Tous ces consultants économiques présentés, faussement, comme experts répètent les mêmes constats et les mêmes conclusions quand on leur demande leur point de vue à propos des problèmes économiques de la Tunisie. Ils disent pratiquement la même chose, proposent d'une façon pas très innocente les mêmes « solutions », en orientant le téléspectateur ou l'auditeur vers une seule et unique idée : le grand marasme économique du pays et les dysfonctionnements macro du budget sont causés par le secteur public, essentiellement les fonctionnaires. Et ce fameux concept de masse salariale jugée exagérée par rapport au PIB et au budget de l'Etat. Cette idée réductrice frôlant même la « débilisation » donne lieu à un seul paradigme économique post-crise : licencier le maximum de fonctionnaires sous forme de retraite anticipée par exemple, ainsi le budget de l'Etat retrouvera son équilibre et la machine économique enrouée redémarrera. Est-ce des hypothèses bien étudiées et plausibles venant de soi-disant grands experts qui, en fait, représentent, en bonne partie, les grands holdings et centres d'intérêt avides de mettre la main sur tous les secteurs pour se substituer au monopole de l'Etat en créant des cartels et des groupements monopolistiques suspicieux ? Ces 650.000 fonctionnaires dont on se plaint jour et nuit ne font-ils pas leur travail ? Est-ce qu'ils ne payent pas leurs impôts ? Est-ce qu'ils n'ont pas sauvé et sauvent encore les services publics de l'effondrement malgré tous les reproches ? Ces gens permettent au pays de fonctionner, leurs salaires ne sont pas si élevés avec des grilles qui bougent plus lentement que le taux d'inflation. Aussi, faut-il souligner que la fonction publique s'articule autour de la sécurité, la défense, l'éducation, la santé et toutes ces fonctions stratégiques pour qu'un Etat joue son rôle « régalien ». Même les fonctionnaires des entreprises publiques ( les autres composantes du secteur public) ne sont pas tous reprochables : ils travaillent dans des entreprises publiques mal gouvernées, victimes de choix économiques désastreux depuis des décennies. Au lieu de mettre le doigt sur les vrais problèmes de blocage des sites de production, de la diminution de la productivité due en bonne partie à l'organisation du travail, de la corruption, du gaspillage des ressources, des inégalités salariales dans les entreprises publiques, de la cadence de l'investissement public au point mort et de l'attractivité faible envers les investisseurs étrangers, on ne fait que résumer naïvement le problème en la masse salariale de ces fonctionnaires, vrais soldats de l'Etat et qui, dans les ministères les départements étatiques jouent en grande partie un grand rôle dans des conditions précaires et sans la moindre motivation. Au lieu de chercher à réduire l'effectif de la fonction publique et de vider l'administration de ses compétences, passons à un diagnostic honnête des vrais problèmes économiques du pays. Pensons à augmenter le PIB et à créer plus de richesse. Pensons à améliorer la qualité des services publics pour aider le secteur privé et pensons surtout à une équité fiscale où les citoyens paieraient leurs impôts, surtout ceux qui se cachent derrière leur puissance économique et le régime forfaitaire pour fuir leur devoir fiscal. Et prière, ménagez les fonctionnaires, ça devient désobligeant !