LAHORE, Pakistan (Reuters) — Un tribunal pakistanais s'est opposé hier à l'extradition vers Kaboul de plusieurs chefs talibans afghans, décidée la veille entre les gouvernements des deux pays. Les autorités pakistanaises ont capturé ces dernières semaines quatre hauts responsables islamistes, dont le principal chef militaire taliban et numéro deux du mouvement, le mollah Abdul Ghani Baradar. Jeudi, les services du Président afghan Hamid Karzaï avaient annoncé que le Pakistan avait accepté d'extrader Baradar alors que mercredi, Islamabad indiquait qu'il serait d'abord jugé au Pakistan pour des crimes commis dans ce pays. Le défenseur des activistes, Khalid Khawaja, a déposé un recours devant le tribunal de Lahore, faisant état de craintes que Baradar et les autres talibans soient ensuite extradés d'Afghanistan vers les Etats-Unis. «Ils ne doivent pas être remis à un autre pays», a estimé le juge Khawaja Mohammad Sharif dans un arrêté interdisant l'extradition de cinq personnes, dont Baradar. L'avocat avait indiqué dans son recours que les suspects étant des musulmans et ayant été arrêtés au Pakistan, ils devaient être jugés selon le droit pakistanais. Islamabad a seulement confirmé l'arrestation de Baradar. Selon des responsables afghans, trois autres chefs talibans ont aussi été arrêtés: Abdul Salam, Mir Mohammad et Abdul Kabir. Le cinquième homme figurant sur la liste du tribunal de Lahore s'appelle Ameer Muawiya. Les forces américaines et de l'Otan sont engagées dans une offensive majeure contre les talibans dans le sud de l'Afghanistan. Plusieurs chefs militaires de la coalition ont estimé que la guerre ne pouvait plus être remportée militairement et qu'il convenait de chercher une solution négociée avec les talibans. Le Pakistan espère jouer un rôle de premier plan dans des pourparlers de paix en Afghanistan et limiter ainsi l'influence de son grand rival régional, l'Inde. Certains analystes estiment que Baradar pourrait, du fait de son influence auprès des islamistes, jouer un rôle dans de telles négociations. D'autres avancent que Baradar a pu s'engager dans la recherche de tractations excluant le Pakistan, et qu'Islamabad a choisi de l'arrêter pour l'empêcher de poursuivre dans cette voie.