Il appartient à la grande école romantique, langoureuse et jouisseuse des années 1960-1970 qui privilégiait le spectacle au détriment du résultat. Une fièvre typhoïde mal soignée a rendu le retour d'Abdallah Hajri à la compétition un échec sur fond de bras de fer avec son entraîneur Rado. «A deux reprises, je me suis éloigné du Club Sportif Sfaxien, mon club de toujours. Une première fois à 23 ans pour une durée d'un an et demi, puis en 1974 pour effectuer mon deuxième cycle de droit à Paris où j'allais rester jusqu'en 1979. Au départ, j'ai rencontré beaucoup de problèmes. Je n'étais pas boursier. Revenu au pays durant les vacances d'été après ma première année de droit, j'ai attrapé une fièvre typhoïde qui a été mal soignée. Une fois reparti dans l'Hexagone, mon état a empiré. On n'a pas fait le bon diagnostic. On soupçonnait vaguement que j'ai attrapé une de ces maladies caractéristiques du continent africain. Toutefois, on n'a jamais pensé à la fièvre typhoïde, considérée là-bas une maladie classée, «disparue» et qu'on ne peut plus attraper. J'ai donc gravement rechuté : je suis tombé presque trois semaines dans le coma ; j'ai perdu une vingtaine de kilos. Mais, Dieu merci, je m'en suis relevé. Après cette rude épreuve, une fois au pays, j'ai repris les entraînements dans mon club entraîné alors par le Yougoslave Radojica Radojicic. C'était la saison 1974-75. Mon premier match après mon retour, je l'ai disputé contre le Stade Tunisien. Ce n'était pas très brillant. Après ma deuxième rencontre, la rumeur a enflé : Hajri n'est pas en forme ; il n'est plus compétitif. Dans mon esprit, les choses étaient claires : il n'est plus question de continuer si Rado ne me convoque pas pour le match suivant devant le CS Hammam-Lif. Et il en fut ainsi : nous gagnons contre le CSHL. Et comme une injure, Rado ne me convoque pas. Je décide de me retirer. Pourtant, dans le match suivant contre l'Etoile du Sahel, le technicien yougoslave m'appelle de nouveau, et m'avertit qu'en cas d'absence à Sousse, il m'écartera de l'effectif pour le reste de la saison. Et c'est ainsi que j'ai pris ma retraite définitive en 1974-75, à seulement 23 ans. Non sans avoir dit à Rado ses quatre vérités, c'est-à-dire qu'en agissant de la sorte, en se laissant influencer par la rumeur, il n'irait pas loin ni ne ferait de vieux os à Sfax. Effectivement, trois mois plus tard, il était limogé». «L'amour du CSS ne peut pas se dissiper» «Ma reconversion, je l'ai faite l'année suivante dans le journalisme en rejoignant l'équipe de l'hebdomadaire du lundi «Le Sport» et mon coéquipier Raouf Najjar, aux côtés du directeur Mahmoud Ellafi, feu Mustapha Zoubeidi, Ameur Bahri... J'ai retrouvé mon statut de supporter, plus tôt que prévu, sans doute, mais sans regrets. A mon poste d'ailier gauche, il n' y a pas eu à vrai dire sur le coup un véritable héritier. Les jeunes pousses appartenant à une superbe génération, les Agrebi, Akid, Dhouib... prenaient solidement le relais, mais d'ailier gauche, il n' y eut plus trace d'un spécialiste. Sur le coup, on m'appela pour former les Henchiri, Aloulou... J'ai eu la chance de connaître de très près les problèmes du club lorsque le président Moncef Sellami me nomma directeur sportif. Une expérience malheureuse qui ne dura pas plus d'un an. Avec les Hachicha, Zahaf..., nous avons mis en place une académie qui draine deux cents jeunes encadrés par neuf entraîneurs. Ce sont de futurs supporters du club beaucoup plus que de véritables champions pour l'avenir. L'amour du CSS ne peut pas s'estomper. Comme lorsque nous étions à Paris pour les études. On suivait l'équipe avec ferveur. On a offert au club le maillot avec lequel il remporta le doublé de 1971. Le même maillot que l'Ajax qui était en vogue alors. Sauf que la couleur noire remplace le rouge».