Le grand homme politique à la si riche expérience et à la culture affirmée, celui qui a redressé la Révolution dès février 2011 en tant que chef du gouvernement, pour la conduire jusqu'aux élections de la Constituante, et celui qui a mené la bataille historique en faveur de l'équilibre de l'échiquier politique et de la confirmation de l'Etat civil ne peut-il pas, aujourd'hui, rééditer l'exploit par un tour de passe-passe politique de ceux dont il a coutume, dans le strict respect de la Constitution, des institutions et de l'intérêt national ? Malgré la crise institutionnelle que tout le monde déplore, le gouvernement continue à fonctionner et le Parlement à travailler, même si la lenteur est toujours là. Même la question de la confiance au gouvernement, qui risquerait, si elle faisait l'objet d'un vote, de ne pas obtenir le nombre de voix requis, elle est paradoxalement implicitement acquise, dans la mesure où il s'est avéré qu'aucune majorité n'est actuellement possible de rassembler en faveur d'un vote de renversement du gouvernement Chahed. Le jeu des institutions est donc, pourrait-on conclure, bloqué. Mais cette situation laisse les coudées franches au gouvernement autant qu'à l'ARP. De sorte que notre système, que tant de gens critiquent et veulent réformer, continue à tourner. À moins d'une radicalisation de la bipolarisation, qui est désormais à craindre, entre deux parties nouvellement annoncées : d'une part le gouvernement appuyé par Ennahdha et le groupe parlementaire dit national, de l'autre une alliance groupant le Nida Tounès officiel dirigé par Hafedh Caïd Essebsi et l'Ugtt, appuyée par le chef de l'Etat lui-même. Du rôle d'arbitre à celui de partie prenante Dans cette nouvelle configuration, le président de la République passe du rôle d'arbitre et de garant du respect de la Constitution à celui d'acteur actif dans le jeu des partis au niveau de l'autre pan de l'exécutif à deux têtes dont s'est dotée la Tunisie par le choix du régime mi-parlementaire, mi-présidentiel. Est-ce pour autant qu'il a outrepassé ses prérogatives constitutionnelles ? Probablement non. Mais c'est un jeu subtil qui pourrait implicitement dénaturer le régime ou le bloquer dangereusement. Peut-il encore sauver le pays ? Il ne s'agit donc pas du rôle fondamental que l'on attend de Béji Caïd Essebsi, le grand homme politique à la si riche expérience et à la culture affirmée, celui qui a redressé la Révolution dès février 2011 en tant que chef du gouvernement, pour la conduire jusqu'aux élections de la Constituante, et celui qui a mené la bataille historique en faveur de l'équilibre de l'échiquier politique et de la confirmation de l'Etat civil. Ne peut-il pas, aujourd'hui, rééditer l'exploit par un tour de passe-passe politique de ceux dont il a coutume, dans le strict respect de la Constitution, des institutions et de l'intérêt national ? Car, il est évident que son rôle de promoteur de la cohabitation avec les islamistes et de défenseur de la vraie République nécessite une finalisation adéquate et l'initialisation d'une équipe de successeurs chevronnés à même de prendre la relève du combat pour la modernité et l'Etat civil.