Alors que la situation s'arrange sur plusieurs volets, dont l'amélioration du cadre législatif et la volonté politique réaffirmée, le traitement des affaires de corruption par la justice tunisienne est perçu par l'organisation I Watch comme un hic dans ce processus. L'organisation « Transparency International » vient de publier son indice de perception de la corruption dans lequel figurent 176 pays. La moyenne mondiale est de 43 points et celle de la zone Moyen-Orient et Afrique du Nord 38 points. La Tunisie a obtenu 41 points et a été classée au 75e rang. Elle reprend ainsi les trois points qu'elle avait perdus en 2015. C'est qu'en 2015, elle a eu 38 points et s'était classée 76e, contre 41 points en 2014 pour une 79e place. Parmi les pays arabes, elle se positionne à la septième place, derrière les Emirats arabes unis, 24e mondial avec 66 points, le Qatar, 31e avec 61 points, la Jordanie, 57e avec 48 points, l'Arabie Saoudite, 62e avec 46 points, Oman, 64e avec 45 points, et Bahreïn, 70e avec 43 points. Le Koweït a eu le même score que la Tunisie, 41 points. D'après le directeur exécutif de l'organisation « I Watch », Mouhab Garoui, la Tunisie marque une note positive, même si c'est relativement faible. Garoui, qui s'est exprimé hier lors d'une conférence de presse de I Watch, a indiqué que l'année 2016 a été proclamée celle de la guerre contre la corruption, que ce soit par la société civile ou par le gouvernement Habib Essid, puis celui de Youssef Chahed. Il a souligné que la lutte contre la corruption est devenue effectivement l'une des priorités du gouvernement, ce qui s'est traduit par plusieurs projets et textes de loi, puis a été réaffirmée comme priorité dans la Déclaration de Carthage et dans le programme d'action du gouvernement Chahed, outre l'adoption de la loi portant création du pôle judiciaire et financier de lutte contre la corruption. Poursuivre les efforts Le directeur exécutif de I Watch a fait valoir « l'appui budgétaire conséquent » apporté cette année à l'Instance nationale de lutte contre la corruption. C'est un appui, a-t-il précisé, d'une importance capitale qui dénote une véritable volonté politique de soutenir les efforts nationaux de lutte contre la corruption. De même, il a indiqué que l'action gouvernementale va dans le sens de présenter les dossiers de corruption à la justice et de leur donner une certaine priorité à leur traitement en urgence. Et d'ajouter : « Jusque-là, aucune des grandes affaires de corruption financière ou d'évasion fiscale qui ont été présentées devant la justice n'a abouti à une sentence, et ce, depuis l'ère de la Commission nationale d'investigation sur les affaires de corruption et de malversation qui a été présidée par feu Abdelfattah Amor. Aucun homme d'affaires ou haut responsable de l'Etat n'a été poursuivi en justice pour une quelconque affaire de corruption, que ce soit dans le secteur public ou privé ! Aujourd'hui, nous espérons que les promesses de M. Youssef Chahed seront honorées. D'ailleurs, il vient de déclarer que le gouvernement est prêt à mettre en place les mécanismes nécessaires pour le lancement des procédures judiciaires contre les corrompus. Nous espérons que cela se réalisera dans un avenir proche ! ». Garoui a souhaité que l'année 2017 soit celle de la guerre contre la corruption au niveau de la justice comme l'a été l'année 2016 au niveau de la législation. D'autre part, il a souligné la nécessité de l'adoption du projet de loi portant sur la protection des dénonciateurs qui, selon lui, ont une grande importance pour tout le processus, notamment en ce qui concerne le secteur public, souhaitant qu'il réponde aux standards internationaux en la matière. Garoui a évoqué aussi le projet de loi portant sur la transparence dans la vie publique qui a accusé un retard par rapport aux promesses du chef du gouvernement qui l'avait annoncé pour fin 2016. Ce projet porte sur les conflits d'intérêts, l'enrichissement illégal et la déclaration des biens, notamment de la part des hauts responsables de l'Etat et des députés. Selon lui, ce projet n'a même pas été, jusque-là, discuté au sein d'un Conseil ministériel... Pour sa part, Wafa Fallah, coordinatrice de projet à « I Watch », a souligné l'importance de la loi portant sur la protection des dénonciateurs à l'heure où plusieurs parmi eux relevant du secteur public sont harcelés et malmenés par les responsables qui ont été dénoncés pour des affaires d'abus de fonds publics. Fallah a insisté sur le devoir de compléter l'arsenal législatif pour bien mener la lutte contre la corruption avec toutes ses composantes, tout en protégeant les dénonciateurs et les juges...