Contrairement aux rumeurs, le chef du gouvernement travaille en étroite collaboration avec le président de la République Dès le début de son combat contre la corruption lancé il y a plusieurs jours, Youssef Chahed n'a été que mollement soutenu par sa propre famille politique. Certains nidaistes essaient de faire bonne figure en affirmant que « la lutte contre la corruption est une priorité », mais tout le monde ressent un malaise au sein du parti. Au-delà des accusations impossibles à vérifier quant à la proximité de quelques députés avec le sulfureux homme d'affaires Chafik Jarraya, son arrestation a semé la discorde au sein d'une majorité très fragile. Lundi dernier, une réunion prévue du bloc parlementaire de Nidaa Tounes a été marquée par l'absence de 29 élus « opposés », selon Sabrine Goubantini, à la tentative d'étouffement de l'initiative de Youssef Chahed. Ces déclarations lui valent aujourd'hui le gel de son adhésion au parti et son exclusion du bloc parlementaire. Enième division dans les rangs de Nida Tounès et cette fois, elle semble se dessiner entre les « pro » et les «anti» Chahed. Autrement dit, entre ceux qui veulent qu'il continue la guerre contre la corruption et ceux qui y sont opposés. Au même moment, d'autres partis, moins importants et moins influents que Nida, dont le nouveau bloc baptisé « Bloc patriotique », se donnent pour mission de soutenir le gouvernement d'union nationale dans cette guerre et l'encouragent sans hésitation. Finalement, le soutien tant recherché dans cette guerre, qui sera longue et difficile, ne vient pas de son propre clan. Serait-ce le début d'un destin à la Macron pour le jeune chef du gouvernement ? A terme, si cette guerre est gagnée — elle le sera si tous les Tunisiens s'y mettent —, Youssef Chahed, qui aura fait preuve de courage politique, pourra s'attendre à un avenir politique prometteur. Se détachera-t-il de son mentor qui le soutient dans cette guerre, le président de la République, pour commencer une nouvelle aventure ? Un nouveau parti peut-être ? Pour la députée du bloc patriotique Nejia Ben Abdelhafidh, il est trop tôt pour pouvoir parler de cela, car le paysage politique reste encore très flou. « Pour l'instant, le groupe parlementaire de Nida Tounès est toujours fort de ses 60 députés à l'hémicycle. Tant qu'il n'y a pas un élan spontané des députés à soutenir clairement Youssef Chahed, il n'y aura pas d'avancées dans ce sens », souligne-t-elle. Il est vrai que la frilosité des élus de Nida à l'idée de quitter le navire s'explique en partie par l'instabilité du paysage politique. Plusieurs élus entendent faire carrière en politique et ne souhaitent pas la compromettre aussitôt en faisant des choix précipités. De son côté, le député Walid Jalled (bloc patriotique) estime que la guerre contre la corruption n'est pas simplement celle de Youssef Chahed et que, contrairement à ce qui peut se dire, le chef du gouvernement d'union nationale travaille en étroite coordination avec le président de la République Béji Caïd Essebsi. « Ils travaillent en tandem, n'oubliez pas que la lutte contre la corruption est l'une des priorités du Document de Carthage dit-il. Mardi, le communiqué de la présidence de la République n'a laissé aucune place au doute quant à la volonté de BCE de combattre la corruption ». Jalled regrette cependant les tentatives de certains de pervertir les efforts du gouvernement en les faisant passer pour des règlements de comptes politico-financiers « Chafik Jarraya n'a aucune couleur politique, il a changé de casquette à plusieurs reprises, il n'appartient pas à Nida Tounès », tient à préciser Walid Jalled. Loin de charger ses anciens collègues de Nida, Walid Jalled continue à défendre le parti du président de la République en rappelant qu'officiellement le parti fait de la lutte contre la corruption la priorité des priorités. « Aucun parti qui se respecte ne peut aujourd'hui freiner cette lutte contre la corruption, explique-t-il. La société tunisienne s'est approprié ce combat, qui est en tous points semblable à la guerre contre le terrorisme ».