Conjointement organisé, le premier colloque tuniso-libyen de lutte contre la corruption a ouvert hier, au siège de l'Inlucc aux Berges du Lac à Tunis, ses travaux, avec pour ordre du jour lié au phénomène, ses formes complexes, les moyens de sa prévention et les actions communes envisagées pour le combattre. Intervenant, à l'ouverture, au nom de Me Chawki Tabib, président de l'Inlucc, M. Mohamed Ayadi, juge administratif membre de l'Instance nationale de lutte contre la corruption, a bel et bien placé la manifestation dans un cadre de bon voisinage et de partage historique, culturel et géopolitique. De même, ajoute-t-il, la communauté de destin, dictée par un contexte révolutionnaire similaire, a fait que les deux pays ont le même souci socioéconomique. Et pour cause, la même volonté qui les anime dans leur guerre menée, en partie, sur les frontières tuniso-libyennes, face aux dangers de la contrebande et du blanchiment d'argent. Soit une forme de corruption qui favorise la prolifération du terrorisme. D'ailleurs, ce premier colloque en la matière est considéré comme le fruit de la convention de coopération bilatérale signée, en 2016, dans le but de renforcer les politiques de lutte et de protection. Cela s'inscrit également dans le cadre des efforts conjugués pour accroître l'échange d'expertise de formation et d'informations sur le phénomène en question. Le tout dans la logique de mettre en œuvre la convention des Nations unies de lutte contre la corruption que la Tunisie avait ratifiée en 2008, soit cinq ans après son adoption internationale. «D'autant qu'il y avait, aussi, une convention de coopération judiciaire signée entre nos deux pays depuis 1962, qui n'est plus en harmonie avec les lois en vigueur », évoque-t-il. Sa mise à jour semble plus que nécessaire, voire un défi, dans la mesure où l'enquête sur les crimes transfrontaliers liés à la corruption ne passe plus, comme avant, par des circuits diplomatiques si lents et compliqués. Dans ce sens, quelque 140 dossiers de corruption ont déjà été transférés à l'Inlucc par l'instance libyenne, révèle-t-il. Tendance commune Cette tendance commune fait que les deux instances de lutte anticorruption s'engagent à faire de leur mieux, mettant à profit l'expérience de chaque pays. Celle de la Tunisie, fait valoir M. Ayadi, va de pair avec un arsenal juridique et institutionnel servant des garde-fous. S'il y a corrupteurs, il y a forcément corrompus. C'est pourquoi l'Inlucc s'en tient toujours à l'alerte, comme devoir citoyen, d'autant que tout lanceur d'alerte se sent, alors, protégé par la loi. En matière de gouvernance, le volet préventif est aussi de mise. « L'expérience tunisienne est telle que la Libye pourrait s'en inspirer», fait-il valoir, soulignant que la Tunisie a également besoin de s'enquérir de ce qu'a fait la Libye. Son homologue libyen, M. Mohamed Khili, a bien souhaité qu'une telle démarche soit dans l'intérêt d'intensifier le travail en commun déjà engagé depuis trois ans entre les deux instances. En bref, il s'est dit disposé à faire de son mieux pour relever ce défi. Sans pour autant oublier de faire valoir l'apport de l'action commune. C'est là où s'illustre l'efficacité de pareille coopération dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le commerce parallèle, ainsi déclare Mme Olfa Chahbi, conseiller des services publics et juridiques auprès de l'Inlucc. «On a un cadre législatif et institutionnel cohérent conforme aux standards en la matière. Donc, tout est là pour mener à bien notre mission», se félicite-t-elle. Sauf que l'efficacité de ces lois devrait, alors, se traduire dans les faits. Et que la guerre anticorruption soit globale et multiforme. A l'instar des banques et instances financières, indique-t-elle, tout acteur intervenant (avocats, experts-comptables et autres) est appelé à y mettre du sien.