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La formalisation des travailleurs informels, un réservoir majeur de ressources pour la CNSS : Comment mobiliser 3.000 millions de dinars en l'espace de cinq ans ?
Publié dans La Presse de Tunisie le 23 - 01 - 2023

La trappe de l'informalité confine les travailleurs informels dans la précarité et la pauvreté, tout en privant la Caisse de sécurité sociale de ressources additionnelles substantielles, faisant face depuis plus d'une décennie à un creusement continue de son déficit financier.
Durant ces dernières années, la Tunisie ne cesse d'afficher des niveaux d'informalité relativement élevés, qui seraient source d'inquiétudes sérieuses au regard d'une économie engluée dans un marasme profond, doublé d'une crise d'endettement intérieur et extérieur. Il s'agit d'un phénomène complexe à multiples facettes, aux conséquences majeures, en l'absence de tout signe indiquant une reprise solide à l'horizon sur les équilibres macroéconomiques, la productivité, les inégalités et la pauvreté.
Face à ce constat alarmant, le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), en partenariat avec l'Organisation internationale du travail (OIT), vient d'élaborer une étude sur « L'économie informelle en Tunisie : définitions, analyse exploratrice et esquisse d'une stratégie intégrée », à l'heure où plus de 900 mille travailleurs en 2020 ont occupé des emplois informels dans notre pays, tout en étant piégés dans des activités à faible productivité, génératrices de faibles revenus.
Emploi : l'informalité dépasse les 26%
La lutte contre l'emploi informel ne se réduit pas seulement à l'agenda de l'emploi décent et à une insertion des travailleurs informels sur le marché du travail formel mais aussi à un instrument permettant d'améliorer la viabilité financière des régimes assurantiels de sécurité sociale.
Dans ce cadre, l'Etat tunisien a déployé des efforts insignes, notamment après l'Indépendance, afin d'étendre la couverture sociale à l'économie informelle. Toutefois, et en dépit de ces efforts, les niveaux d'informalité sur le marché du travail, définis à l'aune de l'absence de sécurité sociale, pointent encore à des niveaux élevés. Parlons chiffres, les effectifs des travailleurs informels en 2020 ont été estimés aux alentours de 917 mille, ce qui correspond à un taux d'informalité de l'ordre de 26,8%.
Ces effectifs informels pris dans leur totalité pourraient être perçus comme un gisement de ressources de cotisations sociales potentiellement mobilisables par la Cnss. Force est de rappeler, par ailleurs, que la Cnss fait face depuis au moins une décennie à un creusement inquiétant de son déficit financier qui a atteint 1.047 MD en 2020 contre 667 MD en 2019.
Quels facteurs prendre en considération ?
De multiples facteurs sont régulièrement évoqués comme étant responsables de la situation critique de la Cnss, dont particulièrement la maturité du régime des salariés non agricoles (Rsna), la sous-couverture qui a pour corrélat l'expansion de l'informalité sur le marché du travail en Tunisie et la problématique liée à la faiblesse des densités de cotisation.
Théoriquement, le manque à gagner de la Cnss pourrait être estimé sur la base des cotisations sociales non collectées de tous les travailleurs évoluant au sein de l'économie informelle estimée aux alentours de 917 mille selon les estimations de la présente étude. Or, une importante proportion de ces travailleurs serait à court de capacités productives, c'est-à-dire, au regard du niveau de leurs revenus, salariaux ou non salariaux, et des niveaux légaux d'imposition sociale, ces travailleurs seraient dans l'incapacité de s'affilier et de cotiser à un régime de sécurité sociale.
De même, il convient de distinguer dans l'approche utilisée pour estimer le manque à gagner en cotisations sociales, entre le potentiel mobilisable auprès des travailleurs informels dans le secteur non agricole et ceux évoluant dans le secteur agricole. Il va sans dire qu'il serait plus facile d'induire des changements qui se traduisent par des trajectoires de formalisation dans le secteur non agricole que dans le secteur agricole.
Pour toutes ces considérations, l'étude a adopté le salaire moyen déclaré à la Cnss pour l'estimation des gisements de cotisations sociales pouvant être recouvertes pour les salariés non agricoles. Pour les travailleurs agricoles, salariés et non-salariés, l'estimation du manque à gagner a été réalisée sur la base du Smag mensuel relatif à l'année 2020.
Quant aux indépendants, conformément aux dispositions du décret n° 95-1166 du 3 juillet 1995, relatif à la sécurité sociale des travailleurs non salariés dans les secteurs agricole et non agricole, les cotisations sont assises sur un revenu forfaitaire affecté du coefficient multiplicateur correspondant à la classe à laquelle appartient l'assuré.
Pour les travailleurs non salariés du secteur non agricole, le revenu forfaitaire est déterminé par référence au Smig afférent au régime de 48 heures par semaine rapporté à une durée d'occupation de 2.400 heures par an. Le revenu forfaitaire qui a été retenu pour les travailleurs du secteur agricole est déterminé par référence au salaire minimum agricole garanti (Smag) rapporté à une durée de travail de 300 jours par an.
Les classes de revenu minimum sur la base desquelles le règlement des cotisations est effectué sont déterminées en fonction de l'activité professionnelle de l'affilié et spécifiées dans l'arrêté du ministre des Affaires sociales du 7 juillet 1995, relatif au classement des travailleurs non salariés dans les secteurs agricole et non agricole.
Une tendance vicieuse
L'étude constate, étonnamment, que 88,8% des affiliés au Régime des indépendants non agricoles (Rina) en 2020 ont choisi la première classe de revenu pour effectuer le versement de leurs cotisations, contre seulement 2,8% pour la classe 2, 3,4% pour la classe 3 et 0,2% pour la classe 10. Ces données révèlent d'une manière évidente l'ampleur du phénomène de la sous-déclaration des revenus par les indépendants afin de réduire la charge de cotisation, privant ainsi la Cnss de ressources substantielles. C'est aussi déconcertant de constater que 88,9% des indépendants appartiennent à la catégorie des artisans et des petits métiers. Il s'agit, en toute vraisemblance, d'unités de production informelle qui constituent le noyau dur du secteur informel en Tunisie.
L'exploration des données de la Cnss pendant la période s'étalant de 2010 à 2020 met en relief une aggravation de cette tendance vicieuse qui traduit l'étendue de la fraude sociale et fiscale en Tunisie. En effet, la part des affiliés au Rina de la classe 1 est passée de 83,5% en 2010 à 83,7% en 2015 pour s'établir aux alentours de 89% en 2020. Cela atteste d'une recrudescence de comportements informels auprès des indépendants dans le secteur non agricole au cours de la dernière décennie.
Ainsi, l'étude retient une hypothèse de base minimaliste qui énonce que tous les affiliés du régime des indépendants agricoles et non agricoles retiendront la première classe de revenus pour le calcul de leurs cotisations.
Quel manque à gagner pour la Cnss ?
Pour répondre à cette question, l'étude retiendra trois scénarios pour estimer les gisements de ressources dont dispose la Cnss. Le premier scénario repose sur l'estimation du manque à gagner total qui serait totalement mobilisable au cas où les autorités parviendraient à réussir la formalisation de tous les travailleurs informels. Une hypothèse qui serait loin d'être réaliste au regard de la situation actuelle et des capacités de contrôle et d'inspection des entreprises, manifestement limitées, de la Cnss. Les deux autres scénarios, certes moins ambitieux mais plus réalistes, tablent sur des objectifs de formalisation de l'ordre de 50% et puis de 20%.
En effet, le premier scénario pourrait être interprété doublement comme étant l'estimation du manque à gagner total et aussi le réservoir de cotisations à recouvrer dans le cas d'une formalisation totale de tous les travailleurs informels. Les estimations réalisées démontrent que les salariés non agricoles, assujettis au Rsna, constituent le levier le plus puissant de mobilisation de cotisations ; le gisement de cotisations sociales atteindrait 836.7 MD pour S1, 418.3 MD pour S2 et 167.3 MD pour S3.
En dépit de l'adoption d'une hypothèse strictement minimaliste, les résultats illustrés dans le tableau suivant attestent de l'existence de gisements de ressources considérables à mobiliser moyennant la formalisation des travailleurs non salariés dans le secteur non agricole. Les montants à recouvrer seraient de l'ordre de 323.3 MD pour S1, 166.1 MD pour S2 et 66.5 MD pour le cas de S3. Il importe de constater, par ailleurs, que la formalisation des travailleurs agricoles salariés et non salariés serait loin de constituer un réservoir majeur de ressources de cotisations pour la Cnss, en comparaison du potentiel de levée de ressources que constitue la formalisation des travailleurs dans le secteur non agricole.
En tenant compte des différentes hypothèses sous-tendant les trois scénarios, l'étude suggère que le manque à gagner total pour l'année 2020 serait au moins égal à 1.349,7 MD, ce qui correspond à 131% du déficit financier de la Cnss et 38,3% des recettes techniques. Pour les deux derniers scénarios, les montants mobilisés représenteraient successivement 66% et 19,1% du déficit financier de la Cnss et puis 26% et 7,7% des recettes techniques.
En adoptant une hypothèse réaliste, le scénario 2 permettra à la Cnss de mobiliser au moins 3.000 MD en l'espace de cinq ans.
Il s'agit incontestablement d'une preuve de taille quant à l'existence de gisements substantiels dans lesquels la Cnss est appelée à puiser en vue de mobiliser des recettes annuelles supplémentaires de cotisations sociales. Cette démarche, couplée à d'autres mesures visant la révision des paramètres de liquidation des pensions, est susceptible à moyen terme de lisser les taux de cotisation d'équilibre et d'atténuer sensiblement les pressions lancinantes pesant sur les équilibres financiers de la Cnss.
Ce gisement potentiel de ressources pourrait être mobilisé à travers la mise en œuvre d'une stratégie multidimensionnelle par la Cnss et le ministère des Affaires sociales, recommande l'étude.


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