Composé de 39 articles, un projet de loi vise à mettre de l'ordre dans les instances constitutionnelles, et ce, en définissant les règles d'organisation, les prérogatives du conseil élu, celles de l'appareil administratif, les règles relatives au budget et à la comptabilité, et enfin les procédures au contrôle de ces instances La rupture de la confiance entre l'Etat et les citoyens, à la suite de plusieurs décennies d'opacité dans la gestion des affaires, a incité les architectes de la Constitution de 2014 à créer plusieurs « instances indépendantes » des trois pouvoirs classiques. Certaines de ces instances sont dites constitutionnelles, alors que d'autres ont été prévues par la Constitution sans pour autant leur conférer une quelconque supériorité. Mais dès leur création, une réflexion a aussitôt été enclenchée dans les milieux académiques pour tenter de mettre ces instances dans leur contexte. Aujourd'hui, le débat a suffisamment mûri, pour se muer en un projet de loi déposé il y a un an par le ministère chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l'Homme. Un projet qui a été débattu hier lors d'une journée d'étude parlementaire consacrée aux « projets de lois organiques relatifs aux instances constitutionnelles indépendantes ». Mêmes si certaines instances sont, par abus de langage, appelées « instances constitutionnelles », en réalité, il n'y en a que cinq : l'instance des élections, l'Instance de la communication audiovisuelle, l'Instance des droits de l'Homme, l'Instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption et l'Instance du développement durable et des droits des générations futures. Toutefois, le professeur Slim Laghmani rappelle, lors de son intervention, que ces instances sont certes « indépendantes », mais restent des organes indissociables de l'Etat. « Il y a pour ces instances, des dispositions communes et des dispositions spécifiques, explique Mondher Bousnina, directeur de cabinet de Mehdi Ben Gharbia. Il a fallu donc réfléchir à un système juridique commun pour ces instances ». Composé de 39 articles, le projet de loi vise à mettre de l'ordre dans ces instances constitutionnelles, et ce, en définissant les règles d'organisation, les prérogatives du conseil élu, celles de l'appareil administratif, les règles relatives au budget et à la comptabilité, et enfin les procédures au contrôle de ces instances. Le professeur Slim Laghmani note, à cet effet, que le projet a tenté de respecter une double exigence. D'abord celle de l'indépendance, en accordant aux instances l'indépendance administrative et financière, l'immunité pour ses membres, le contrôle a posteriori et la révocabilité à la majorité renforcée. Ensuite, il a fallu obéir à l'exigence de mettre en place des garde-fous, à l'instar de l'obligation pour les membres de publier une déclaration de patrimoine avant et après la prise de fonctions, l'obligation de publier la liste des dons faits à l'instance mais également l'impératif de rendre des comptes au parlement quant à la gestion des ressources financières. D'un autre côté, si l'instance en question ne présente pas son rapport annuel au Parlement, ou si ce dernier ne vote pas en faveur du rapport, il est possible de constituer une commission d'enquête parlementaire autour des activités de l'instance et, si la mauvaise gestion est avérée, de révoquer ses membres. Pour sa part, le professeur Ridha Jnaiyah et plusieurs autres intervenants ont émis certaines réserves quant au contrôle financier de ces instances, estimant que ce contrôle est tantôt rigide, tantôt permissif. Pour le professeur Ridha Jnayeh, le projet de loi permet à ces instances de bénéficier de dons et autres contributions, sans vraiment prévoir de définir la nature de ces apports au budget de l'instance. Le directeur de cabinet a par ailleurs fait savoir que le projet de loi portant création de l'Instance de la communication audiovisuelle sera prochainement présenté devant un Conseil ministériel, tout en indiquant que la loi portant création de l'Isie devra, après les prochaines élections, faire l'objet de certains amendements en respect de l'article 126 de la Constitution.