Les accidents industriels, aussi bien dans le monde qu'en Tunisie, sont responsables de catastrophes qui portent atteinte à l'homme, aux biens et à l'environnement Les produits chimiques et les solvants utilisés en grandes quantités dans certaines entreprises tunisiennes ont un impact négatif sur la santé des travailleurs. D'où la nécessité de renforcer le dépistage et la surveillance au niveau des lieux de travail. De nombreux chefs d'entreprise, notamment ceux qui opèrent dans le secteur de la chimie et des industries connexes, n'ont pas encore pris les dispositions préventives nécessaires pour éviter à leurs employés les maladies liées au risque en question. C'est pourtant ce qui contribue à renforcer le taux d'absentéisme pour raison de maladie tel qu'il a été enregistré au cours des dernières années. Ces entreprises ont connu aussi une baisse de productivité et un manque de compétitivité. Lors du 9e congrès national de médecine du travail, qui a été organisé à Hammamet les 10 et 11 décembre 2015 par la Société tunisienne de médecine du travail, l'état des lieux et les dispositions réglementaires nationales et internationales en matière de risque chimique ont été évoqués. M. H.Hamzoui, spécialiste dans le domaine de la santé et la sécurité au travail, a appelé les autorités compétentes à mettre en place une réglementation spécifique au risque chimique en milieu professionnel. A noter que 10.234 entreprises exercent directement dans l'industrie chimique. De plus, 85% de ces entreprises sont de petite taille, dans la mesure où elles font travailler moins de dix salariés. Certes, le Code du travail précise l'obligation de l'employeur et celle de l'employé en matière de prévention contre le risque chimique. C'est une responsabilité partagée entre les deux parties dans l'entreprise. Une réglementation insuffisante D'autres textes juridiques comme la loi 94-28 ont évoqué aussi le risque chimique. L'orateur estime, cependant, que «la réglementation actuelle est incohérente et insuffisante». Elle ne répond pas non plus aux exigences internationales. D'où la nécessité de mettre en place une réglementation spécifique aux risques chimiques. Des conventions internationales ont d'ailleurs été ratifiées, dont certaines concernent le risque chimique, et les pays sont tenus de s'y conformer. La réglementation internationale se base aussi sur l'harmonisation de l'étiquetage et les directives européennes dans ce domaine. Au niveau national, un projet de décret est en cours d'élaboration et va traiter de tous les aspects relatifs au risque chimique. M. Mohamed Larbi Masmoudi, spécialiste dans ce domaine, a axé son intervention sur l'évaluation du risque chimique, rappelant que les accidents industriels, aussi bien dans le monde qu'en Tunisie, sont responsables de catastrophes qui portent atteinte à l'homme, aux biens et à l'environnement. Il a proposé de «changer d'approche pour éviter le risque chimique en anticipant et en effectuant une surveillance et un dépistage a priori». L'évaluation du risque chimique est l'étape essentielle, estime l'orateur. L'approche à appliquer doit être réfléchie, probabiliste, raisonnée et rationnelle. De plus, il faut mettre en place les moyens de prévention, assurer le suivi, la traçabilité et le classement des risques par ordre de gravité et d'importance. Une stratégie nationale en cours De son côté, M. Ammar Youmbaï, ministre des Affaires sociales, a insisté sur la nécessité d'améliorer les prestations offertes en milieu professionnel en mobilisant, à cet effet, les différents spécialistes comme les médecins du travail, les inspecteurs... Il a rappelé que le Bureau international du travail (BIT) a élaboré un guide qui concerne le corps des inspecteurs du travail des différentes catégories. L'objectif consiste à effectuer une visite d'inspection dans chaque entreprise au moins une fois par an pour constater de visu l'état des lieux et s'assurer qu'elle dispose des moyens nécessaires en vue de la prévention et la protection des travailleurs, conformément aux recommandations du guide précité. Le ministre a relevé, par ailleurs, que le ministère dispose d'une stratégie dans le domaine de la santé et la sécurité au travail qui fixe plusieurs objectifs à atteindre par les intervenants concernés. Ladite stratégie couvre tous les travailleurs comme ceux qui exercent dans le domaine du bâtiment et des travaux publics qui ont bénéficié l'année écoulée des dispositions prévues. Le résultat a été satisfaisant, puisque le nombre d'accidents a diminué sensiblement. Cette année, ce sont les travailleurs en contact avec les matières chimiques qui sont ciblés. Au cours de la première journée du congrès, la pollution par solvants a été également traitée. Ces produits sont considérés comme un problème de santé publique dans le monde, vu leur caractère très nocif. Une étude a été élaborée à ce sujet. Ces solvants sont importés par la Tunisie en grandes quantités pour les besoins de l'industrie. Il s'est avéré que 23,4% des travailleurs déclarés sont exposés à ce produit. L'industrie chimique et le secteur du cuir et chaussures sont les plus concernés par les risques liés aux solvants.