londres) ou française (Sorbonne, Notre Dame) et se tracer ainsi la voie vers un avenir rêvé et couru par la plupart des jeunes qui s'accrochent aux études, l'ascenseur social, malgré les difficultés, les contraintes et le manque d'opportunités dans le pays d'origine, comme c'est le cas dans la plupart des pays africains. Des jeunes déterminés et passionnés Comment dénicher les futurs leaders ? Où les trouver ? Quel cursus scolaire et universitaire doivent-ils suivre ? Quel avenir leur suggérer ? L'African Leadership Academy, une institution éducative à l'américaine siégeant à Johannesburg (Afrique du Sud) en a fait sa mission et sa raison d'être. Objectif : contribuer à la valorisation des ressources humaines de l'Afrique et au renforcement de leurs compétences en termes de bonne gouvernance. En d'autres termes, aider les jeunes Africains à sauver l'Afrique. « La source de tous les problèmes de ce continent est l'absence du bon leadership. Car quand on a de bons leaders, de bons dirigeants, ils peuvent et savent trouver les solutions adéquates », indique M. Elmahdi Oummih, directeur pour l'Afrique du Nord au sein de l'ALA. Les principales tares de l'Afrique sont connues : pauvreté, corruption, épidémies, chômage, migration clandestine, conflits ethniques remplacés plus récemment par le terrorisme. Des tares endémiques bien que l'Afrique dispose également d'un grand potentiel de développement. Ses richesses naturelles ne sont plus en effet ignorées. Elles sont même visées et sollicitées par les puissances économiques. D'ailleurs, les pays africains qui ont misé sur la croissance n'ont pas été déçus. Mais combien sont-ils ? Une minorité. Si bien que le continent noir continue d'être le parent pauvre de la planète. Contribuer au développement de son pays Les pays industrialisés ont compris, eux, depuis deux décennies au moins, que l'avenir du monde est en Afrique. Un potentiel remarquable de terres, de matières premières et d'énergie à exploiter, ainsi que des personnes ressources, hommes et femmes, à encourager et à soutenir, pour le développement de l'Afrique, certes, mais également pour la durabilité de la croissance mondiale. Et c'est la raison d'être de l'ALA, comme le souligne M. Oummih, un membre du réseau de recruteurs qui sillonnent le continent. Il s'agit d'une organisation à but non lucratif, fondée en 2004 par un groupe de quatre personnes venant du monde du buisness et celui de l'enseignement : un Américain Christopher Bradford, un Ghanéen Frederick Swaniker, un Allemand Peter Mombaur et un Camerounais Acha Leke. L'idée des quatre fondateurs est qu'à travers une formation de qualité et ciblée dispensée à de jeunes Africains passionnés et déterminés, on peut changer la face de l'Afrique et augmenter ses chances de sortir de l'image stéréotypée d'un continent à la dérive, sans avenir, du moins pour ses enfants. Ainsi, les élèves identifiés et sélectionnés doivent être âgés entre 15 et 19 ans, venant de tout le continent et démontrant un potentiel de leader, une détermination à réussir et une passion pour l'Afrique dans le sens où ils ambitionnent de contribuer au développement de leur pays et, partant, de l'Afrique. Apprendre à diriger, à créer et à aider L'ALA, un lycée (avec pensionnat) de renommée internationale, prodigue aux élèves pendant deux ans deux catégories d'enseignement. L'un académique (mathématiques, sciences et langues) et l'autre garantissant une initiation au leadership, à l'entrepreneuriat et à une bonne connaissance de l'histoire de l'Afrique, couronné par un baccalauréat international (Cambridge A-level). A noter que la sélection est drastique car elle porte autant sur le niveau scolaire que sur les capacités intrinsèques de l'élève à devenir un leader. Pour ce faire, un entretien psychotechnique est prévu dans le travail de sélection des candidats. Sur 400 candidats, seuls 10 à 15 devraient être retenus. « Un bon leader respecte les principes de bonne gouvernance, il doit donc être intègre et humain, c'est pourquoi dans le programme de l'académie, l'élève est aussi initié aux activités citoyennes et aux projets qui servent la communauté locale ». Une fois le bac en poche, l'élève peut accéder aux meilleures universités du monde grâce à une équipe de conseillers d'orientation travaillant en coordination avec les bureaux des admissions de ces universités. En chiffres, l'ALA cible une centaine d'élèves par an de différentes nationalités avec l'objectif ultime de former six mille leaders africains en cinquante ans. Jusque-là, 25 Tunisiens, filles et garçons, sont passés par l'Académie africaine de leadership. M. Elmahdi Oummih, qui était la semaine dernière en tournée en Tunisie (Tunis, Sousse, Monastir, Jemmal, Gabès...) pour identifier de nouveaux candidats pour la rentrée 2016-2017, précise que les élèves tunisiens sont sérieux et ont réalisé d'excellents résultats. Dix d'entre eux ont décroché des bourses complètes des universités américaines (Yale, Davidson University, Columbia university...). Pas d'obstacle financier Volet financement, les cours à l'ALA coûtent 35 mille dollars US (environ 70 mille dinars) par an, mais les élèves qui ne peuvent pas les payer ne s'acquittent que d'une partie symbolique calculée en fonction des moyens de la famille (calcul sur la base des revenus des parents). C'est l'opportunité qu'offre l'académie africaine aux jeunes qui sont bloqués dans leurs ambitions et dans leur carrière à cause de l'argent, pour le dire simplement. Mais à une condition : une fois le diplôme universitaire en poche, l'étudiant revient dans son pays, ou un autre pays africain, pour y travailler pendant dix ans. Cette condition répond aux critiques adressées à l'académie accusée d'encourager la fuite des cerveaux. « Nous formons au contraire des cerveaux pour qu'ils travaillent en Afrique. Il leur est interdit de rester aux USA ou ailleurs. C'est donc du donnant-donnant. Nous cherchons à ce qu'ils fassent bénéficier leurs pays du savoir et de l'expérience qu'ils ont acquis. Donc, nous ne faisons pas non plus de la charité », précise M. Oummih. Tout étudiant qui voudra rompre le contrat devra alors payer le crédit (70 mille dollars) et les intérêts sur dix ans. L'avenir est l'Afrique Le représentant américain d'origine marocaine explique encore que les relations de l'élève avec l'ALA ne s'arrêtent pas après l'obtention du diplôme mais se poursuivent même au-delà de l'université dans le cadre d'une orientation professionnelle pour l'avenir. Autrement dit, prospection de stages dans divers pays et/ou encadrement et conseils pour monter des projets dans son propre pays. « Ce programme de formation de leaders africains vise à terme l'émergence d'entrepreneurs dans tous les domaines (engineering, agriculture, architecture, médecine, musique, peinture...) afin de créer des projets dans les pays africains, des projets créateurs d'emplois et de richesses », ajoute-t-il. « C'est un moyen de lutter contre le chômage et la précarité en Afrique ». Certains observateurs s'interrogent sur les motivations des fondateurs de l'ALA et de ses sponsors ainsi que les universités surtout américaines qui accordent des bourses entières. Selon M. Oummih, il y a là un sentiment de fierté de « produire » des leaders pour tout un continent : l'Afrique, tout particulièrement, qui cesse d'être la chasse gardée de la France pour paraître comme le futur eldorado des Américains, des Chinois, des Turcs et d'autres encore. Pour ces futurs gros investisseurs, des leaders entrepreneurs locaux formés dans les plus grandes universités du monde seront à n'en point douter des partenaires de taille, compétents et rodés au marketing politique et économique international.