Radhia Nasraoui et Imène Trigui n'ont pas reçu l'aval des députés. La bataille pour la présidence de l'Instance sera serrée entre Dhiaeddine Mourou et Massaoud Romdhani L'Instance nationale pour la prévention contre la torture a, enfin, vu le jour. Mercredi, Mohamed Ennaceur a annoncé la liste des 16 membres qui composeront le conseil de l'Instance. L'annonce est intervenue au bout de deux jours d'âpres débats, de déclarations crues et d'échanges d'accusations au sein de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) où les mécontents des résultats auxquels a abouti l'opération-élection des membres de l'Instance n'ont pas caché leur déception et leur colère de voir les candidats que leurs partis soutiennent déboutés. Et on est revenu à la rhétorique des accusations selon lesquelles les députés votants ne font qu'appliquer les ordres de leurs partis, principalement ceux de la coalition au pouvoir qui ont «avalisé des candidats connus pour leur soutien au terrorisme». Ammar Amroussia, le député du Front populaire, ne mâche pas ses mots et assure bien avant même que les 16 membres du conseil de l'Instance ne soient connus : «La politique des quote-parts est revenue en force et l'opinion publique sera déçue quand elle découvrira que parmi les membres de l'Instance, il existe des noms qui n'ont aucun rapport avec les droits de l'Homme. Pire encore, leur présence sur la liste des candidats constitue une insulte manifeste aux droits de l'Homme, à la liberté et à la démocratie». Seulement, le député frontiste ne précise pas l'identité des candidats qu'il considère comme louches. Toutefois, il ne manque pas de prophétiser que l'Instance n'ira pas loin puisqu'il est convaincu qu'elle «ne disposera pas des mécanismes et des moyens humains et logistiques pour exercer sa mission comme c'est le cas pour d'autres instances à l'instar de l'Instance nationale de lutte contre la corruption présidée par Me Chaouki Tabib». Radhia Nasraoui et Imène Trigui déboutées Et pour revenir à l'opération électorale des membres de l'Instance, il est à rappeler que les observateurs étaient suspendus à l'issue de la bataille que se livraient à distance Radhia Nasraoui, présidente de l'Organisaiton tunisienne de lutte contre la torture, Imène Trigui, présidente de l'Association liberté et équité, et Dhiaeddine Mourou, fils de Abdelfattah Mourou, premier vice-président de l'ARP et ancien président de l'Association des jeunes avocats. La question qu'on se posait avant que les députés ne fassent leurs choix était la suivante : qui parmi ces trois candidats donnés d'avance gagnants présiderait l'Instance ? Et les résultats annoncés, hier, de rendre cette question caduque puisque Radhia Nasraoui et Imène Trigui n'ont pas reçu l'aval des députés votants et seul Dhiaeddine Mourou a été élu parmi les représentants des organisations et des associations de défense des droits de l'Homme. Les calculs et les pronostics quant à la personnalité la plus indiquée pour présider l'Instance se trouvent bousculés dans la mesure où les 16 candidats élus ne dégagent pas, selon plusieurs analystes, «une personne qui pourrait bénéficier du consensus». La compétition sera, semble-t-il, serrée entre Dhiaeddine Mourou, soutenu par Ennahdha, même si les nahdhaouis jurent qu'ils n'ont pas de candidat préféré, et Massoud Romdhani, le membre influent du Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes), appuyé par la gauche qui n'est pas prête à subir une nouvelle défaite après l'échec de Radhia Nasraoui. Il est à préciser que contrairement aux autres instances comme l'Instance vérité et dignité et l'Instance de lutte contre la corruption, les membres de l'Instance nationale de prévention de la torture ne percevront ni salaires ni primes. Seul le président de l'Instance aura droit à une prime égale à celle que perçoit un secrétaire d'Etat et aux avantages matériels inhérents à son poste. Il est à noter également que ce sont les 16 membres de l'Instance qui éliront leur président, selon l'article 8 de la loi organique 43/2013. Ils ont à choisir le président sur la base du consensus, ou de l'élection, le cas échéant, sur la base de la majorité absolue. En cas d'égalité des voix, c'est le candidat le plus âgé qui sera déclaré vainqueur. Les 16 membres de l'Instance Les membres de l'Instance se répartissent en six catégories. Il s'agit de: – Catégorie organisations et associations de défense des droits de l'Homme : Massoud Romdhani, Lotfi Ezzeddine, Afef Chaâbane, Dhiaddine Mourou, Maroua Raddadi et Hamida Dridi. – Catégorie des universitaires spécialistes des questions sociales : Radhia Halouani et Fethi Jaray. – Catégorie des spécialistes dans la protection de l'enfance: Saida M'barak. – Catégorie des magistrats retraités : Touhami Hafi et Nabiha Kéfi. – Catégorie des avocats: Tahar Kadachi et Noura Kouki. – Catégorie des médecins : Slim Annabi, Lamia Fathallah et Mohamed Yassine Binouss.