Des organisations nationales et internationales ont appelé, hier, au retrait immédiat du projet de loi organique portant création de l'Instance de communication audiovisuelle soumis en décembre 2017 par la présidence du gouvernement à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Elaboré par le ministère de la Relation avec les instances constitutionnelles et la société civile et des droits de l'Homme, ce projet de loi n'a pas tenu compte des observations et des suggestions de la société civile, ont-ils estimé. Lors d'une conférence de presse tenue au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens à Tunis, Néji Bghouri, président du syndicat, a indiqué que le projet de loi, soumis actuellement à l'examen de la commission parlementaire des droits, des libertés et des relations extérieures, «constitue une restriction à la liberté d'expression et n'est pas conforme aux normes internationales en la matière». Il a relevé que le ministère de la Relation avec les instances constitutionnelles a préparé le projet sans se concerter avec les associations des droits de l'Homme et les organisations professionnelles concernées. Pour Salwa Ghazouani, représentante de l'organisation Article 19, le projet de loi relatif à l'Instance de communication audiovisuelle est de nature à favoriser le retour du contrôle du secteur de l'information. Elle estime que la démarche unilatérale qui consiste à faire éclater le secteur de l'audiovisuel à travers la présentation de deux projets de loi distincts: un projet de loi portant création à l'Instance de communication audiovisuelle et un autre relatif à la liberté de la communication audiovisuelle, est un processus «dangereux», rejeté par les organisations actives dans ce domaine. Parmi les réserves émises par les associations et organisations à l'égard de ce projet de loi figurent l'absence de transparence et du processus participatif lors de la préparation du projet, la dispersion et la division du cadre législatif du secteur de l'audiovisuel et l'existence de défaillances légales et de menaces sérieuses contre l'indépendance de l'Instance de communication audiovisuelle. Les organisations signataires (23 ONG) sont notamment le Snjt, I Watch, le Comité pour le respect des libertés et des droits de l'Homme (Crldht), la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (Ltdh), Euromed, Article 19, Bawsala, Nawaat, le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes) et l'Association tunisienne des femmes démocrates (Atfd). Un projet préliminaire Le décret-loi n°116 relatif à la liberté de la communication audiovisuelle a prouvé ses limites et il n'est plus adapté aux dispositions des articles 31, 32 et 65 de la nouvelle Constitution a indiqué, hier, le ministre de la Relation avec les instances constitutionnelles, la société civile et des droits de l'Homme Mehdi Ben Gharbia. Ben Gharbia a jugé « indispensable « de remplacer ce décret-loi par une nouvelle loi qui ne manquera pas de réguler le secteur de l'audiovisuel sans pour autant toucher aux acquis de la liberté. S'exprimant à Monastir lors d'une consultation sur le projet de loi organique relatif à la communication audiovisuelle, le ministre a souligné que la version préliminaire de ce projet de loi vise à éviter les lacunes et les insuffisances constatées dans le décret-loi n°116 et à présenter des solutions pratiques permettant de résoudre les problèmes du secteur. « Il s'agit d'un projet préliminaire arrêté par le département et qui fait l'objet d'un débat et de développement», a assuré le ministre. Ben Gharbia a encore indiqué que son département se penche à l'heure actuelle sur la séparation entre la loi sur l'Instance de la communication audiovisuelle déjà soumise à l'examen au Parlement et celle visant la régularisation du secteur. La consultation sur le projet de loi organique relatif à la communication audiovisuelle est organisée par le ministère de la Relation avec les instances constitutionnelles et la société civile et des droits de l'Homme avec le concours et le soutien de l'Agence française de développement (AFD). Y ont pris part des représentants de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica), le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), la Fédération tunisienne des directeurs de journaux (Ftdj), le Syndicat des directeurs des médias, la Chambre syndicale nationale des radios privées, l'Institut de presse et des sciences de l'information (Ipsi), le Syndicat général de l'information et le Centre africain de perfectionnement des journalistes et communicateurs (Capjc).