Si le niveau des barrages s'est sensiblement amélioré, l'exploitation totale de l'eau de pluie reste limitée. Le déluge auquel on a eu droit ces dernières semaines promet de bonnes perspectives pour le secteur de l'eau en Tunisie, affecté par la sécheresse qui a sévi ces trois dernières années. Selon le ministère de l'Agriculture, de la Pêche et des Ressources hydrauliques, les barrages ont recueilli 20 millions de m3 d'eau. Les inondations au cours de ce week-end à Korbous, Nabeul où les précipitations ont atteint 200 millimètres et Hammamet ont offert un spectacle affligeant qui a mis à nu la vétusté de l'infrastructure tunisienne. Quel impact sur les barrages ? Certains d'entre eux sont-ils toujours à sec ? Peut-on dire que le problème de la pénurie de l'eau est résolu ? M. Fakhreddine Torjmane, de l'Union régionale de La Manouba relevant de l'Utap et spécialiste de la question de l'eau, se montre mesuré dans l'évaluation de l'impact des pluies sur le niveau des barrages. Ce qui contraste avec l'emballement général de la population et le satisfecit des autorités gouvernementales. Disparités des barrages Il dresse un bilan mitigé en commençant par citer les barrages asséchés. «Les barrages totalement vides et à sec sont ceux de Menzel Temime et Lobna à cause de leur positionnement qui n'est pas stratégique». Les barrages ayant bénéficié de ces averses sont ceux du Nord-Ouest, Bouhertma et Barrak remplis à 80%. Concernant les barrages dans la zone du Cap-Bon, du côté de Nabeul qui a vécu les vingt-quatre heures les plus insoutenables de son histoire, il en raconte les complications et donne des explications : «Les oueds trouvent l'obstacle de la montagne limitrophe aggravé par un déluge de pluie de deux heures sans interruption et une infrastructure vieillissante des égouts et des canalisations bouchées. D'autant plus que le barrage de Nabeul a une petite capacité de remplissage et de contenance de six millions de m3». Par contre, les quantités d'eau collectées au niveau du plus grand barrage de Tunisie, à savoir celui de Sidi Salem, dont la capacité maximale est de 700 millions de m3, ont atteint 104 millions de m3 grâce aux dernières averses. Avec Chorb Erraïes, ce barrage alimente les conductions d'eau de la ville de Nabeul. Les barrages de Nebhana, Tine, Bou Hertma, Cherguen et Takwi ont atteint un niveau plutôt appréciable, selon l'expert. Les rivières El Matri et El Belli (Cap-bon) trouvent l'obstacle de la montagne limitrophe. Les autres rivières telles oued Bzghir Sodd et oued Bsiba descendent furtivement de la montagne sur la mer. Les réserves actuelles sont au-dessous de 50% de leur capacité ce qui leur donne le caractère de barrage à sec. On retrouve des réserves à hauteur de 7.745.000 de m3 à Nebhana (Kairouannais) soit 20% de sa capacité. A Bir El Mchergua 13.850.000 m3 soit 30%. Celui de Lobna un ton au-dessous à 7.000.000 de m3 soit 11%. Ces barrages ont eu un niveau de remplissage peu appréciable, selon l'expert. Les effets du changement climatique se font durement sentir avec parfois des pluies imprévisibles, notamment dans l'intensité et la durée. M. Torjmane rajoute même que les bienfaits de cette pluie ne concernent pas les agriculteurs qui souffrent de mille maux dont notamment des cultures maraîchères et céréalières endommagées par les averses.