Le projet du code des investissements ne fait pas l'unanimité. Pour en déterminer les limites, une rencontre, organisée par la Chambre tuniso-allemande de l'industrie et du commerce (AHK), a eu lieu entre les députés de la région de Bizerte et les chefs des entreprises allemandes opérant dans la région. Compte rendu Ce rendez-vous, voulu par les députés et favorablement accueilli par les investisseurs, a été une occasion pour ces derniers d'exposer leurs griefs et leurs craintes et pour les élus de mieux appréhender les attentes et espoirs des promoteurs dont certains sont présents en Tunisie depuis quatre décennies. Le nouveau projet du Code des investissements ne suscite pas un enthousiasme débordant, loin s'en faut. A entendre les quinze représentants d'entreprises, l'unanimité semble faite contre le code et tout le monde s'accorde à assurer qu'il recèle des mesures contre-productives, voire nuisibles, pour leurs sociétés. Levée de boucliers De nombreux témoignages ont fait un parallèle entre le climat des affaires avant et après la révolution, mettant l'accent sur la sérénité et sur les conditions propices au travail de naguère et sur le climat délétère et le marasme qui règnent actuellement. Pour ces investisseurs allemands, dont la majorité continue à avoir confiance en la Tunisie, le projet du nouveau Code des investissements était attendu avec beaucoup d'espoir et une certitude qu'il allait «tenir compte de la difficile conjoncture internationale et intérieure», afin d'améliorer les conditions de travail, de mettre au point des mécanismes permettant aux entreprises totalement exportatrices (ETT), notamment de faire face à une concurrence internationale de plus en plus féroce. D'autant que, selon eux, plusieurs facteurs ont fait que la Tunisie a perdu sa compétitivité vis-à-vis de pays concurrents. Les intervenants citent à ce propos l'instabilité sociale, la dégradation de l'infrastructure, les augmentations salariales non accompagnées d'une amélioration de la productivité, une administration indécise et laxiste. Ambiguïtés et mesures inopportunes Cependant, a-t-on fait remarquer, le projet du code des investissements a été décevant à plus d'un titre. Il aurait, selon l'assistance, ignoré toutes ces données objectives et apporté nombre de propositions dont la clarté et la précision ne sont pas les principales qualités : plusieurs oublis, ambiguïtés dans les formulations, approximations dans les approches...Pour ces industriels, les mesures prises sont dommageables pour leurs entreprises et ne permettraient pas, telles qu'elles sont envisagées, de prendre la juste mesure des enjeux dont le recouvrement par la Tunisie du statut de pays fortement performant et compétitif. Et il semble que la mesure la moins bien accueillie, franchement malvenue est la loi d'imposition (IS) des sociétés totalement exportatrices lesquelles, selon les nouvelles dispositions financières, auront à s'acquitter d'un impôt de 10% sur les bénéfices auxquels viendront s'ajouter des impositions de 5% sur les dividendes. C'est plus que n'en peuvent admettre les industriels qui voient en cette nouvelle disposition un obstacle certain à l'augmentation de la production, à l'amélioration de la compétitivité et essentiellement à la capacité de soutenir la compétitivité des produits concurrents. L'on appelle tout simplement et dans une parfaite unanimité à un gel de cette disposition pour une période allant de cinq à dix ans, en tout cas dans l'attente d'une conjoncture moins difficile. Aux députés de convaincre les décideurs Un autre point a été soulevé, critiquant sévèrement l'attribution à une commission des décisions d'octroi des avantages dus aux ETT, ce qui pour eux ne pourra qu'encourager le vol d'idées, la facilitation de la corruption, la prolongation des démarches préparatoires, le manque de transparence... Enfin, les participants insistent sur la nécessité qu'il y aura à mettre en place un plan national visant à assurer la protection des sites de production des sociétés totalement exportatrices ainsi que de leurs locaux. Les investisseurs étrangers, à travers leurs représentants membres de l'AHK, ont exprimé leur détermination à se maintenir en Tunisie et à œuvrer pour la résolution des problèmes socio-économiques du pays. Cependant, ils ne réclament ni plus ni moins qu'un Code des investissements qui ne lèse pas leurs intérêts ni n'affecte leurs capacités de compétitivité. Certains décrets du projet du nouveau code gagneraient à être revus, corrigés, précisés, élucidés. Les députés de la région de Bizerte, dont la volonté est affichée, sont appelés à transmettre leurs doléances aux autorités et à défendre leurs points de vue » pour l'intérêt commun et surtout celui de la Tunisie qui est confrontée actuellement à une forte concurrence internationale en matière d'attractivité des IDE et qui devrait faire preuve de souplesse et surtout de réalisme pour garder « ses » entreprises étrangères.