«Seul l'Etat est responsable de cette situation, ce n'est pas une faveur que l'on vous accorde en délivrant des titres de propriété à des prix bien en dessous de celui du marché», admet le secrétaire d'Etat aux Domaines de l'Etat et aux Affaires foncières, Mabrouk Korchid Le chef du gouvernement Youssef Chahed poursuit et multiplie ces derniers temps ses visites sur le terrain. Hier, il s'est déplacé à Zaghouan en compagnie du ministre de l'Equipement, Mohamed Saleh Arfaoui, et du secrétaire d'Etat aux Domaines de l'Etat et aux Affaires foncières, Mabrouk Korchid, ainsi que des députés du gouvernorat. Plus précisément, il a rendu visite aux localités de Jougar et de Bir Halima, où il s'est entretenu avec les habitants. «C'est bien la première fois qu'un responsable de haut rang vient nous voir ici», nous explique Aymen, habitant de Jougar, père de deux enfants et au chômage. Derrière les paysages magnifiques de Zaghouan, se cache en fait des familles en détresse. Le chômage est endémique et les visages sont fermés. « Le seul travail que j'ai trouvé est à 60 km d'ici, à Borj Cédria, je fais quotidiennement la navette », raconte un homme d'une trentaine d'années au chef du gouvernement. Loin d'être impressionnés par la visite du chef du gouvernement, des habitants exposent, un à un, leurs doléances à Youssef Chahed, dans l'espoir que cette visite change enfin leur vie. C'est le cas de cette quinquagénaire de Bir Halima dont la petite cabane qui lui servait de commerce a été démolie par les autorités : « Je n'ai plus de ressources, pourquoi ils ne s'en prennent qu'aux plus démunis ?», clame-t-elle. La responsabilité de l'Etat Comme plus de 900 agglomérations, Jougar (1.000 habitants) a été construit dans les années 1970 avec l'aval de l'Etat tunisien sur les terres des colons, mais sans régularisation de la situation foncière. Le chef du gouvernement a promis, comme il l'a fait à Ben Arous et à l'Ariana, d'accorder des titres de propriété à des prix bien en dessous du prix du marché. « Seul l'Etat est responsable de cette situation, ce n'est pas une faveur que l'on vous accorde », admet le secrétaire d'Etat aux Domaines de l'Etat et aux Affaires foncières, Mabrouk Korchid. Seulement, ce n'est pas ce qu'attendent en priorité les habitants de ces quartiers défavorisés. Lorsque nous les interrogeons, ils expliquent qu'ils veulent principalement du travail pour leurs enfants, une infrastructure sanitaire basique, l'électricité dans les rues, l'amélioration du transport public et tout ce qu'il faut pour une vie décente. « Nous travaillons sur les chantiers un jour sur deux, comment peut-on faire vivre une famille avec ça ? », se demande Achour, marié et père d'une petite fille en bas âge. A Jougar, le chômage est endémique. Pour vivre, il faut savoir se débrouiller. « Remercie Dieu pour tout, ces situations existent malheureusement un peu partout en Tunisie », dit Korchid en guise de réconfort à un vieux monsieur venu se plaindre. Les habitants de ces quartiers en veulent également aux « investisseurs ». « Depuis une année, l'Etat a accordé un terrain à une société de mise en valeur et de développement agricole qui était tenue d'embaucher des travailleurs de Jougar, mais rien n'a été fait, seule une poignée de personnes y travaillent », dénonce l'un des habitants. Le secrétaire d'Etat aux Domaines de l'Etat et aux Affaires foncières promet de faire subir à cette entreprise une inspection. « Si nous constatons qu'elle ne respecte pas ses engagements, nous lui retirerons le permis d'exploitation », a-t-il annoncé. Potentiel non exploité A Bir Halima, les habitants ont demandé au chef du gouvernement de réfléchir à la possibilité d'aménager une zone industrielle dans la région, qui aurait, selon eux, « tous les atouts pour devenir une zone industrielle ». Comme dans tous les quartiers défavorisés, on déplore aussi le manque d'infrastructures culturelles. « Le toit du club d'enfants menace de s'effondrer», dit un père de famille au chef du gouvernement. « Il y a dans ces régions un grand potentiel qui n'est malheureusement pas correctement exploité », a déclaré Youssef Chahed. Dans la foulée, il annonce que son gouvernement mettra en place un programme visant à louer aux citoyens les terres agricoles appartenant à l'Etat, sous forme de société de mise en valeur et de développement agricole. « Les 500 mille hectares de terres agricoles de l'Etat doivent entrer dans le circuit économique...car je crois en la capacité de l'agriculture d'absorber le chômage ». Le chef du gouvernement a déclaré aux médias qu'il compte effectuer des visites dans les 24 gouvernorats de la Tunisie pour écouter les préoccupations des citoyens. Entre trois et cinq cent mille Tunisiens vivent ainsi dans des conditions foncières non réglementaires, le gouvernement Chahed promet de réhabiliter les localités anarchiques et de faciliter l'intégration de leurs habitants dans le circuit économique.